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Droits des migrants: Un rapport très critique envers le Maroc

Le Groupe antiraciste d'accompagnement et de défense des étrangers et migrants dévoilera son rapport les 20 et 21 mars à Rabat. Une longue liste de violations.

Détentions arbitraires, torture, racisme, discriminations, refoulements abusifs... c'est une longue liste de violations que dresse le Groupe antiraciste d'accompagnement et de défense des étrangers et migrants (GADEM) comme preuve du non-respect de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille par le Maroc. Sur la base de témoignages et de procès-verbaux, entre autres, le Gadern, association de droit marocain, dévoile, dans un rapport datant de février 2009 et dont les résultats seront présentés lors d'un atelier les 20 et 21 mars à Rabat, des récits choquants mettant en cause les autorités marocaines dans le naufrage d'embarcations de fortune. «Les autorités marocaines sont responsables d'opérations de secours qui, alors qu'elles semblaient, à première vue, avoir toutes les chances d'aboutir, se sont soldées par des décès», affirme le Gadern, citant plusieurs témoignages.

Parmi ceux-ci, l'un se rapporte au naufrage de migrants à Al Hoceima en avril 2008 : «La Marine nous suivait et, pour arrêter la patera, elle a utilisé un instrument tranchant, un couteau attaché à un bâton, qui a perforé le canot pneumatique, ce qui a provoqué la noyade de 29 personnes». Les autorités marocaines ont démenti avoir mis en péril la vie des migrants lors de ces événements, mais pour le Gadem, une chose est sûre : «Le paradigme qui prime actuellement, en matière de «gestion de flux migratoires» est basé sur une approche sécuritaire et utilitariste. Ce n'est donc pas étonnant que, dans cette logique, le Maroc trouve toutes les difficultés du monde à mettre en œuvre une stratégie cohérente qui répondrait à ses engagements internationaux pour le respect des droits des migrants, mais également cohérente avec la manière dont il exige que ses ressortissants à l'étranger soient traités», déclare au Soir échos le président du Gadem, Hicham Rachidi. Le rapportre lève essentiellement la répression entraînant des atteintes directes au droit à la vie et à la dignité des migrants subsahariens en particulier.

En plus des naufrages, ce sont lés refoulements que dénonce le Gadem, soulignant que même les migrants titulaires d'un statut de réfugiés ne sont pas épargnés. Ils sont considérés comme «clandestins» malgré leurs cartes HCR. Et de citer, à ce propos, un fait qui remonte à septembre 2008 : «Un réfugié reconnu parle HCR au Maroc a été refoulé après une arrestation à Dakhla. Il est depuis ce jour coincé à Nouakchott alors même que son épouse et sa fille se trouvent à Rabat, les autorités marocaines rejusant de le réadmettre sur le territoire marocain». Le rapport décrit l'humiliation des clandestins subsahariens et les violences physiques à leur encontre, prouvant que les autorités marocaines ne respectent pas les normes internationales qui établissent que les migrants détenus devraient être logés dans des lieux appropriés tels que prévus par la législation nationale, souligne le Gadem. Et de préciser que les conditions de sécurité et de salubrité des lieux de détention ne sont pas respectueuses de l'intégrité physique, psychique et morale des migrants.

«Les autorités marocaines utilisent la question migratoire de manière à amener l'UE à faire davantage de concessions au niveau de l'aide au développement. Et les responsables européens y trouvent leur compte car leur stratégie est justement basée sur le chantage au développement en matière de politiques d'asile et d'immigration. On se retrouve dans une configuration où les étrangers en général et les migrants d'origine subsaharienne en particulier deviennent l'enjeu de politiques qui les dépassent et sont instrumentalisés de part et d'autre», analyse Hicham Rachidi. C'est pourquoi le Gadem estime, dans ses recommandations, qu'il est urgent pour le Maroc de réviser la loi sur l'entrée et le séjour des étrangers au Maroc et de mieux former et informer les agents de l'Etat chargés de la question migratoire sur les droits des migrants et les engagements internationaux du royaume.

Migration ou terrorisme

Le Maroc s'est doté en 2003 d'une législation sur «l'entrée et le séjour des étrangers, l'émigration et l'immigration irrégulières» (loi n° 02-03). Mais cette loi demeure contestée par la société civile tant en raison des conditions de son adoption que de son contenu. Elle a été proposée dans un contexte de négociations entre le Maroc et l'UE sur les questions migratoires et présentée au Parlement en même temps que la loi 03-03 sur le terrorisme, juste quelques mois après les attentats du 16 mai 2003 à Casablanca. Des circonstances peu favorables au débat, estiment les ONG. Le Gadem compte ainsi relancer le débat sur cette situation. Les 20 et 21 mars, en partenariat avec le barreau des avocats de Rabat, il présentera les résultats de l'étude pour réfléchir aux stratégies de défense des droits des étrangers et des migrants au Maroc.

Leïla Hallaoui
Source: Le Soir Echos

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