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Sebta-Mellilia: Crevons l’abcès!

Une séance plénière est consacrée ce lundi au sujet chaud de Sebta et Mellilia. La visite du Roi d’Espagne Juan Carlos, prévue les 5 et 6 novembre dans les deux villes enclavées a secoué les relations diplomatiques entre les deux pays.

Le Maroc n’a pas hésité à rappeler, «sur instruction royale», son ambassadeur en Espagne pour une «consultation indéterminée». Pour sa part, la commission parlementaire des Affaires étrangères a déjà manifesté sa réprobation. Elle parle «d’acte de provocation». Les membres de la commission comptent même observer aujourd’hui un «sit-in de protestation devant l’ambassade d’Espagne à Rabat». Quelle est la marge de manœuvre dont dispose le Parlement? Peut-il aller jusqu’à demander une rupture diplomatique avec Madrid? Le gouvernement a déjà haussé le ton en parlant de «lignes rouges à ne pas franchir». Il est peu probable que l’on aille jusqu’à la rupture.

Côté espagnol, Le chef du gouvernement, José Luis Rodriguez Zapatero a souligné auprès du quotidien Publico que les rapports de l’Espagne avec le Maroc sont «très bonnes et continueront de l’être». Il a également refusé de «commenter la réaction de Rabat». Son gouvernement a toutefois «relativisé cette crise» diplomatique. «La presse s’interroge elle aussi sur les motivations de cette visite et surtout le choix du timing», déclare à L’Economiste Alvaros Lopez, journaliste au quotidien ABC. Curieusement la vice-présidente du gouvernement, Tereza Fernanades de la Vega, considère que «la visite de Juan Carlos est opportune en raison des bons rapports entre Madrid et Rabat»! Est-ce de la maladresse diplomatique ou une diversion? Coïncidence ou pas, la visite du Roi d’Espagne intervient juste après celle du président français, Nicolas Sarkozy. Cette visite, même si c’est la première depuis son accession au trône, viserait à marquer un coup… géostratégique.

Jockers
Sebta et Mellilia sont des jockers de la politique étrangère espagnole. Comme c’est le cas, dans une moindre mesure, du dossier du Sahara. Les gouvernements espagnols restent versatiles sur ce sujet. Ils changent de positions selon leur couleur politique.

Madrid tente ainsi de préserver l’équilibre des rapports. Le but est de ne pas froisser les autres voisins du Sud. L’Algérie, à titre d’exemple, fournit 60% de gaz naturel aux Espagnols. Il est vrai aussi que Rabat et Madrid ont déjà signé en 1991 un traité de bon voisinage et de coopération. Reste que depuis cette date quelques malheureux épisodes ont marqué les relations bilatérales. L’affaire de «l’île de Leila», qui a éclaté le 11 juillet 2002, en fait partie. Personne ne s’attendait alors à ce qu’un petit rocher inhabité, à 40 km à l’est de Tanger, soit à l’origine d’un clash diplomatique entre Marocains et Espagnols. Le gouvernement du populiste José Maria Aznar était à l’époque au pouvoir. Le dossier a été plus ou moins clôs, le 22 juillet 2002. Toujours est-il que Sebta et Mellilia sont un abcès récurrent des relations bilatérales. Tôt ou tard il faudra le crever.

Pesanteur
Les rapports clairs-obscurs qui lient le Maroc et l’Espagne sont surtout cristallisés par le dossier des deux villes enclaves. Dans l’affaire de l’île de Leila, l’ex-ministre des Affaires étrangères, Mohammed Benaïssa, parlait de «désardiniser» les relations. Il faisait allusion au dossier des concessions de pêche. Faudrait-il alors que les deux pays «désenclavent» leurs relations bilatérales?

La «solution politique», pour reprendre la formule fétiche de l’ONU, est évidemment inévitable. L’Espagne a déjà une 1re expérience en matière de désenclavement… diplomatique. Son différent avec l’Angleterre, au sujet de Gibraltar, s’est résolu en 2006 par un référendum. Cette solution est-elle transposable sur Sebta et Mellilia? Elle est envisageable mais pas pour le Maroc à cause des pesanteurs de l’Histoire pèse.

Faiçal Faquihi
Source: L'Economiste

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