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Le PJD, arbitres des législatives au Maroc

Le PJD pourrait doubler sa représentation au sein du Parlement lors du scrutin de vendredi.

« Je Ne vois pas pourquoi j'irais voter, de toute façon ils ne pensent qu'à s'en mettre plein les poches. » Même s'il est inscrit depuis de nombreuses années sur les listes électorales, Yassine, 32 ans, chauffeur d'un petit taxi à Rabat, n'a pas du tout l'intention de se rendre dans son bureau de vote vendredi, jour de scrutin. Au total, 33 formations politiques réparties sur 1870 listes (un record !) présenteront des candidats pour tenter de remporter l'un des 325 sièges de la Chambre des représentants, la Chambre basse du Parlement marocain. Contrairement à Yassine, plus des deux tiers des électeurs affirment qu'ils iront voter selon un sondage réalisé il y a un mois à travers tout le royaume, même si la grande majorité d'entre eux restent encore très indécis quant au bulletin qu'ils glisseront dans l'urne.

La grande interrogation de ces élections législatives, les secondes depuis l'arrivée du roi Mohammed VI sur le trône, est de savoir quel score réaliseront les islamistes du PJD, le Parti de la justice et du développement, qualifiés de modérés. En 2002, les islamistes n'avaient présenté de candidats que dans une circonscription sur deux, afin, expliquaient-ils à l'époque, d'éviter un « processus à l'algérienne », en référence à l'écrasante victoire du Front islamique du salut en 1992. Cette fois, les listes du PJD seront présentes dans 94 des 95 circonscriptions que compte le pays, avec la lutte contre la corruption pour principal thème de campagne et l'objectif affiché de remporter quelque 80 sièges, soit près du double d'il y a cinq ans.

Débarrassé de plusieurs de ses éléments les plus extrémistes, le PJD ne fait désormais plus peur à grand monde, et certains pensent qu'il pourrait constituer un rempart face aux islamistes radicaux. « Difficile pour autant d'affirmer aujourd'hui que cela leur ouvrirait les portes à une participation au sein du futur gouvernement », explique un diplomate européen en poste à Rabat. Pas certain non plus que la formation emmenée depuis 2004 par Saâd Eddine Othmani, un médecin psychiatre de 51 ans, ait grand-chose à gagner à participer à la gestion des affaires au sein d'une coalition hétéroclite.

Démission du n° 2 du régime

Depuis cinq ans, le pouvoir est structuré par deux poids lourds de la vie politique marocaine, issus de la mouvance nationaliste de l'avant-indépendance : les conservateurs de l'Istiqlal et les socialistes de l'USFP, deux formations vieillissantes qui réunissent une centaine de députés, mais qui peinent à renouveler leurs cadres et à convaincre un électorat lassé par des années de corruption, de prévarication et de tripatouillages électoraux.

Ces élections seront également marquées par une énigme. Celle de la démission au début du mois d'août du ministre délégué à l'Intérieur, Fouad Ali el-Himma, l'un des plus proches conseillers du roi Mohammed VI, et véritable numéro deux du régime. Il a choisi de quitter le gouvernement pour se présenter « sans étiquette politique » dans la région de Benguérir, à une soixantaine de kilomètres au nord de Marrakech. Une démission qui a pris tout le monde de court et qui fut diversement commentée dans la presse marocaine. Certains y voient une disgrâce, tandis que d'autres estiment, s'il est élu, qu'il s'agit d'une rampe de lancement qui pourrait le propulser au poste de premier ministre. L'intéressé actuellement en campagne dans la circonscription se refuse pour l'heure à tout commentaire sur le sujet.

Pour la première fois depuis son indépendance, le Maroc accueillera une quarantaine d'observateurs étrangers, sous l'égide du National Democratic Institute for International affairs (NDI), une organisation non gouvernementale américaine que préside Madeleine Albright, l'ancienne secrétaire d'État du président Clinton. « Ce qui ne peut que favoriser le progrès du pays vers des pratiques démocratiques exemplaires », commentait récemment Ahmed Herzenni, le nouveau président du très officiel Conseil consultatif des droits de l'homme. Ces observateurs pourront compter sur l'appui de plusieurs ONG marocaines, triées sur le volet et bénéficiant du soutien financier de l'Union européenne. « La transparence des élections, c'est l'essence de la démocratie », affirmait il y a une quinzaine de jours le souverain marocain lors d'un discours à l'occasion de l'anniversaire de la « révolution du roi et du peuple », ajoutant qu'il n'y a pas « de place aux pratiques illégales dans quelque domaine que ce soit et par qui que ce soit ». À ce jour, quelque 700 plaintes pour infractions électorales ont été soumises au parquet général.

Michel Zerr
Source: Le Figaro

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