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Des hotels marocains pas très honnêtes

Des établissements hôteliers marocains affichent, sans être inquiétés, une ou deux étoiles de plus. Rien qu’a Marrakech par exemple, «La Vie éco» en a identifié une dizaine. Ce phénomène est répandu au Maroc. Ces fraudes sont encouragées par la complaisance, l'indifférence et un système de suivi mal conçu.

Disons-le d’emblée : Le système de classement des établissements hôteliers au Maroc est loin d’être performant. Réalisé par des commissions régionales, il est de fait sous influence et des professionnels et des autorités locales. Tous les professionnels du tourisme un tant soit peu sérieux vous le diront, mais sous couvert d’anonymat, par peur des représailles et des règlements de comptes.

Les tour-opérateurs étrangers ont leur propre grille de classement
Les tour-opérateurs étrangers ne s’y sont d’ailleurs pas trompés puisque, depuis quatre ou cinq ans, ils ont établi leur propre grille de classement pour ne pas être en porte-à-faux vis-à-vis de leurs clients et les associations de consommateurs qui sont très actives sur les marchés émetteurs. Pour se protéger juridiquement, ils ont donc inventé leurs propres critères.

En d’autres termes, les critères nationaux de classement sont loin d’être aux standards internationaux, surtout quand on sait par exemple qu’aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, pour se faire classer, un hôtel doit satisfaire à une grille de 480 critères précis. Autre exemple, celui de la Grèce où même la composition du petit-déjeuner est réglementée.

Chez nous, explique un professionnel du voyage, «d’une part, on se protège entre copains hôteliers, et, d’autre part, les autorités peuvent peser sur les décisions qui ne sont pas rendues tout de suite, mais après réflexion et "délibérations", ce qui ouvre la porte à tous les abus». Des abus qui n’épargnent aucune ville, aucune région. Ceci est d’autant plus préjudiciable que les tarifs sont établis justement par catégories et par régions. Tout en étant libres, ils sont néanmoins avalisés par les fédérations hôtelières et touristiques et par les délégations régionales du ministère du tourisme, pour leurs membres qui s’acquittent de leurs cotisations, cela s’entend.

Mais, plus grave encore est le manque de suivi : des hôtels classés qui ont pignon sur rue affichent volontiers une ou deux étoiles de plus par rapport à la catégorie qui leur est attribuée et qui est dûment enregistrée au niveau du ministère de tutelle, sans qu’ils ne soient inquiétés.

La Vie éco a pu se procurer une liste d’hôtels à Marrakech, pourtant destination touristique phare du Maroc, qui sont officiellement classés

Externaliser le classement, une solution efficace?
2 étoiles mais affichent sur leurs façades 3 et même 4 étoiles. Le classement a été vérifié établissement par établissement auprès du ministère du tourisme et les photos des façades sont là pour prouver que l’affichage n’a rien à voir avec le classement officiel. Il s’ensuit évidemment des brochures imprimées avec des classements frauduleux, diffusées auprès des agences de voyages et sur internet.
Par ailleurs, on trouve même des RT (résidences touristiques) et VVT (villages de vacances touristiques) qui affichent des étoiles à côté de leurs enseignes, alors que ces établissements sont normalement classés en 1ère, 2e ou 3e catégorie. Et tout ceci au vu et au su de tout le monde.

Dans un compte rendu des procès-verbaux de toutes les réunions de délibérations de la commission régionale de classement des établissements touristiques, on peut lire que, dans beaucoup de cas, les recommandations de la commission nationale de classement, lors de son passage en 2002, «n’ont pas été exécutées et ce après un délai de 4 ans». Ces recommandations concernaient notamment les normes d’hygiène, de sécurité, d’ameublement, etc.

S’agissant des faux classement on peut lire dans le même compte-rendu: «Il est de notre devoir d’attirer également l’attention [sur ce point] de certains responsables d’unités hôtelières qui affichent un classement contraire au classement officiel (...), ce qui porte gravement atteinte et préjudice à la déontologie de la profession et entraînera, d’après les services de la wilaya, des sanctions pour publicité mensongère et frauduleuse». On peut se demander quand...

Que faire pour arrêter ce phénomène qui touche aussi bien l’hôtellerie que la restauration? D’aucuns recommandent carrément de confier le classement des établissements hôteliers à des organismes externes, neutres et indépendants, et qui peuvent en assurer le suivi. Mais, à coup sûr, les hôteliers vont, une fois de plus, ruer dans les brancards.

Mohamed Moujahid
Source: La Vie Eco

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