PC made in Morocco

A priori, rien ne prédisposait Karim Mazouzi à devenir le patron de la première société à revendiquer la paternité d'un ordinateur 100 % marocain. Diplômé de topographie, à Paris, en 1982, le jeune Franco-Marocain montera d'abord une entreprise dans le bâtiment avant de passer au secteur automobile. En 1995, il crée avec son frère, ingénieur en informatique, DBM France (pour Data, Business et Marketing). Implantée dans la région parisienne, cette société commercialise des périphériques et des produits informatiques. Principaux clients : des pays africains, dont le Maroc. Encouragé par le volume important des transactions avec le royaume, Karim Mazouzi décide, en 1997, de réaliser un rêve qui lui tient à coeur : retourner au pays natal pour créer DBM Maroc, à Casablanca.
Dans un premier temps, la filiale marocaine distribue les mêmes produits que la société mère. Dès 1999, elle se lance dans la fabrication du premier ordinateur marocain, lequel verra le jour dans un garage de Mohammedia, à une trentaine de kilomètres de la capitale économique. Accent, c'est son nom, sera commercialisé en juillet 2002.

Jusqu'alors, les intégrateurs locaux se contentaient de monter des clones qu'ils n'avaient jamais osé vendre sous un nom propre. Cette audace, Karim Mazouzi sera le premier à l'avoir : « Nous disposons de techniciens, d'ingénieurs, d'un savoir, alors pourquoi ne pas développer une marque marocaine dont le potentiel correspondrait au besoin du consommateur marocain et qui pourrait concurrencer les grands noms, trop chers au regard du pouvoir d'achat local. »

Depuis que le jeune patron a eu cette brillante idée, DBM Maroc est passée de trois salariés à une soixantaine et revendique aujourd'hui entre 15 % et 20 % du marché marocain. Entre-temps, elle a aussi fait des émules, à l'instar de PC Tech et de sa marque, MSYS. De 20 % à 30 % moins cher que Dell et autres Compaq, Accent est, aux dires de son « géniteur », « le seul PC africain à bénéficier d'une certification Microsoft et Intel Premier Provider », titre qui récompense les meilleurs intégrateurs des produits Intel et leur donne un accès privilégié aux dernières technologies du fabriquant américain de microprocesseurs. Outre son prix attractif, Accent doit son succès à son service après-vente local, talon d'Achille des grandes marques.

Forte d'une reconnaissance certaine sur le marché national, DBM est partie à la conquête de l'Afrique subsaharienne. Accent s'exporte déjà en Côte d'Ivoire et au Sénégal, et ambitionne de s'implanter dans d'autres pays du continent comme la Tunisie et le Congo où des contacts sont déjà en cours.

DBM fabrique également des ordinateurs portables ainsi que des serveurs. Toute sa gamme de produits est vendue dans quelque cinquante magasins des enseignes de grande distribution (Marjane, Acima, Metro) ainsi qu'auprès d'une trentaine de revendeurs agréés. Son chiffre d'affaires, en progression de 20 % chaque année, avoisine aujourd'hui 60 millions de dirhams (5,4 millions d'euros).

Dès juin 2005, DBM devrait prendre possession d'une nouvelle usine actuellement en construction à Mohammedia. Ce site représente un investissement de 4 à 5 millions de dirhams. Chaque année, entre 30 000 et 50 000 PC se vendent au Maroc, où le taux d'équipement ne dépasse pas 1 %. Karim Mazouzi rêve d'en écouler 500 000 en les proposant à 2 500 dirhams (contre 4 000 ou 5 000 dirhams), et ce grâce à un futur partenariat réunissant DBM, Maroc Telecom et Microsoft.

En attendant, il n'est certes pas mécontent de sa réussite personnelle, mais il est tout aussi ravi de pouvoir montrer aux jeunes Marocains qu'il est possible de rester dans son propre pays et de le développer. Autre motif de fierté : avant, « on associait les produits marocains aux tomates ou aux oranges, aujourd'hui, et cela étonne les gens, on peut aussi dire qu'on fabrique des ordinateurs au Maroc ».

FADWA MIADI
Source : Jeune Afrique - L'intelligent