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Tourisme : Réalité ou bidonnage?

Le ministre du Tourisme, de l’Artisanat et de l’Economie sociale, table sur 5 millions de touristes d’ici la fin 2005. Malgré ce fait que les projections de Adil Douiri se basent sur des tendances globalement positives sur le premier semestre, les professionnels n’ont pas encore tous cédé à l’accès d’optimisme de leur ministre.

La prudence reste de mise, d’autant que les chiffres annoncés à la fin juillet, à savoir l’augmentation de 19% des arrivées, et de 17% des nuitées, tout aussi spectaculaires qu’ils sont, sont faits en comparaison de l’année 2003, et pas par rapport aux années de référence 2000 et 2001.

De plus, si la plupart des opérateurs jugent réalisable cet objectif, il n’en demeure pas moins qu’une bonne frange regrette que cette hausse quantitative ne soit pas tout aussi qualitative. «Les nuitées se sont envolées, mais dans le même temps, les recettes n’ont progressé que d’un petit 4% sur la période concernée», lance un hôtelier qui requiert l’anonymat. «Si l’on tenait compte de la surévaluation de l’euro sur le dirham, les recettes n’ont pas progressé mais diminué», poursuit-il. D’ailleurs, c’est sur la question de la qualité que le communiqué royal publié à l’issue de la réunion d’Ifrane a le plus insisté. Tout en rappelant qu’il ne peut y avoir de tourisme de qualité sans prestations de qualité, Sa Majesté la Roi a évoqué la nécessité de revoir le système de classement des hôtels.

D’autres opérateurs, tout aussi réservés sur les estimations ministérielles, tout aussi partagés sur les projections chiffrées, s’interrogent sur cette comptabilisation trop centralisée, et qui confond pêle-mêle touriste étranger et MRE. Un raccourci, clament-ils !

Rappelons que ni Hassan Sebbar, encore moins Driss Benhima n’ont de leur temps, franchi ce seuil, «tout aussi psychologique que les 5 millions de touristes en 2005», ironise-t-on à Marrakech. En fait, tout le débat qui se fait jour est là : Doit-on considèrer le Marocain résidant à l’étranger comme un touriste à part entière ? La définition de l’Organisation mondiale du tourisme coupe court à toute spéculation, puisqu’elle considère comme touriste toute personne ayant séjourné plus de 24 heures en dehors de son lieu de résidence. Cet argument mis en avant par le ministère trouve des échos favorables chez certains professionnels. Pour le président du CRT de Marrakech, Kamal Bensouda, l’approche ministérielle est «plaidable». «Il faut remarquer que «les MRE de deuxième et de troisième générations sont de plus en plus consommateurs de produits touristiques. Pour cette année par exemple, il a été enregistré dans les hôtels à Marrakech et sûrement dans d’autres villes du Royaume, d’importantes arrivées de cette catégorie de touristes ainsi que des nationaux».

Pas donc d’objection au mode de comptabilisation adopté par le ministère, lequel recoupe non seulement l’approche de l’OMT, mais prend en compte désormais le nouveau MRE, « souvent un touriste de qualité, avec un taux de retour important, et pouvant séjourner en moyenne deux fois au Maroc compte tenu des 35 heures appliquées dans les marchés émetteurs d’Europe».

Autre personnalité touristique à approuver l’approche ministérielle, Abass Taârji, président de la Fédération du tourisme. Tout en notant le caractère symbolique des 5 millions de touristes (la moitié de l’objectif du contrat-programme), cet opérateur estime que cette barre des 5 millions de touristes pourraît être franchie mais à condition que le rythme enregistré sur le premier semestre se poursuive jusqu’à la fin de l’année.

Concernant la question de la définition du touriste, le président de la FNT pense que l’approche ministérielle est bien fondée et rappelle au passage que dans les 10 millions de touristes prévus en 2010, 7 sont étrangers et 3 MRE.

Une chose est sûre, l’actuel mode de comptabilisation retenu par le ministère du Tourisme, tout aussi légitime qu’il soit aux yeux de l’OMT, permet aussi, à tout le moins, de remettre le contrat-programme sur la selle.

Grâce à cette base de calcul, l’on sera au 31 décembre 2004, à la moitié des objectifs quantitatifs inscrits dans le contrat-programme. Le tout sans qu’en valeur absolue, l’on ait enregistré plus de touristes étrangers qu’en 2001, et sans que les recettes ne progressent. Une contradiction qui s’annulera d’elle-même, quand la qualité sera érigée en priorité.


Adam Wade
Source : Aujourd'hui le Maroc

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