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La saison agricole marocaine compromise

L’exposé de Mohand Laenser, mercredi en Conseil de gouvernement, en dit long sur la situation alarmante de la saison agricole 2006-2007. Et pour cause, le déficit de pluie enregistré est de l’ordre de 44% par rapport à la moyenne. Un renversement net de tendances après les précipitations abondantes et la très bonne récolte de la campagne passée.

La situation actuelle est encore plus aggravée par la forte vague de froid qui sévit dans la plupart des campagnes marocaines. Résultat: une importante diminution des superficies cultivées. Les céréales d’automne sont les premières cultures à accuser le coup. A cela s’ajoute la dégradation de la situation végétale dans certaines provinces. La faiblesse du couvert végétal des pâturages se traduit tant par la rareté des aliments pour bétail que par la hausse de leurs prix. «Nous sommes d’ores et déjà dans un schéma d’une année de forte sécheresse. La plupart des régions agricoles sont affectées. Pour certaines cultures et zones, force est de constater qu’il est déjà trop tard», indique Ahmed Ouayach, président de la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (Comader). Grenier du Maroc, la Chaouia figure en tête des zones «sinistrées».

Du côté du gouvernement, aucune mesure spécifique concernant l’agriculture n’est prévue pour le moment. « L’évolution de la campagne agricole reste tributaire des conditions climatiques devant prévaloir en janvier et au printemps», a dit Laenser. Un suivi quotidien a été mis en place par le département de tutelle pour réagir en cas de développement défavorable. «Ce retard est anormal. Mais il est préférable que le gouvernement prenne le temps de mettre en place des ripostes appropriées, plutôt que de servir de vieilles recettes qui n’atteignent pas l’agriculteur», affirme Ouyach. Selon lui, et s’il est une mesure d’urgence à envisager, c’est bien la révision des dettes des agriculteurs. D’autant plus que, même si la prochaine saison est favorable, les concernés n’auront pas de quoi financer leurs activités. L’impact d’une mauvaise saison est systématiquement ressenti sur deux années». Du côté du Crédit agricole, rien n’est également prévu dans ce sens pour l’heure. «Toute décision doit émaner, d’abord, du gouvernement. Et nous étudierons par la suite les meilleurs moyens de l’accompagner», indique Jamaleddine El Jamali, secrétaire général de la banque.

En attendant, le mot d’ordre est de «sauver les meubles». C’est le cas notamment pour l’élevage. Un programme d’urgence de sauvegarde du cheptel est actuellement en cours de finalisation. « Il devra être présenté officiellement en début de semaine prochaine», déclare Mohand Laenser à L’Economiste. A cet effet, des réunions-marathon sont organisées au ministère. Le but est de trouver «les moyens de financer les actions prévues», ajoute Laenser. Celles-ci concernent notamment la prise en charge du transport des aliments de bétail, l’utilisation de camions-citerne pour l’approvisionnement en eau du cheptel et la mise en place d’un large programme de cultures printanières. Dans tous les cas, les experts sont unanimes: plus que des mesurettes, le secteur agricole nécessite une réforme en profondeur. Différentes pistes sont proposées, telles que la reconversion vers des cultures moins gourmandes en eau et l’utilisation de techniques de dessalement de l’eau de mer pour l’irrigation.

Eau: Chute des stocks
La saison agricole de cette année est d’autant plus comprise que même les ressources souterraines et les stocks en eau des barrages se tarissent.

A titre indicatif, la nappe phréatique de l’oued Saïss (Fès-Meknès) connaît un déficit de 100 millions de m3. Au Souss-Massa, le déficit enregistré est de 300 millions de m3. «Cela pose le problème de la recharge naturelle des nappes et, par conséquent, la disponibilité de la ressource à moyen et long termes», indique Rachid Balafrej, spécialiste de l’eau et conseiller auprès du ministre de l’Aménagement du territoire. La situation n’est guère reluisante au niveau des barrages. Le taux de remplissage des ouvrages, comme El Massira et Lalla Takerkouste, qui alimentent des régions entières, est de moins de 50%.

Tarik Qattab
Source: L'Economiste

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