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Caméra braquée sur le cinéma marocain

Rares sont les films qui traitent des sujets, conformément à une apagogie culturelle et artistique claire, qui interprètent la question de la création artistique comme un moyen permettant de véhiculer un discours artistique raisonné et motivé par un engagement conscient dont le but est de porter sa contribution pour tracer des traits esthétiques et culturels du projet artistique personnel et national.

Extrait de l'affiche du film La chambre noire, une des caractéristiques, devenues intrinsèques au cinéma marocain, c'est son traitement abusif des sujets sociaux selon la logique de l'emprunt et de la transposition. Omettant ainsi de les mettre au service de l'élaboration/affinement d'un projet artistique positif qui fait du réel son domaine d'investigation pour le transformer, par la suite, à tel point qu'il ne garde que des traces référant à son identité. Ce réel rompt donc avec ses origines et devient un moyen de l'imaginaire filmique.

La réalité marocaine, quant à elle, a été traitée par le cinéma suivant une vision qui met en exergue la dualité : conservatisme et rénovation et c'est ce que nous allons tenter de traiter à partir des axes suivants :

Le thème de la mémoire
La mémoire a constitué un thème central dans les films marocains et s'est manifestée à travers des dimensions personnelles, collectives, privées, générales ou intimes. Le travail sur ce thème a été considéré, pour des années, élitaire et régi par des raisons ambiguës comme c'est le cas actuellement pour le traitement, par quelques cinéastes, de la mémoire de la souffrance : les années de plomb.

Le travail sur cette mémoire a été, surtout dans ses débuts, l'affaire du cinéaste qui porte en lui un souci de conscience nationale. C'est pourquoi il fut traité en termes de mémoire blessée, opprimée. L'apparition d'autres films, abordant autrement ce sujet, visait la création d'un amalgame et imprégner la création d'une certaine ambiguïté rendant difficile la définition des positions de chacun car ce thème, ne peut être traité qu' avec une prise de position face au conflit social et avec un attachement clair à la conscience historique et une définition/position de la fonction de la création artistique vis-à-vis des conflits sociaux.
Donc il s'agit d'une prise de position qui ne tolère pas l'indifférence car cette mémoire est le produit d'un conflit social et son traitement artistique doit essentiellement véhiculer les positions de ce clan ou de l'autre et ce qui ancre davantage ce point de vue c'est que le cinéma et la création artistique, en général, ont constitué, depuis toujours, un champ idéologique qui met en scène les conflits politiques, sociaux, culturels.

Le thème de la mémoire, tel qu'il a été traité par le cinéma marocain, pourrait être abordé selon les entrées suivantes :

L'histoire coloniale
L'histoire coloniale a constitué un thème central dans un bon nombre de films comme « 44 ou les récits de la nuit », «mirage», «les copains d'hier», « Bamou », « Anwal », « soif », etc. Mais il est à noter que la récurrence de ce thème laisse beaucoup à désirer si on la compare à ce qui a été réalisé dans d'autres cinémas.

Cette dimension historique a été perçue par le cinéma marocain suivant deux angles et avait deux finalités :
- La documentation : c'est le cas des films « 44 ou les récits de la nuit », « Anwal », etc.
- L'enrichissement de l'imaginaire filmique comme dans « soif », « mirage », « les copains d'hier », etc.

Cependant, il est à signaler que la logique dominante qui a imprégné la majorité des films qui ont travaillé sur « la mémoire historique » c'est l'essence de l'histoire, c'est que ces films ont repris et transposés des faits relatifs à l'histoire de tout le Maroc en un moment historique particulier. C'est le cas du film « soif » dont le réalisateur, S. Chraibi, avait ses propres raisons pour la transposition de la réalité surtout que le film est inspiré d'une oeuvre écrite « le sacrifice des vaches noires » du colonel M. Oulaid. Dans ce film, le colonisateur parait humain et les habitants de la région (Tinejdad) plus intimes dans leurs relations avec le représentant militaire du colonialisme français.
La question que cherche à poser ce film est celle de la vérité historique prise entre réalité et traitement artistique (cinématographique).
S. Chraibi, dans son traitement de ce sujet de cette façon avance des arguments qu'on peut prendre pour logiques surtout que le réalisateur s'est inspiré d'une oeuvre mais nous sommes amenés à poser les questions suivantes : Quelles sont les limites de le vérité historique dans le film ? Est- ce que ce qu'a vécu la région de Tinejdad est généralisable pour l'ensemble de la patrie ?
Est-ce que la création artistique doit s'assigner la tâche de reproduire l'histoire ?
Le film « soif » a tenté un travail de reconstitution de la mémoire. C'est le projet sur lequel travaille S. CHRAIBI depuis son film «des journées d'une vie ordinaire» et arrivant à «Jawhara». Ce cinéaste a accumulé, dans ce sens, des points positifs surtout concernant la prise de position artistique.
La logique de la transposition et de l'essence historique est présente aussi dans l'expérience du réalisateur S. Ben Barka dans son travail sur la bataille «Oued El Makhazin».
Dans ce film, la matière historique essaie de rapprocher l'officiel et le réel. Or il s'agit d'un traitement personnel de la réalité historique marocaine.

A suivre

Ameur Cherqui
Souce: Al Bayane

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