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Asilah : Découverte d'une monnaie vieille de dix siècles

Les autorités judiciaires d'Asilah mènent, depuis près d'un mois, une enquête pour élucider les circonstances de la découverte d'un lot de pièces de monnaie vielles de près de 10 siècles, dans un douar près de Sidi-Yamani.

Les 468 pièces de monnaies, remises aux soins du musée Al-Kasbah de Tanger, représentent une grande valeur archéologique et historique. De par la date frappée en chiffres hindou (480 de l'hégire), les anciennes pièces de monnaies remontraient à l'époque du règne de la dynastie des Almoravides.

Faites d'un alliage métallique jaunâtre, probablement du cuivre ou du bronze, les pièces sont dans un excellent état de conservation. D'une circonférence de 2,1 cm et d'un poids moyen de 10,10 gr, les pièces sont frappées par l'invocation religieuse : ''Il n y'a de Dieu qu'Allah'' sur la face et de ''Mohammed est le messager d'Allah'' au verso. Même si ces inscriptions ne laissent aucun doute sur l'origine musulmane de l'ancienne monnaie, aucun autre indice n'indique, par contre, le pays où le règne qui a mis cette monnaie en circulation.

Tout en soulignant la valeur archéologique inestimable des pièces découvertes, un responsable en charge du service du patrimoine à la délégation de la culture de Tanger, a expliqué que seules des analyses approfondies par des spécialistes de la numismatique sont capable d'éclairer avec précision l'origine exacte de la monnaie.

Cependant le mystère demeure complet sur les circonstances de cette importante découverte archéologique. Selon les éléments de l'enquête, les autorités locales ont été informées, il y'a quelques semaines, sur la circulation de pièces de monnaies anciennes entre des jeunes du douar dit ''Labrana'' (caïdat Sidi Yamani). La gendarmerie est arrivée à identifier le pourvoyeur des jeunes du douar en pièces curieuses. N'ayant aucune idée sur la valeur de ces pièces, B. Miloud (22 ans) avoue sans détour qu'il détient un lot important de pièces semblables qu'il grade cachées dans un champs dont il assure la garde.

Il a expliqué qu'il a trouvé les pièces de monnaie sur le chantier de travaux de terrassement pour la construction de hangars destinés à l'élevage. Les travaux ont été entrepris récemment par le nouveau propriétaire du lopin de terre. Il n'a pas été possible pour les enquêteurs d'interroger le propriétaire des lieux qui se trouve actuellement en Espagne.

Le responsable de la délégation de la culture explique que le douar en question se situe à proximité d'une très ancienne route commerciale. La route baptisée ''route des sultans'' figure sur les premiers parchemins et ébauches de cartes de la région au 18-eme et 19-eme siècles. Sous le règne de plusieurs dynasties marocaines, la route était empruntée par les caravanes de commerce ainsi que par les délégations européennes qui débarquaient au port de Tanger ou Asilah pour se rendre ensuite à la ville impériale de Fès pour y rencontrer le sultan.

Le long de cette route se trouvent de nombreux vestiges de campements militaires et de Kasbah où stationnaient des soldats chargés de la sécuriser.

D'autre part, un conservateur de musée rappelle que toute trouvaille archéologique tombe sous les dispositions de la loi 22/80 relative à la protection du patrimoine, des sites et des objets d'antiquité. La loi stipule que tout objet d'antiquité découvert sous le sol est considéré comme propriété de l'Etat. Les pièces archéologiques découvertes sont mises à la disposition de la direction du patrimoine du ministère de la culture. Après études, les objets d'antiquité sont finalement remis au musée de la région où la découverte a été faite. Des archéologues déplorent le fait que l'emplacement original de la trouvaille ne soit pas encore identifié. ''Cela nous aurait permis d'effectuer des fouilles minutieuses sur ce site, et les chances de faire de nouvelles trouvailles sont fort probables'', regrettent-ils. Un détail intrigue encore plus ces spécialistes. L'état excellent de conservation des pièces suppose qu'il étaient entreposées dans des ustensiles ou tout autre objet qui devrait être aussi de grande valeur archéologique.

Dans l'attente des résultats de l'enquête, certaines sources ont exprimé les craintes que les pièces découvertes ne représentent qu'une partie d'un lot plus important d'objet de grande importance archéologique. L'ont suppose même que les 468 pièces récupérées seraient délaissés par les personnes qui ont fait la découverte. D'après des expériences similaires, les ''déterreurs de trésors'' sont souvent intéressés uniquement par les pièces en métaux précieux comme l'or ou l'argent.

Plusieurs histoires circulent dans les douars de la région sur les mystérieux chercheurs de trésors. Ils seraient des étrangers à la région qui opèrent souvent la nuit, ne laissant de traces de leur passage que des trous béants au sol. Réputés pour détenir des pouvoirs maléfiques grâce à la magie, les visiteurs nocturnes ne sont nullement importunés par la curiosité des riverains.

Le Dr. Ahmed Siraj est l'un des rares chercheurs universitaires à avoir consacré une étude au phénomène des chercheurs de trésors au Maroc. Dans une étude intitulée ''l'Archéologie clandestine au Maroc'', cet enseignant d'histoire à la faculté des sciences humaines de Mohammédia affirme que le phénomène est très ancien au Maroc en déclinant des documents attestant de son existence depuis le 11-eme siècle. Les chercheurs de trésors ne se limitaient pas au territoire du Maroc. Ils sillonnaient différents endroits dans la région de l'Afrique du Nord. Une région riche en histoire et où se sont succédées plusieurs civilisations prospères.

M. Siraj rapporte dans son étude que dans le 16-eme siècle à Fès, les chercheurs de trésors s'organisaient en corps de métier tels les ferronniers ou les menuisiers. Au delà des croyances et légendes entourant cette pratique, les chercheurs de trésors disposent de techniques efficaces pour dénicher des biens de valeur enfouies sous terre depuis des siècles. A une époque où le seul moyen de mettre à l'abri sa fortune consistait à creuser, en toute discrétion, un trou qui garde parfois le secret à jamais.

Driss Hidass
Source : MAP

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