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«Voisins Distants» : Que nous en disent-ils ?

TelQuel et le Journal Hebdomadaire ont tous deux eu la bonne idée de nous présenter les bonnes feuilles de «Voisins Distants», d’Ignacio Cembrero. Même ouvrage, même dossier, même intérêt ; deux approches totalement différentes…Comparons.

Le ton est donné dès les premières lignes. Si TelQuel nous expose les dessous de la crise de la petite (île) Leila après que «nous ayons subi une sévère déculottée», le Journal Hebdomadaire livre un «scoop» sur lequel le journaliste aurait fait l’impasse dans son bouquin, à savoir l’épisode de ses mésaventures avec le régime marocain. «Il mérite pourtant d'être conté tant il recèle d'enseignements sur la versatilité et les contradictions de la politique de communication du Palais» estime le journal. La suite est évidemment du même calibre.
La sélection des «bonnes feuilles» est on ne peut plus révélatrice quant à la partialité des deux rédactions.
TelQuel évite visiblement de prendre en grippe nos dirigeants, cette fois-ci. Entre «l’arrogance des Espagnols» et «l'incroyable amateurisme des Marocains», le choix peu sembler difficile. Les démonstrations de bouffonnerie des deux parties sont éloquentes.
Côté marocain, on note la naïveté époustouflante de certaines démarches «sérieuses»; l’incroyable indolence de Benaïssa (on ne réveille pas un Roi qui dort), et finalement la comédie habituelle du Ministère de l’Extérieur qui «communique» que l’évacuation espagnole s’est faîte grâce aux «contacts couronnés de succès que Sa Majesté le roi Mohammed VI, que Dieu le garde, a eu avec l'administration américaine»…

Côté espagnol, on connaissait peut être le dédain de nos voisins du Nord, mais la réalité est plus forte que tout ce qu’on imaginait. Tout simplement ridicule. Ridicule de déclarer le branle-bas de combat pour un «petit rocher stupide» (dixit Colin Powell), où se terrent six malheureux soldats marocains. Ridicule d’invoquer après cela «la légitime défense», quand on n’a jamais osé revendiquer sa souveraineté sur le petit rocher, pour la simple raison que «Tourah n’a rien d’espagnol». Plus ridicule encore, retirer quand même le drapeau marocain pour planter le drapeau espagnol! Le meilleur étant pour la fin, voici ce que déclare pompeusement le ministre de la Défense espagnol à la fin de ’’l’assaut’’ : «Messieurs, le président du gouvernement me demande de vous transmettre à tous sa fierté pour l'excellent travail réalisé. Je partage son sentiment. Le peuple espagnol peut se sentir rassuré par le travail accompli par ses forces armées, qui se sont montrées - et il ne pouvait en être autrement - à la hauteur des circonstances. Au nom du président du gouvernement, félicitations à tous». Qui dit mieux ?
Les Marocains n’ont pas été d’une grande sagesse, mais peut être qu’au fond, on s’y attendait un peu… TelQuel a finalement eu raison de décerner à Aznar le prix de l’insolence, de la vilenie et de la bouffonnerie.

Les choses sont ’’beaucoup plus sérieuses’’ du côté du Journal Hebdo. Leïla n’est qu’un épisode parmi d’autres, où le Maroc a pu goûter à l’humiliation. Mais évidemment, c’est toujours de la faute du régime si on ne le prend pas au sérieux…C’est de sa faute si on l’a chassé de son îlot, il n’avait pas à y mettre les pieds pour ne pas gêner ses voisins. Mais si eux font des manœuvres navales à moins de 600m d’El Hoceima, ce n’est pas bien grave… C’est de sa faute aussi si on l’a accusé d’être complice lors des attentats terroristes à Madrid. Si les services secrets marocains n’avaient pas encore privilégié la torture, les espagnols auraient peut être daigné jeter un coup d’œil aux informations qu’on leur livrait… Et puis c’est vraiment ingrat, après tout ce que l’Espagne fait pour ce pays, que les autorités expulsent toutes ces «délégations de députés régionaux qui prétendaient se rendre à Al Ayoun en signe de solidarité avec les manifestants de mai 2005». «L’Espagne est bien mal récompensée de ses efforts pour les Marocains». Enfin, « Leïla souligne bien l’incroyable incompétence de Benaïssa». Sans oublier la maladresse dont il avait fait preuve lors de la manifestation anti-terroriste après le 12 mars, on peut dire qu’il avait bien pris son temps avant de se décider à y assister. «Le mystère de son maintien en poste n’en est que plus épais…».

On aurait bien imaginé la Une du prochain numéro du Journal Hebdomadaire, «Qui couvre Benaïssa ?». Mais d’ici là, l’hebdomadaire aura peut être changé de mains, et de ligne éditoriale aussi…Il est vrai qu’il est plutôt lassant de se voir servir «de la torture» à toutes les sauces, mais vu que malgré les centaines de titres que compte la presse marocaine, la diversité n’est pas pour aujourd’hui, une presse refuznik ne serait peut être pas de refus. A défaut de trouver cela intelligent, cela nous donnerait au moins l’occasion de lire des choses que personne n’aurait l’idée d’écrire…

Salma Daki
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