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L'affaire des caricatures du Prophète Mohammed

La liberté d'expression oui, la liberté d'expression deux poids deux mesures non !

De Rabat à Beyrouth, de Mogadiscio à Djibouti, de Niamey à Ryad, de Kaboul à Bombay la communauté musulmane – forte de plus d'un milliard de fidèles – a exprimé son ire après la publication par un journal danois de photos caricaturant le Prophète de l'Islam. Des publications au nom de la liberté d'expression, a argué le journal. Mais au-delà de l'émotion et de la colère engendrées par ces caricatures dans le monde islamique, l'article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948 – qui consacre la liberté d'expression – qui a été évoqué n'en est pas moins suspect, du moins dans son usage au quotidien.

La liberté d'expression est un des socles de la société occidentale, aime à rappeler la presse occidentale au point que c'est devenu une rengaine. Oui approuvons-le, sans mauvaise foi : l'occident a dû faire d'énormes sacrifices pour en arriver là. Une brève convocation de l'histoire permet de s'en rendre compte. L'occident a connu la main basse de l'Eglise sur la circulation des idées, à travers la scolastique. Le bûcher, l'inquisition y était un rempart de sécurité pour dissuader les esprits libres (Galilée a été condamné à cause de ses idées).

Tout près de nous, en France, c'était la chasse aux protestants comme le témoigne la Saint- Barthélemy dans la nuit du 23 au 24 août 1572 où des milliers d'huguenots ont été massacrés avec la complicité de Catherine de Médicis. Des exemples il y en a plusieurs. On comprendrait donc pourquoi la presse occidentale s'acharne t-elle à conserver ce bijou acquis après des siècles de lutte contre le bâillon.

Mais le hic est qu'en évoquant la liberté de presse pour justifier l'offense faite aux musulmans à travers ces caricatures, le quatrième pouvoir occidental se fait prendre au mot. En effet, quel journal occidental prendrait le risque aujourd'hui d'épingler – même à raison – la politique musclée d'Israël contre les Palestiniens au risque d'être traité d'Anti-juif ? Ou, pour être « in » antisémite (même si le terme dans le contexte israélo palestinien est un non sens les arabes et les juifs étant tous des sémites) ?

Pour rester toujours en France on a connu l'affaire Faurisson dans les années 1970, la loi Gayssot en 1990, et tout récemment l'affaire Dieudonné Mballa-Mballa. Toutes relatives à cette liberté évoquée… La liberté d'expression serait elle sélective ? Surtout qu'il est devenu très facile de se faire traiter d'Anti-juif quand on ne veut pas rester dans le « politiquement correct ».

Aux USA dont le premier amendement de la constitution consacre la liberté d'expression, on a connu le maccarthysme, la chasse aux sorcières. Et tout récemment des francs-tireurs comme le réalisateur Michael Moore qui ont désapprouvé l'intervention militaire américaine en Irak ont été considérés comme des « non patriotes ». Sans parler du bombardement en novembre 2001 à Kaboul du siège de la chaîne qatarie Al Jazira par l'armée américaine pour la simple raison que sa ligne éditoriale contraste avec la vulgate officielle du Pentagone.

Que la presse occidentale cesse d'infantiliser le monde : la liberté de presse qu'elle réclame tant y est bien sélective, en conformité avec les désirs des lobbies, des idéologies…Un journalisme de
révérence comme le dirait Serge Halimi, acquis aux causes des multinationales au dépens de l'information factuelle et neutre. Une liberté de presse partiale et partielle, de deux poids deux mesures. A quand donc des Martin Luther King, des José Bové de la presse pour lutter contre ces injustices ?

Bassirou Bâ
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