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Affaire Ben Barka : Quarante ans d’opacité…révolue ?

Cela fait quarante ans que l’affaire Ben Barka est dans l’ombre, quarante ans que la famille du disparu espère que l’énigme soit résolue. L’affaire suscite toujours autant d’intérêt ; les questions sans réponses demeurent nombreuses et la réalité prend l’allure d’un polar…

Ainsi que l’affirme le journal français Libération, jamais affaire politico-judiciaire n'aura inspiré autant d'articles, de livres, de films, de vrais et de faux scoops. Le Nouvel Observateur rapporte que « la justice marocaine a peur de la vérité ». C’est ce qu’a affirmé Me Maurice Buttin, avocat de la famille Ben Barka, dans un entretien accordé au journal. « Les hypothèses sont nombreuses sur les circonstances de l'enlèvement...Ce que l'on peut affirmer, c'est que Ben Barka aurait été enlevé sur ordre de Hassan II».

C’est toute une intrigue où les acteurs sont étonnamment nombreux. La France a le mauvais rôle, celui d’avoir fermé les yeux d’abord et entravé le déroulement de l’enquête ensuite. Ce n’est que récemment que le gouvernement français a levé le « secret défense ». Me Buttin affirme ne rien y avoir appris de décisif. Le Maroc ne se montre pas bavard non plus. Le Roi défunt Hassan II avait en effet affirmé que c’était une affaire « franco-française ». Du coup, personne n’en dit mot. « Le problème du Maroc, c'est que du temps de Hassan II, il y avait des ordres, aujourd'hui il n'y en a plus, mais les réflexes d'autocensure persistent. La justice marocaine a du mal à se montrer libre» appuie Me Buttin.

Mais le Maroc et la France sont-ils les seuls concernés par cette affaire ? Assurément non, nous aurait répondu Jeune Afrique l’Intelligent. « L’affaire Ben Barka est un crime d’Etats ». Washington était loin de battre des mains en voyant ce révolutionnaire s’apprêter à organiser la conférence Tricontinentale à Cuba. Regrouper les mouvements de libération et d’opposition d’Afrique, d’Asie et d’Amérique Latine ne servirait certainement pas ses intérêts. « Et le Mossad dans tout ça ? » s’interroge le journal. Israël n’a pas le premier rôle dans cette affaire, mais elle est loin de faire de la figuration. En tout cas, les fils sont trop enchevêtrés pour pouvoir en tirer quoique ce soit de probant.

Cela n’a pas empêché Serge Le Péron d’en sortir un film, uniquement basé sur le récit de Georges Figon, petit escroc qui a piégé Ben Barka. «J’ai vu tuer Ben Barka», personne ne peut affirmer cela…Cependant, Aujourd’hui le Maroc chuchote que cette fiction serait co-réalisée avec le marocain Saïd Smihi. L’affiche du film fait l’impasse sur ce ‘’détail’’. Et toujours d’après ce quotidien, «J’ai vu tuer Ben Barka» aurait bénéficié de l’aide du Centre Cinématographique Marocain (CCM) et serait programmé au prochain Festival National du Film, prévu en Décembre à Tanger.

Mis à part ce petit clin d’œil au film, la presse marocaine ne s’est pas vraiment étendue sur le sujet. Elle a fait dans le «politiquement correct», se contentant de faire le compte-rendu des diverses conférences sur l’affaire, ou livrant l’autobiographie du leader disparu.

Cependant deux journaux sortent du lot. Il s’agit bien sûr des deux «voyous» de la presse marocaine : Assahifa et le Journal Hebdomadaire. Le premier se demande si le Roi Mohammed VI livrera les généraux de son défunt père, mouillés dans cette affaire. Le second fait dans le réchauffé dans son éditorial: Hassan Zoubairi est mort sous la torture pour avoir volé de la vaisselle royale. Donc, « l’ADN du régime est essentiellement le même. L'évolution, au sens darwinien, de la monarchie n'est pas assez avancée pour lui faire changer de catégorie d'espèce ». Et toc !

Quoi qu’il en soit, l’affaire ne sera pas classée de sitôt. La famille Ben Barka affirme qu’elle ne se contentera pas d’une vérité officielle, d’une vérité tronquée. Cela fait désormais partie des blessures du passé. L’IER devrait peut être se pencher un peu plus sur le dossier…Après tout, elle a été créée pour ça.

Salma Daki
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