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Le Venezuela dans la ligne de mire de Washington
M
28 février 2006 11:56
Le Venezuela dans la ligne de mire de Washington
par Salim Lamrani

28 février 2006

L’hostilité des Etats-Unis envers le gouvernement du président Chávez prend une tournure de plus en plus inquiétante. Dans un document récent, le Pentagone a qualifié la « résurgence des mouvements autoritaires et populistes dans certains pays, comme le Venezuela [de] source d’instabilité politique et économique ». Cette déclaration est d’autant plus préoccupante que le Département de la Défense ne cite quasiment jamais de pays dans son étude stratégique (Quarterly Defense Review), publiée tous les quatre ans et qui se limite à des tendances générales [1].

Quelques jours auparavant, le ministre de la Défense étasunien, M. Donald Rumsfeld, avait comparé M. Hugo Chávez à Hitler devant le National Press Club de Washington. « Au Venezuela, on a Chávez qui a beaucoup d’argent du pétrole. Il a été élu légalement tout comme Adolf Hitler. Puis il a consolidé son pouvoir et maintenant, il travaille avec Fidel Castro, M. Morales et d’autres », a-t-il souligné [2]. « Nous avons vu certains leaders populistes attirer les masses populaires dans ces pays. Et des élections ont lieu comme celle d’Evo Morales en Bolivie, qui sont clairement préoccupantes », a-t-il conlu [3].

La réponse vénézuelienne ne s’est pas faite attendre. Le vice-président de la République, M. José Vicente Rangel, a fermement condamné les propos agressifs de M. Rumsfeld : « Nous ne sommes pas disposés à accepter passivement que le gouvernement national [...] soit agressé impunément par des personnes totalement disqualifiées du point de vue politique, moral et éthique, comme la bande qui accompagne le ‘Hitler nord-américain’ George Bush [4] ».

De son côté, le directeur des services de renseignements, M. John Negroponte, a accusé le Venezuela de « lancer une politique étrangère militante en Amérique latine qui inclut la livraison de pétrole brut à prix bas pour gagner des alliés ». Dans le même temps, il a stigmatisé la chaîne internationale de télévision Telesur, dont le but est de rompre l’hégémonie de CNN sur le continent. Il a affirmé, devant une commission du Sénat, que « le Venezuela est le principal défi à la sécurité hémisphérique », et que la priorité de Washington est d’empêcher à tout prix la réélection de M. Chávez en décembre 2006. Enfin, il a menacé la Bolivie qui « continue à envoyer des signaux ambivalents sur ses intentions [5] ».

« La politique étrangère militante » évoquée par M. Negroponte fait référence à la coopération solidaire mise en place par le Venezuela, qui permet à de nombreuses nations pauvres de la région d’acquérir du combustible à des tarifs préférentiels. M. Keith Mitchell, Premier ministre de la Grenade, a signé un accord de coopération énergétique avec le président Chávez qui prévoit la livraison de 1 000 barils de pétrole par jour à 50% du prix du marché. Le Venezuela a également envoyé un groupe de militaires et d’ingénieurs civils à La Grenade pour réparer les écoles endommagées par les divers ouragans. Le modèle d’intégration préconisé par l’Alternative bolivarienne pour les Amériques (ALBA), complètement opposé à l’ultralibéralisme ravageur de la Zone de libre-échange pour les Amériques (ZLEA), a fortement irrité la Maison-Blanche [6].

Face aux menaces explicites lancées par l’administration Bush, le Venezuela a décidé de renforcer sa défense en acquérrant des avions de chasse à l’Espagne. Cependant, Washington a interdit au gouvernement de M. José Luis Rodríguez Zapatero de fournir des avions militaires dotés de technologie étasunienne à la République bolivarienne, car la vente, d’un montant total de 2 milliards de dollars, pourrait « contribuer à la déstabilisation de l’Amérique latine », selon M. Sean McCormack, porte parole du Département d’Etat [7]. Egalement sollicité à ce sujet, le Brésil a rejeté la demande étasunienne, affirmant qu’il procèderait à la vente de 20 avions au Venezuela [8].

Selon Washington, la vente d’armes au Venezuela risquerait de déstabiliser la région. M. McCormack explique que les « inquiétudes se centrent sur ce que nous considérons être une militarisation exagérée au Venezuela [9] ». Or, l’entreprise étasunienne Lockheed Martin vient de livrer plusieurs avions de chasse F16 au Chili, et prévoit d’en fournir huit autres dans le courant de l’année 2006. Le Chili dispose désormais de la flotte aérienne la plus moderne d’Amérique latine, sans que cela pose un quelconque problème à l’administration Bush, uniquement obsédée par les réformes progressistes entreprises par Caracas [10].

En plus de l’importante acquisition d’armements indispensables à la défense de la nation (100 000 fusils et 15 hélicoptères achetés à la Russie), le président Chávez a décidé de créer une armée d’un million de volontaires pour faire face à une éventuelle invasion militaire du pays par les troupes étasuniennes. Le gouvernement bolivarien a choisi de suivre l’exemple cubain en matière de préparation à la défense. « Pourquoi les Américains ont envahi la moitié du monde et n’ont jamais envahi Cuba ? A Cuba, c’est tout le peuple qui est entraîné à défendre minutieusement le territoire et la Révolution cubaine », a noté M. Chávez [11].

Les Etats-Unis ont également entrepris un travail d’espionnage et de subversion interne par le biais de leur ambassade à Caracas, afin de déstabiliser le pays de plus en plus conquis par les avancées sociales mises en place par le gouvernement. « Certains officiers de bas rang fournissaient des informations au Pentagone », a informé le vice-président vénézuelien. Un attaché militaire étasunien, M. John Correa, qui avait pris contact avec lesdits officiers, dans le but de conspirer contre les autorités, a été expulsé du pays [12]. Quant aux militaires vénézueliens, ils ont été mis en examen pour collaboration avec une puissance étrangère [13].

En guise de représailles, Washington a déclaré Mme Jenny Figueredo Frías, chef du cabinet de l’ambassadeur vénézuelien Bernardo Alvarez à Washington, persona non grata, tout en admettant qu’il s’agissait d’une mesure arbitraire. « Cette décision est une réponse à la décision [...] du gouvernement vénézuelien d’expulser le commandant John Correa, l’attaché naval de l’ambassade des Etats-Unis à Caracas », a affirmé le porte-parole du Département d’Etat [14].

M. Anthony Blair, fidèle et inconditionnel serviteur de l’administration Bush, a fait montre de toute sa subordination envers Washington, lors d’une session hebdomadaire du Parlement britannique. Le député travailliste Colin Burgon interpella le Premier ministre : « Je suis sûr que vous partagez la satisfaction de nombreux députés travaillistes face au virage à gauche enregistré en Amérique latine [avec l’arrivée au pouvoir de] gouvernements qui luttent pour les intérêts de la majorité, et non pas pour ceux d’une minorité ». Puis, l’interrogeant, il continua : « Mais vous seriez d’accord qu’il serait très mauvais pour tous si nous permettions que nos politiques envers ces pays, particulièrement des nations comme le Venezuela, soient définies par l’agenda réactionnaire républicain du gouvernement étasunien [15] ».

De manière surprenante, M. Anthony Blair répondit : « Jusqu’à un certain point », tentant de justifier son propos en affirmant qu’il était « important que le gouvernement du Venezuela comprenne que s’il veut être respecté par la communauté internationale, il doit respecter les règles de la communauté internationale ». Evidemment, par « communauté internationale », il faut entendre ici « les Etats-Unis », dont les « règles » sont à appliquer sans discussion. Pour le Premier ministre britannique, la souveraineté de l’Angleterre s’arrête là où commencent les intérêts étasuniens [16].

Les inquiétudes de Washington se centrent actuellement sur M. Hugo Chávez, car il symbolise le renouveau politique en Amérique latine, en destinant les ressources nationales aux couches populaires les plus défavorisées. Le gouvernement vénézuelien vient d’approuver une impressionnante hausse des salaires des fonctionnaires qui va de +34% à +61,8% selon les secteurs, ce qui équivaut à une augmentation moyenne de 47%. Il a également revu à la hausse de 15% le salaire minimum des employés du secteur privé. Depuis 2000, le salaire minimum au Venezuela a été augmenté chaque année de 20% à 30%. Les revenus tirés de la croissance économique, qui s’est élevée à 9,4% en 2005, ont ainsi largement profité à l’ensemble de la population [17].

En guise de comparaison, en France, cinquième puissance mondiale, dont le modèle social est tant vanté, le salaire des fonctionnaires a seulement été valorisé à hauteur de 1% en 2005. Quant aux salaires dans le secteur privé, ils ont enregistré une hausse de à 0,6% en termes réels (hausse de 2,8% moins 2,2% d’inflation). Le « socialisme du XXI° siècle », prôné par le président Chávez, n’est pas prêt d’être appliqué en France, où le gouvernement mène une politique antisociale impitoyable depuis 2002 [18].

De même, un milliard de bolivars a été alloué à la mission « Barrio Adentro III », système de couverture médicale universelle et gratuite créé par le gouvernement. Cette somme permettra d’acquérir 30 932 équipements de santé (ambulances, appareils à bronchoscopie, etc....). Les fonds en provenance des excédents pétroliers sont ainsi directement investis dans le secteur social [19].

Le système unique de santé mis en place au Venezuela grâce, entre autres, à l’aide de 15 000 médecins cubains, a permis la réalisation de 163 millions de consultations, c’est-à-dire 8 consultations par habitant. La mission « Barrio Adentro I » a sauvé la vie à 31 186 personnes, grâce à la création de 1 012 centres de soins dans les zones les plus pauvres, auxquels s’ajouteront 20 359 autres centres du même type. La mission « Barrio Adentro II » a créé 100 centres de diagnostic intégral (CDI) capables de fournir une attention médicale complète, et 500 autres sont en construction à travers le pays. Enfin, avec à la « Mission Miracle » mise en place par Cuba, plus de 176 000 Vénézueliens ayant perdu la vue, suite à un problème de cataracte, ont été opérés gratuitement par les professionnels de l’Île [20].

Quant au chômage, il n’a cessé de baisser passant de 13,2% en juin 2005 à 11,4% en décembre 2005. La politique effective du gouvernement a permis à 367 119 personnes de trouver un emploi [21].

L’Unesco a tenu à souligner les spectaculaires réussites sociales de la Révolution bolivarienne en octroyant à M. Hugo Chávez le Prix international José Martí. Cette distinction récompense les efforts du président en faveur de l’unité et de l’intégration des pays d’Amérique latine et des Caraïbes, ainsi que la préservation de leurs identités, traditions et cultures [22]. En effet, le Venezuela fournit du pétrole à des tarifs préférentiels à ses voisins du continent, mais également à certaines zones nord-américaines tels que le Vermont, Maine ou Rhode Island. Les habitants de ces régions, délaissés par l’administration Bush, pourront ainsi acheter du combustible à des tarifs subventionnés à hauteur de 40% par la filiale pétrolière vénézuelienne Citgo. « Cela signifiera des économies de plusieurs millions de dollars », a remarqué Mme Erin Campbell, porte-parole du Vermont [23].

De son côté, le 6 février 2006, le gouvernement Bush a rendu public son projet de budget pour l’année 2007, qui inclut une forte hausse des enveloppes allouées à la défense, à la sécurité intérieure et aux affaires étrangères. Le budget de la défense bat tous les records avec un montant de 439,3 milliards de dollars, soit une augmentation de 6,9% par rapport à l’année précédente. Dans le même temps, les budgets de la santé, de la justice et de l’éducation, entre autres, subissent une baisse drastique. Par exemple, 141 programmes sociaux vont être réduits ou stoppés. Une réduction de 65 milliards de dollars est prévue sur le programme Medicare qui concerne l’attention médicale aux personnes âgées et handicapées. De même, les couvertures retraites sont fortement affectées. Entre Caracas et Washington, deux modèles de société, diamétralement antinomiques, s’affrontent. D’un côté, le bien-être du citoyen est placé au centre du projet national, tandis que de l’autre, la satisfaction du complexe industriel-militaire reste la priorité absolue [24].

Ainsi, pendant que le gouvernement Bush est prêt à tout pour empêcher un nouveau triomphe électoral inéluctable de M. Hugo Chávez le 3 décembre 2006, le Venezuela continue d’entreprendre des réformes destinées à améliorer le niveau de vie de sa population. Son prestige sur le reste du continent est proportionnel au déclin de l’influence étasunienne. La raison est simple : alors que le Venezuela a alloué 28 milliards de dollars d’aide extérieure à ses voisins en sept ans - une moyenne annuelle de 3,6 milliard de dollars -, les Etats-Unis ont prévu une diminution massive de leur apport pour l’année 2007, avec une baisse de 28,5% de l’aide au développent pour l’Amérique latine et les Caraïbes, une baisse de 10% pour l’aide médicale, et une réduction de 11% de son financement de l’Organisation des Etats Américains (OEA). Là encore, deux messages s’opposent : Caracas octroie 3,6 milliards de dollars d’aide annuelle à l’Amérique latine, et Washington prévoit de diminuer leur soutien économique de 1, 2 milliards de dollars [25].

Le gouvernement bolivarien défie avec succès la doctrine néolibérale, insoutenable d’un point de vue politique, économique et social, ce qui explique le courroux de la Maison-Blanche. Malgré les diverses agressions et menaces émanant du Nord, le président Chávez a fait montre de son ouverture envers Washington : « S’ils font preuve de bonne volonté, nous répondrons de la même manière. Tout peut s’améliorer [...] à condition qu’ils respectent notre souveraineté, qu’ils respectent nos décisions ». Mais, il est peu probable que la raison et le dialogue priment au sein de la belliqueuse administration Bush [26].

Notes:

[1] Pablo Bachelet, « El Pentágono califica a Chávez de desafío a la seguridad de EE.UU. », El Nuevo Herald, 11 février 2006.

[2] Agence France Presse, « Donald Rumsfeld compare le président vénézuelien Chávez à Hitler », 2 février 2006.

[3] El Nuevo Herald, « Rumsfeld compara a Chávez con Hitler », 3 de febrero de 2006.

[4] El Nuevo Herald, « Vicepresidente venezolano dice que Bush es el ‘Hitler de EEUU », 3 février 2006.

[5] Marie Delcas, « Le président Hugo Chávez expulse un attaché militaire américain à Caracas », Le Monde, 4 février 2006 ; El Nuevo Herald, « Negroponte acusa a Chávez de injerencia en otros países », 2 février 2006.

[6] El Nuevo Herald, « Venezuela enviará 1.000 barriles diarios de petróleo a Grenada », 17 février 2006.

[7] Phil Gunson & Pablo Bachelet, « Spain’s Planes for Chávez Can’t Use U.S. Components », The Miami Herald, 14 janvier 2006.

[8] El Nuevo Herald, « Embraer vendería aviones a Venezuela pese a la oposición de EE.UU. », 20 janvier 2006.

[9] Nestor Ikeda, « EEUU : Venezuela quiere milicia de un millón de civiles », El Nuevo Herald, 20 janvier 2006.

[10] El Nuevo Herald, « La nueva flota chilena recibe potentes aviones de caza F16 », 1 février 2006.

[11] El Nuevo Herald, « Chávez dice que seguirá ejemplo cubano con EEUU », 17 janvier 2006.

[12] Associated Press, « Officers Accused of U.S. Contact », 26 janvier 2006.

[13] BBC Mundo, « Chávez : ‘los tenemos infiltrados’ », 31 janvier 2006.

[14] El Nuevo Herald, « Se agrava la crisis entre Caracas y Washington », 4 février 2006.

[15] El Nuevo Herald, « Chávez acusa a Blair de ‘inmoral’ », 9 février 2006.

[16] Ibid.

[17] El Nuevo Herald, « Incrementan salarios de empleados públicos en Venezuela », 13 février 2006.

[18] INSEE Conjoncture, « Salaires de base dans le secteur privé et dans la fonction publique d’Etat, troisième trimestre 2005 », 10 janvier 2006, n°14.

[19] Agencia Bolivariana de Noticias, « Presidente aprueba casi Bs. 1 millardo para Barrio Adentro III », 5 février 2006.

[20] Agencia Bolivariana de Noticias, « Chávez : Barrio Adentro consolida Sistema Único Nacional de Salud », 5 février 2006.

[21] El Nuevo Herald, « Baja desempleo en Venezuela », 10 février 2006.

[22] Granma, « Recibe Hugo Chávez en La Habana Premio Internacional otorgado por la UNESCO », 3 février 2006. www.granma.cu/espanol/2006/febrero/vier3/recibe-e.html (site consulté le 4 février 2006).

[23] El Nuevo Herald, « Vermont se apresta a comprar petróleo barato a Venezuela », 19 janvier 2006.

[24] Le Monde, « Budget 2007 : George Bush veut réduire les dépenses sociales au profit de la défense », 6 février 2006.

[25] Andres Oppenheimer, « Chávez Making Friends While Bush Earning Enmity », The Miami Herald, 9 février 2006.

[26] El Nuevo Herald, « Chávez pide respeto para cambiar relación con EEUU », 10 février 2006.


[risal.collectifs.net]
w
28 février 2006 12:16
EN BREF CHAVEZ S OCCUPE A SOIGNER SON PEUPLE ET AIDE SES VOISINS
BUSH FAIT LA GUERRE ET TUE TOUT CEUX QUI N AIME PAS SA VISION DU MONDE
w
28 février 2006 12:18
EN TOUT CAS VIVA CHAVEZ

C EST UN EXEMPLE A SUIVRE
M
28 février 2006 12:22
Repères historiques

Le rappel, chaque jour, d’un fait historique important qui ne figure pas dans les manuels d’histoire.

24 mars 1980

Negroponte fait abattre un archévèque

Obsédé par la perspective d’un « troisième Cuba » à ses portes et craignant une « contagion nicaraguayenne » au Salvador, l’administration Reagan finance la junte militaire qui gouverne le pays. Celle-ci traque le « subversif » à l’aide d’escadrons de la mort, supervisés, équipés et entraînés par la CIA et l’ambassadeur US au Honduras, John Negroponte. Révolté par les atteintes aux droits de l’homme et crimes commis par la junte, l’archévèque de San Salvador, Oscar Romero, prend la tête de la contestation réclamant la fin de l’aide militaire US. Soutenue par l’église catholique aux États-Unis, la voix du « curé rouge » prend du poids et dérange. Le 24 mars, en pleine messe, un commando militaire fait irruption dans l’église et abat Romero. Les assassins ne se cachent même pas ; l’un deux est diplômé de l’École des Amériques en Floride, centre d’entraînement des tortionnaires sud-américains. Deux autres appartiennent au Bataillon 3-16, une unité paramilitaire volante centraméricaine sous les ordres de Negroponte et agissant depuis la base militaire US de El Aguacate, où l’on retrouvera plus tard des charniers contenant plus de 150 corps suppliciés.

[www.voltairenet.org]

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John Negroponte

Le choix de l’homme est parlant. John Negroponte, nommé jeudi par le président Bush au nouveau poste de directeur du renseignement national , n’a jamais été très regardant sur les droits de l’homme et la démocratie. Celui qui était encore la semaine dernière le premier ambassadeur des États-Unis en Irak occupé, a commencé sa carrière sous l’administration Reagan en luttant contre les opposants aux dictatures sud-américaines. Distribution d’armes et de fonds, formation de paramilitaire, rien n’échappe alors à celui qu’on appelle déjà le « Proconsul ». De 1981 à 1985, il supervise la répression au Honduras où la CIA forme des bataillons qui s’illustrent par leur violence. Negroponte exporte ensuite son « savoir-faire » au Nicaragua, où il organise les escadrons de la mort et forme les contras pour mener la bataille contre les sandinistes. On le retrouve ensuite entre 1989 et 1994 aux côtés de l’armée mexicaine, contre les zapatistes. Mais c’est en septembre 2001 que l’homme sort de l’ombre, avec sa nomination comme représentant de son pays à l’ONU. À ce titre, il est le fer de lance de la croisade de l’administration Bush pour le déclenchement de la guerre en Irak. Désormais chargé de superviser les services secrets de son pays, Negroponte n’a pas le profil de celui qui va s’opposer aux dérives de la guerre contre le terrorisme. Avec lui, Abou Ghraib et Guantanamo pourraient bien n’être que les premiers épisodes d’une longue série.

Camille Bauer

[www.humanite.fr]
M
28 février 2006 12:29
Oui...et ce monsieur Negroponte qui fait des leçons de démocratie à Chavez...on aura vraiment tout vu...
M
6 mars 2006 10:04
Entretien
William Izarra : « Le Venezuela pourrait devenir un objectif militaire prioritaire des Etats-Unis »


Au milieu d’affrontements verbaux entre Washington et Caracas, William Izarra, sorte d’idéologue du processus vénézuélien, a confié au quotidien argentin Pagina/12 que son pays est au cœur d’une stratégie de déstabilisation de la part de l’administration Bush.

par Dario Pignotti
6 mars 2006

La semaine passée [semaine du 13 au 19 février], à Washington, Condoleezza Rice a défini le Venezuela et l’Iran comme des menaces à l’encontre, respectivement, de la stabilité régionale et de la stabilité mondiale. A Caracas, cette même semaine, le leader du Parlement iranien défendait le plan nucléaire de son pays tout en discutant avec les autorités vénézuéliennes de la possible visite du président Mahmud Ahmadinejah, que la secrétaire d’Etat considère comme le bailleur de fonds du terrorisme. Le lieutenant-colonel William Izarra, un des architectes de la diplomatie active avec Téhéran, a affirmé, dans un entretien avec Pagina/12 que « la relation avec l’Iran constitue un objectif important pour la politique extérieure de la révolution bolivarienne et je sais que les pressions nord-américaines n’y feront pas renoncer le président Chávez. Il y a, avec les pays asiatiques, un long agenda qui envisage la coopération nucléaire avec l’Iran dans des buts pacifiques. » Considéré comme l’un des idéologues du processus vénézuélien, Izarra soutient que l’escalade verbale avec Washington va gagner en puissance.

Pourquoi Chavez n’évite-t-il pas la guerre rhétorique avec les Etats-Unis ?

Parce que ce n’est pas de la rhétorique. Vous vous trompez si vous pensez que nous nous trouvons face à une guerre de papier. Actuellement, le Venezuela représente un objectif politique dans la stratégie de déstabilisation des Etats-Unis qui convoitent nos réserves de pétrole et ont besoin d’en finir une bonne fois avec la révolution bolivarienne, pour empêcher que son exemple ne se propage dans la région. Mais si cette tactique qui veut briser notre projet politique échoue, le Venezuela se transformera en objectif militaire prioritaire, dans le cadre du plan Colombie [1].

Les objectifs de ce plan sont le combat contre le trafic de drogue et la guérilla en Colombie.

Le plan Colombie ne se réduit pas aux frontières de ce pays, c’est un plan militaire sous-régional qui, dans une phase future, pourrait inclure des actions violentes contre le territoire vénézuélien et l’occupation de zones vitales. Selon moi, une anticipation de cette probable « intervention directe » des Etats-Unis a été déjouée quand une centaine de paramilitaires colombiens ont été arrêtés dans une propriété vénézuélienne [2] où ils se préparaient à des actions de sabotage équivalentes aux « actions d’intervention indirecte des Etats-Unis. Il est hautement probable que, derrière cette incursion paramilitaire, il y avait la CIA.

« L’exportation » du plan Colombie pourrait impliquer l’armée colombienne ?

A moyen ou à long terme, il est possible qu’il y ait une confrontation militaire entre la Colombie et le Venezuela. Parmi les scénarios analysés sur les plans destinés à en finir avec la révolution bolivarienne, on ne peut écarter la guerre régionale comme forme indirecte de pénétration de l’Empire. Je dirais que ce plan est celui de quelques généraux colombiens ; il y en a qui, du fait de leur formation idéologique, ne supportent pas Chavez ni son influence sur la gauche colombienne. Mais, à court terme, la réalité est qu’à la frontière, il y a des paramilitaires qui attendent l’ordre de la CIA de passer à l’action et nous savons qu’il y a déjà des paramilitaires à l’intérieur du Venezuela.

Ceci est la preuve de la vulnérabilité vénézuélienne ?

Oui, dans une certaine mesure. Notre principale force n’est pas militaire mais politique, elle réside dans l’extraordinaire appui du peuple à la révolution bolivarienne.

Cet argument est-il suffisant devant un ennemi comme les Etats-Unis ?

La force militaire des Etats-Unis est puissante pour envahir des territoires et anéantir des gouvernements mais pas pour faire plier la volonté d’un peuple. Je ne parle pas en théorie, vous avez pour exemples la résistance irakienne actuelle ou la victoire du Vietnam sous le leadership de Hô Chi Minh sur les Français ou les Nord-américains (des années 50 aux années 70). Hô Chi Minh et d’autres théoriciens de la guerre populaire comme Mao Tse Tung nous montrent comment organiser une stratégie de résistance face à une menace asymétrique qui pourrait être en voie d’élaboration à Washington. C’est en pensant à ce scénario qu’en mai 2004, le président Chavez a lancé le Plan de défense intégrale de la nation, plan sur lequel nous travaillons actuellement pour que la société prenne conscience que ce n’est pas seulement aux militaires qu’incombe la défense du territoire, de l’indépendance et de la démocratie de notre nation.

Les Vénézuéliens semblent appuyer davantage Chavez que la révolution.

Il y a beaucoup de Vénézuéliens qui appuient la révolution parce qu’ils la en ont l’intuition et non parce qu’ils sont conscients : il n’y a pas de consistance idéologique. Nous devons créer un réseau idéologique qui diffuse et approfondisse les idées de la révolution pour que, finalement, nous rompions avec l’héritage de la IVe République (1958-1998) et avec l’idéologie de la démocratie représentative, et que puissent devenir réalité les changements radicaux de la Ve République, la démocratie directe, le pouvoir populaire qui en finisse avec l’Etat clientéliste actuel et en arrive à définir le cap du pays grâce à des assemblées ouvertes, des gouvernements communautaires et un contrôle par la société de l’Etat.

Y a-t-il de la corruption dans le gouvernement actuel ?

Je ne dirais pas dans le gouvernement, je dirais plutôt dans des secteurs de l’Etat qui portent encore les vices de l’ancien régime. Il y a aussi des organismes de sécurité qui ne respectent pas la loi, il y a des dénonciations formelles de tortures exercées par les services de renseignement vénézuéliens contre des dissidents politiques. Ces dénonciations datent de l’année passée. Il est clair que le président n’a pas autorisé cela et ne savait rien de ce qui se produisait sans son autorisation.

Quelle rentabilité stratégique peut apporter le gazoduc sud-américain [3], dont le coût est estimé à 20 milliards de dollars ?

Dans les 20 prochaines années, le pétrole continuera à être une source d’énergie irremplaçable, aussi les études de faisabilité du gazoduc ne doivent pas seulement prendre en compte l’aspect économique. Sa signification géopolitique doit être analysée. Selon moi, en plus de renforcer notre intégration énergétique, ce serait une manière d’empêcher que l’Amazonie ne se transforme en protectorat international aux ordres de l’Empire sous des prétextes écologiques et de sécurité.

Est-il vrai que les militaires « bolivariens » ont amorcé des contacts informels avec leurs collègues de la région ?

Je ne peux répondre de façon catégorique, je n’ai pas d’information à ce sujet. De toute manière, je suppose qu’il est naturel qu’il y ait un rapprochement avec les camarades d’armes des pays frères. Je crois que nous devons travailler pour parvenir à une intégration en matière de défense sans l’ingérence des Etats-Unis. On doit mettre la main à la pâte pour qu’il y ait une sorte de Traité interaméricain d’assistance réciproque [4], mais avec une orientation différente, où la prémisse de la guerre froide soit supplantée par celle de la souveraineté régionale face à l’Empire ; un traité partant d’une alliance entre les six gouvernements progressistes actuels : Cuba, le Venezuela, le Brésil, la Bolivie, l’Argentine et l’Uruguay, pour former un axe capable de contrebalancer l’axe du Pacifique, auquel appartiennent la Colombie, l’Equateur, le Pérou et le Chili et qui sont proches des Etats-Unis et du projet de Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA) [5].

Propos recueillis par Dario Pignotti

Notes:

[1] [NDLR] Consultez le dossier « plan Colombie / Initiative andine » en Colombie sur RISAL.

[2] [NDLR] En février 2004.

[3] [NDLR] Le gazoduc sud-américain est un projet qui consiste à transporter du gaz des gisements du sud de la mer des Caraïbes et de l’océan Atlantique, face aux côtes du Venezuela, vers le Brésil et l’Argentine. Il devrait avoir une longueur entre 7.000 et 9.300 kilomètres.

[4] [NDLR] Dès 1947, en pleine guerre froide, toutes les armées du continent sont placées sous la tutelle de Washington à travers le Traité interaméricain d’assistance réciproque (TIAR). Celui-ci prévoit en effet qu’une attaque contre un Etat membre doit être considérée comme une attaque contre tous ses membres, selon un principe similaire à celui de l’article 5 du traité de l’OTAN.

[5] [NDLR] Área de Libre Comercio de las Américas - ALCA ; Free Trade Area of the Americas - FTAA ; Zone de libre-échange des Amériques - ZLEA.
Consultez le dossier « L’ALCA en panne » sur RISAL.

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