Endormir l'opinion mondiale et continuer la colonisation malgré les engagements pris.
Avec la construction de 3 500 logements supplémentaires en Cisjordanie Le gouvernement Sharon renforce l'emprise israélienne sur le «grand Jérusalem»
Jérusalem : de notre correspondant Patrick Saint-Paul [Le Figaro 22 mars 2005] [www.lefigaro.fr]
Le gouvernement d'Ariel Sharon a donné son feu vert à la construction de 3 500 logements supplémentaires en Cisjordanie.
Le plan prévoit de relier la colonie de Maalé Adoumim, situé à une dizaine de kilomètres de Jérusalem, à la partie orientale de la ville sainte, consolidant ainsi l'emprise israélienne sur le «Grand Jérusalem».
Ce projet confirme les craintes des Palestiniens, pour qui le désengagement de la bande de Gaza et de quatre implantations isolées de Cisjordanie serait essentiellement destiné à détourner l'attention pendant que l'Etat Hébreu renforce sa mainmise sur la ville sainte, occupée depuis 1967.
Ce projet, révélé par le quotidien israélien, Yedioth Ahronoth, a été mis au point depuis plusieurs années et récemment réactivé. Il existe un consensus en Israël pour que la cité dortoir de Maalé Adoumim, la plus importante colonie de Cisjordanie avec ses 28 000 habitants, fasse partie de tout plan de paix avec les Palestiniens. «Grâce à la colonisation, nous garderons pour l'éternité des positions importantes, essentielles à notre existence, à Jérusalem notre capitale unifiée pour toujours et dans les blocs d'implantations», a déclaré récemment le premier ministre israélien.
Ce projet contredit les termes de la «feuille de route», le dernier plan de paix international, soutenu par l'administration Bush. Celle-ci prévoit l'arrêt de la colonisation sur les terres occupées par Israël depuis 1967 et où les Palestiniens comptent établir leur futur Etat.
Séparant la partie sud de la partie nord de la Cisjordanie, le rattachement de Maalé Adoumim à Jérusalem Est rendrait impossible la continuité territoriale du futur Etat palestinien. Ariel Sharon aurait également ordonné la construction d'une route de contournement du secteur, qui permettra de relier les villes sous juridiction palestinienne vers le nord et le sud de Jérusalem, Ramallah et Bethléem. «Le premier ministre pense à l'avenir, en vue d'accorder aux Palestiniens une contiguïté territoriale», assure une source gouvernementale.
George W. Bush a appelé à plusieurs reprises au gel de la colonisation en Cisjordanie, où vivent la majorité des 240 000 colons. Mais il a dit en 2004 qu'il faudrait tenir compte des «réalités» sur le terrain dans toute future négociation et qu'Israël pouvait s'attendre à conserver certains blocs de colonies dans un accord final.
L'Autorité palestinienne estime que ce plan mine les efforts de relance du processus de paix. «En menant à terme ce projet, Israël fermerait la porte aux négociations et à la paix, estime le ministre et négociateur en chef palestinien, Saeb Erakat. Ce projet vise à déterminer l'avenir de Jérusalem par la colonisation et non la négociation. En agrandissant les colonies de Cisjordanie, Israël donne l'impression qu'il a l'intention d'échanger Gaza pour un plus Grand Israël». Les Palestiniens souhaitent établir la capitale de leur futur Etat dans la partie orientale de Jérusalem, qu'Israël revendique comme sa capitale «éternelle et indivisible».
Ils estiment que la construction du mur de séparation et la colonisation autour de Jérusalem ont pour seul objectif de renforcer l'emprise israélienne sur la ville. Ces craintes ont été ravivées par un scandale de vente à des ultranationalistes israéliens de deux bâtiments situés dans la vieille ville et appartenant à l'église orthodoxe grecque. Les acheteurs ont ainsi mis la main sur les hôtels Petra et Impérial, situés dans le quartier très sensible de la Porte de Jaffa. La transaction, qui s'inscrit dans un projet de «judaïsation» de la vieille ville, s'est opérée par l'intermédiaire d'hommes de paille et de sociétés écrans, pour masquer l'identité des acheteurs et a provoqué l'émoi des Palestiniens de la vieille ville, en particulier les chrétiens. Le patriarcat grec orthodoxe, qui possède d'importants biens immobiliers en Terre sainte, a été souvent accusé de vendre ou de louer en sous-main des terrains à Israël.
Par ailleurs, des photographies aériennes, commandées par le ministère israélien de la Défense, montrent que la colonisation a progressé à grands pas en Cisjordanie depuis l'été 2004. Ces photographies avaient été commandées après que le gouvernement israélien eut promis aux États-Unis de démarquer les limites de toutes les colonies construites en Cisjordanie, afin que celles-ci ne s'étendent pas au-delà des frontières fixées. Mais finalement, Israël avait refusé d'inclure dans ce projet les blocs de colonisation les plus importants, Maalé Adoumim, Ariel et dans le Goush Etzion, qu'il considère comme légaux.
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