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Des revenus aussi mal partagés qu’en 1929
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10 novembre 2008 09:46
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a écrit:
Jeunes gens qui avez étudié les mathématiques financières en rêvant d’une Ferrari à trente ans, vous êtes vous jamais demandé d’où provenait la matière première de votre art ?

Elle avait la même origine que la crise, et cela commence à se savoir. Il y avait beaucoup trop d’argent sur les marchés financiers - c’est ce qui provoquait le renchérissement artificiel des actions et des matières premières. Il n’y en avait pas assez dans les poches des salariés – c’est ce qui les poussait à vivre à crédit. Entre les deux, d’imaginatifs financiers perfectionnaient jour après jour la pompe aspirante qui assurait l’équilibre du système. Un équilibre très précaire, compte tenu des risques accumulés.

Des revenus mal répartis entre salaires et profits, entre les plus riches et les autres : cela provoqua la crise de 1929, comme l’avait si bien analysé Marriner Eccles, qui présida la banque centrale américaine de 1934 à 1948.

Le même diagnostic peut être posé sur la crise actuelle. L’OCDE vient d’apporter sa pierre à la démonstration, dans sa plus récente livraison (1). Celle-ci se fait l’écho des travaux de maints économistes, synthétisés par Andrew Leigh.

On y lit que, dans la plupart des pays industriels, le revenu national est partagé de façon de plus en plus inégal depuis le début des années 1980. La rupture coïncide avec ce qu’on a appelé la « révolution conservatrice », moins d’impôts, moins d’Etat. Et depuis lors, dans la plupart de ces pays, le « Top 1% « - les 1% les plus riches - accapare une part sans cesse croissante du revenu national, jusqu’à approcher la proportion atteinte en 1928.

C’est particulièrement net aux Etats-Unis, où le « Top 1% » a doublé sa part en une vingtaine d’années. Celle-ci atteignait 16,1% du revenu national en 2004 et tout indique qu’elle a encore grossi depuis. Notons d’ailleurs que tout en haut de l’échelle, au « top du top », le millième des Américains les plus riches se partageaient en 2004 près de 7% du revenu national. A peine moins qu’en 1928.

Le « Top 1% » était sur la même pente au Royaume Uni jusqu’en 2000, mais les statistiques s’arrêtent là. Le même phénomène apparaît en Australie, au Canada, en Irlande, en Nouvelle Zélande (Il est beaucoup moins net en France, en Allemagne et au Japon). On devrait cette évolution, dans une proportion d’un tiers à la moitié, à la baisse des taux d’impôts en haut de l’échelle des revenus, selon Atkinson et Leigh (page 19). Qui vante encore les bienfaits du « bouclier fiscal » ?

Un autre facteur d’inégalités est presque partout à l’œuvre. C’est la diminution de la part des salaires dans la valeur ajoutée des entreprises. Entre 1980 en 2006, elle est tombée de 67% à 57% en moyenne, dans les quinze pays les plus riches de l’OCDE. Une chute de dix points, mesurée en France, en Allemagne, en Italie, au Japon, en Finlande, en Grèce, aux Pays-Bas, en Espagne et en Suède, un peu moindre en Autriche et en Belgique. La chute est d’à peine cinq points aux Etats-Unis, où le regain de croissance de l’ère Clinton a ranimé les salaires. Elle est curieusement insoupçonnable au Royaume Uni, une énigme statistique.

Dix points de PIB, cela représente en France 160 milliards d’euros. N’aurait-il pas mieux valu les consacrer à la masse salariale, plutôt que de la voir partir en fumée dans le krach ? Il y avait de quoi envisager autrement la question des retraites et celle du déficit de l’assurance maladie.

Quant aux syndicalistes, ils peuvent commencer à roder un nouveau discours revendicatif : « Patron, si nous réclamons une forte augmentation des salaires, ce n’est pas tellement pour nous. C’est pour vous éviter de perdre la moitié de votre fortune dans un krach. »

(1) « Croissance et inégalités – Distribution des revenus et pauvreté dans les pays de l’OCDE ».


Les syndicalistes apprécieront!
 
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