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Quinze siècles de création littéraire arabe
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14 janvier 2005 00:48
Quinze siècles de création littéraire arabe
LE MONDE DES LIVRES | 13.01.05 | 17h02
Une édition mise à jour de la très ambitieuse et stimulante monographie de Heidi Toelle et Katia Zakharia, qui rend compte de la vitalité des œuvres en langue arabe depuis le VIe siècle.
À LA DÉCOUVERTE DE LA LITTÉRATURE ARABE DU VIe SIÈCLE À NOS JOURS de Heidi Toelle et Katia Zakharia. Edition corrigée et mise à jour, Flammarion, "Champs", 388 p., 7,20 €.

Il y a eu tout au long du XXe siècle, et sans que nous le mesurions vraiment, un effort considérable d'évaluation de la littérature arabe, à la fois forme et contenu, mené par une pléiade d'auteurs fascinés par sa fraîcheur native et par sa truculence. Certains d'entre eux l'ont traduite, ce qui l'a rendue accessible et pour partie - osons le mot - indispensable aux humanités françaises. Il faut dire que le public, quasi inexistant entre les deux guerres, allait progresser dans la seconde moitié du siècle pour atteindre son apogée avec la génération des Louis Massignon, Vincent Monteil ou Jacques Berque. Or, si les érudits connaissent les travaux de synthèse de Carl Brockelmann, Gaston Wiet, Sir Hamilton Gibb, Régis Blachère ou encore l'arborescente Histoire de la littérature arabe de l'université de Cambridge, ils peuvent maintenant rajouter la stimulante monographie de Heidi Toelle et Katia Zakharia, respectivement professeur de littérature arabe moderne à l'université Paris-III et professeur de littérature arabe classique à l'université Lumière-Lyon-II. Une monographie qui parle au plus grand nombre, avec les forces et les faiblesses du genre.

En effet, sous un titre trompeur, A la découverte de la littérature arabe du VIe siècle à nos jours, à la fois étriqué et trop long, se cache un travail de compilation ambitieux et une volonté de couvrir l'ensemble du champ de la langue arabe, sans même masquer ses éventuelles lacunes. Surtout que, pour la première fois, il est suggéré en préambule que l'usage narcissique de chercheurs se congratulant les uns les autres sera abandonné (à défaut d'être combattu), d'autant que les limites qui servent habituellement à définir la grande littérature (al-adab) aux dépens de la littérature orale, la littérature contemporaine ou la littérature populaire, plus revêches, ne servent au fond qu'à déclasser les suivantes au profit de la première : "Ce livre a aussi été pour nous, ajoutent Heidi Toelle et Katia Zakharia, l'occasion de battre en brèche un certain nombre d'idées reçues, parfois méprisantes ou paternalistes, que l'on trouve ici ou là dans les ouvrages des spécialistes de cette littérature, qu'ils soient orientalistes ou arabes." Un tel bain de jouvence serait-il une simple recherche de provocation ou un anticonformisme déloyal ? Il n'en est rien évidemment si l'on considère la moisson d'informations extrêmement précises que recèle cette étude, son côté roboratif.

TRAVAIL D'EXÉGÈSE

Si jalouse ou intempestive que puisse être la littérature, le monde arabe lui fournit un souffle, une destinée et une tension épiques qui prennent parfois la forme de catharsis spectaculaires, et même de confrontations frondeuses si l'on en juge par l'anathème et l'apostasie que connurent récemment nombre d'écrivains et d'intellectuels, notamment égyptiens. Dès lors, le fait de couvrir l'ensemble des apports, poésie (chi'r) et prose (adab), bien sûr, mais aussi conte, théâtre, littérature engagée, nouvelle et récit, a donné de l'amplitude à cet ouvrage, ce qui est éminemment salutaire en ces temps de chasteté intellectuelle.

Toutefois, en dépit des contradictions actuelles du monde arabe, la rupture est bien là, éditoriale, économique et politique. Même l'adage le mieux ancré selon lequel un livre "est écrit en Egypte, édité au Liban et lu en Irak" n'est plus d'actualité. Non pas seulement parce que l'Irak n'a plus la tête à cela, mais parce que la création elle-même s'est quelque peu tari en Egypte et que le Liban ne peut plus se battre face aux livres religieux, offerts par l'Arabie saoudite à des prix cassés. La littérature étant par elle-même une transcendance qui va au-delà des conventions établies, à commencer par les séductions du temps présent, ce travail d'exégèse contribue grandement à réanimer le souvenir d'une grande tradition du livre, tout en déjouant, avec sensibilité, le manque d'appétit pour la lecture. Ainsi, aller à la rencontre de la littérature arabe, ce dont le livre de Toelle et Zakharia nous invite à faire dès à présent, c'est s'approprier une dimension cachée de notre urbanité, en participant ainsi à la joie de communier avec des auteurs, grands ou petits, visionnaires ou réalistes, qui ont pour une large part ciselé l'image actuelle du monde arabe et de l'islam.

Malek Chebel

• ARTICLE PARU DANS L'EDITION DU 14.01.05
x
14 janvier 2005 02:43
je crois bien que je vais le chercher cet ouvrage.
Merci pour ce bel article
r
14 janvier 2005 07:59
allahé jazik bikhaire pour ce magnifik article smiling smiley

en plus jaime bien malek chebel winking smiley
 
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