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Antigone08 a écrit:
Bonjour à tous,
J'ai 17 ans et je suis en terminale, c'est à dire l'année du bac et du choix d'orientation. Depuis la rentrée, on me parle encore et encore de l'APB, de tout ce qui se passe après le bac, et ça me stresse pas mal.
Mon père est hyper religieux, et il veut faire de moi l'archétype de la fille de famille parfaitement pieuse, qui reste avec ses parents jusqu'à son mariage. Ce n'est absolument pas dans mes plans ; je déteste la ville dans laquelle j'habite, et mes études passent avant tout pour moi. Je ne dis pas que je refuse catégoriquement de me marier jeune, on ne sait pas ce que la vie nous réserve, mais je préfère encore trouver un mari à trente ans que bâcler la construction de ma vie professionnelle.
Depuis toujours, je n'ai pas le droit de m'habiller trop moulant, trop court, de me maquiller, de contredire les avis politiques de mon père, d'avoir d'amis garçons, et surtout pas de sortir, attention c'est inimaginable !
Mon père a beau me fliquer et me menacer (moralement et physiquement), je ne lui obéis pas et je fais ce que je veux en cachette ; je m'habille comme je veux mais tout sauf vulgaire (quand il fait 30 degrés, il veut que je mette un pantalon. mais oui c'est ça papa, je mets une jupe et je m'éclipse au lycée avant qu'il ne se réveille), je me maquille, juste un peu de blush et de mascara, et je ne partage pas du tout ses idées politiques. Je sors aussi, mais seulement en journée, sauf qu'il pense toujours que je suis à la bibliothèque.
Ma mère est au courant de tout, elle sait quand je vais au cinéma, chez une copine, et elle me couvre pour ne pas que mon père m'enferme (à moins que ce soit parce qu'elle a peur que cela lui retombe dessus, mon père est du genre à rejeter la faute sur elle à chaque fois qu'il s'aperçoit d'une "faille" dans l'éducation de ses enfants, parce qu'il pense qu'elle est responsable de notre arrivée en France... et vu qu'il déteste ce pays).
Avec lui, c'est lycée-maison-bibliothèque, et je me fais démonter si j'ose ne serait-ce que lui demander si je peux aller au cinéma avec une copine de classe. J'ai renoncé à toute tentative de discussion avec lui, il finit toujours par me frapper (sauf que j'ai de très bons réflexes et que c'est aussi lui qui se fait mal) et/ou par me confisquer mon téléphone pendant des semaines pour me couper définitivement tout contact avec l'extérieur.
Ma moyenne tourne autour de 15,5. J'ai ramené ces notes aux épreuves anticipées du bac : 18, 18, 16 et 17. Et je suis beaucoup plus mature que toutes ces gamines qui ne pensent qu'à faire la fête et à perdre leur virginité. Pourtant, mon père refuse de m'accorder un seul soupçon de liberté. Quand je lui raconte qu'un copain de classe a fait telle ou telle chose il répond : "ah ouais ?!!! tu traînes avec des garçons, toi ?!" et je dois lui raconter un mensonge pour qu'il ne court pas m'inscrire dans une école dé-mixée.
Je ne supporte plus la vie dans cette maison : mon père materne mon petit frère de neuf ans, qui dort avec lui à la place de ma mère et ne se nourrit que de céréales et de tartines ; ma soeur de 13 ans n'a même pas le droit de dessiner, alors que c'est sa seule activité puisqu'elle est aussi enfermée que moi ; mon autre soeur n'a même plus le droit d'entrer dans sa chambre parce que mon petit frère a décrété que ça serait sa salle de jeu, et que mon père exécute tous ses ordres. J'habite au milieu d'un capharnaüm perpétuel, de cris d'enfants qui se poursuivent pour la télécommande, dans un quartier tout sauf calme, je suis de nature stressée et impatiente.
Et je veux aller en fac de droit.
Je ne sais pas trop, mais essayez d'apprendre le code pénal au milieu de "MAMAAAAAAAAAAAAAAN ! LA TÉLÉ ELLE MARCHE PLUUUUUUUUUUUS !", "MACHIN M'A TIRÉ LES CHEVEUUX !"
Je précise aussi que l'éducation, ou plutôt la non-éducation qui est donnée à mon frère me débecte : monsieur se lève, va sur l'ordi pendant qu'on lui amène son bol de céréales au chocolat, va a l'école, rentre, va sur l'ordi jusqu'à minuit, et on éteint la Wi-Fi de TOUTE la maison pour qu'il croit que c'est SFR qui a décidé qu'il a abusé et qu'il doit tout arrêter (je précise aussi que, de mon côté, c'est très compliqué de faire des recherches pour les cours quand il n'y a plus internet, mais tout le monde s'en fout chez moi).
Mon frère est maigre comme un clou parce qu'il refuse de manger (mon père a trop peur de lui pour l'y forcer), il hurle comme une alarme d'incendie dès que quelqu'un parle et ose perturber la vidéo qu'il regarde sur YouTube, il n'a jamais fait de sport et son hygiène est tout sauf surveillée. Combien de fois ai-je déboulé dans la chambre de mon père pour lui expliquer que son fils allait finir myope, plein de carences, et qu'on allait se moquer de lui toute sa vie à cause de sa nullité en EPS, et combien de fois m'a-t-on répondu "quand tu auras tes gosses, tu feras ce que tu veux"... et combien de fois m'a-t-on frappée parce que j'ai insisté, parce qu'on savait que j'ai raison, parce que l'orgueil du mâle ne doit jamais être heurté ?!
Sans parler de ma mère qui, bien qu'elle soit infiniment moins stricte que mon père, a de faux principes qui m'insupportent au plus haut point. Je m'explique : elle ne pense qu'à l'opinion des autres, un jour par exemple une de nos voisines était en train de frapper son gosse (qui devait avoir trois ans) devant chez nous, parce qu'il ne voulait pas manger sa compote, et j'ai explosé de colère après le troisième coup de poing dans son ventre, j'ai crié "non mais c'est quoi ces méthodes ? vous allez arrêter ça tout de suite sinon j'appelle le 119 !". Visiblement, ça l'a vexée, donc elle est partie se plaindre à ma mère du fait qu'une gamine de mon âge ose réprimander une femme accomplie comme elle. Et ma mère m'a effectivement engueulée ("qu'est-ce que les voisins vont penser de nous ? si ton père sait ça, il va te massacrer", sans se soucier le moins du monde que sa voisine soit une folle qui tabasse son gamin pour des broutilles. Ma mère se crée des principes pour avoir des principes : "nous, on ne se mêle pas de la vie des voisins", "nous on ne sort pas le soir" (ATTENTION ! pas parce que c'est dangereux, mais parce que c'est mal vu !)
Avec ma mère, je peux parler, sauf que je parle toute seule. Elle m'écoute les cinq premières minutes, puis elle monte le son de la télé et elle ne me regarde même plus. Pourtant, je suis loin d'avoir l'élocution d'une gamine de 10 ans, je donne des arguments et je lui demande pourquoi elle n'est pas d'accord. Exemple : à l'instant, on vient de se disputer au sujet de la fac que je vais choisir. elle veut que je reste ici au moins une année ("après, on verra" = "arrête de me saouler, tu t'engages à rester ici un an, et ensuite je te redirai la même chose", pour que j'acquière de la "maturité". Sauf que, comment voulez vous acquérir une quelconque maturité en restant enfermé chez vous un an de plus comme vous l'avez toujours été ?! Elle sait que son raisonnement est idiot, et elle ne veut pas se casser la tête à argumenter. Je lui ai donc dit que, si j'avais moins de restrictions, et donc de frustrations, je voudrais peut-être rester ici, qu'il faut une transition entre l'état de tutelle total et la liberté d'adulte, et que cette transition ne se fait pas en restant gentiment sous les jupes de ses parents, que les gens de mon âge ont plus de liberté et ont déjà eu un aperçu de ce que leur réservera le post-bac, mais elle ne faisait que me dire "de toute façon, ton père est comme ça, il ne veut pas et c'est tout". Le problème vient donc, encore, toujours, indéniablement de lui.
Je vais finir par lui mettre les points sur les i : oui, papa, je suis une grande fille, je me maquille, j'ai un style vestimentaire plus affirmé que tu ne le crois, on me regarde dans la rue, j'ai beaucoup d'amis garçons et filles, je ne suis pas de gauche, j'aime la France, je déteste le Rai, tu mets le Adhan beaucoup trop fort le matin (tout le quartier peut en profiter, merci mais j'appelle ça de l'ostentation), mon petit frère va devenir une loque à cause de toi, je déteste ton côté macho et misogyne, je ne me marierai probablement même pas avec un arabe, et si ça continue comme ça je vais tellement détester la vie que tu m'as fait subir que je vais aussi finir par détester la religion (ne criez pas au scandale, c'est ce qui va se passer si mon père continue de mettre son abus d'autorité sur le dos de l'Islam).
Merci de ne pas me dire que je suis encore une gamine débile, que mes parents font tout ça pour mon bien ou je ne sais quoi. Faire quelque chose POUR le bien de quelqu'un est une chose ; lui gâcher des années en PENSANT faire son bien en est une autre. Je ne suis ni utopiste ni optimiste ; je suis même lucide et défaitiste. Je sais que la vie est dure et blablabla, que c'est bien de rester chez ses parents et de se faire entretenir, sauf que je ne peux plus évoluer dans de telles conditions. Si cela ne tenait qu'à moi, j'irais m'exiler à Grenoble, je vivrais dans un foyer d'étudiants, et je me débrouillerais avec l'argent de mes deux comptes bancaires ainsi que celui de ma bourse et des APL (500 euros de gains par mois en tout, pour un loyer à 250 euros, je suis nulle en maths mais je pense savoir que c'est légèrement suffisant).
Merci aussi de m'aider de manière constructive, de ne pas me juger en mode "starfoullah, qu'Allah te remette sur le droit chemin ya tafla", parce que cela ne fera que m'énerver et vous faire perdre le temps que la rédaction de votre réponse vous aura demandé.