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Parcours : Sfia Bouarfa
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26 septembre 2008 16:23
BELGIQUE - 21 septembre 2008 - par OLIVIER BAILLY, À BRUXELLES

Fille d’un syndicaliste marocain, elle est sénatrice et députée socialiste à la région Bruxelles-Capitale. Son cheval de bataille : améliorer le sort des plus défavorisés.


Petite, ronde et souriante, elle promène son tailleur impeccable dans les couloirs des institutions belges. La poussière de charbon des mines de son enfance ne macule plus ses vêtements depuis longtemps, mais Sfia Bouarfa, députée socialiste au Parlement bruxellois et sénatrice de la fédération de Belgique, a toujours les idées de gauche chevillées au corps. Elle s’est battue pour la Palestine, la démocratie au Chili, les droits des sans-papiers et l’égalité des sexes, fondant, entre autres, l’association « Média femmes internationales », un lieu d’alphabétisation pour les femmes. Il est toutefois un combat qui lui tient à cœur davantage encore : celui pour Schaerbeek, une commune déshéritée de la région bruxelloise à laquelle elle reste très attachée, et dont elle est conseillère municipale. C’est là en effet qu’elle a débarqué lors de son arrivée dans le Plat Pays, il y a une trentaine d’années.
Alors quand, lors des élections municipales de 2006, le Parti socialiste (PS) place sur sa liste des candidats d’origine turque qui se révèlent appartenir à l’extrême droite, Sfia bondit. L’idée de figurer dans une équipe construite autour de quelques attrape-voix ethniques, déjà, la révulse. Mais que certains soient, en plus, soupçonnés de racisme l’écœure carrément. « Les listes doivent être constituées de militants porteurs d’un projet de société progressiste, qui défendent les valeurs de la gauche », s’emporte-t-elle. Bien que réputée « grande gueule », elle se tait pourtant… jusqu’au soir du scrutin, dont les libéraux sortent vainqueurs grâce à une alliance de dernière minute avec le parti Vert (écologiste).
Avec la défaite du PS, Sfia Bouarfa voit, à 56 ans, sa dernière chance de devenir adjointe au maire (« échevine », comme on dit en Belgique) s’envoler. Et, du même coup, la possibilité d’influer sur l’avenir de sa ville de Schaerbeek. Amère, elle s’épanche dans les médias et critique vertement la composition de la liste socialiste. Elle frôle l’exclusion et passe en « conseil de vigilance » du parti. Puis rentre dans le rang, convaincue que l’individu n’est rien sans le groupe.

Nombre de ses convictions prennent racine au Maroc, où elle est née en 1950. Précisément à Jérada, ville minière du nord-est du pays. Sfia y est élevée par ses deux « pères » : Ali, son géniteur, un ancien syndicaliste devenu cadre, mais aussi Papa Si Allal, le voisin mineur, syndicaliste lui aussi, qui l’a toujours considérée comme sa fille. La vie de la petite Sfia se partage alors entre la maison familiale cossue dans le quartier européen de Jérada (sa famille est aisée et possède une automobile, ce qui est exceptionnel à l’époque) et la demeure de Si Allal, dans la médina. Sfia a beau être une gosse de riche, c’est elle qui, à 5 ans, déjà, encouragée par son père adoptif, s’en va frapper aux portes des mineurs pour les prévenir que « demain, c’est grève ! ».
Cette enfance lumineuse s’achève brutalement en 1963, quand son père, le vrai, se tue en voiture. Le jour de l’enterrement, la mine, qui, en principe, ne s’arrête jamais, cesse le travail, en signe d’hommage. Commence le temps des privations. La maman de Sfia doit assurer la subsistance de ses sept enfants avec une pension de veuve et quelques breloques à revendre. L’uniforme bleu marine de la lycéenne Bouarfa ne viendra donc pas du magasin de la ville, mais des doigts habiles d’une couturière du village…

Au lycée AbdelMoumen, À Oujda, Sfia est mauvaise en arabe et très bonne en histoire. Elle y acquiert surtout une conscience politique aiguisée, sous l’influence d’Ahmed Salem Latafi, l’un de ses professeurs d’arabe, par ailleurs fondateur de la section locale du Parti du progrès et du socialisme (PPS), l’ex-Parti communiste marocain. Mais bientôt lasse des interminables discussions entre étudiants, elle passe de la parole aux actes et organise une grève à l’internat pour protester contre l’extinction des feux à 21 heures et la médiocre qualité de la nourriture.
Une surveillante surnommée Porte-Clés en raison de sa petite taille tient la « rebelle » à l’œil. À quelques mois du bac, Sfia est renvoyée de la résidence. On est en 1970-1971. L’année scolaire est marquée par d’importantes grèves étudiantes. La police s’en donne à cœur joie. Une lycéenne est si violemment tabassée qu’elle en restera paralysée. Sfia est révoltée. Mais quand, effrayés par la violence, les étudiants décident de poursuivre la lutte dans les salles de cours, elle s’y oppose : « Si on rentre en classe, c’est pour travailler. » Ses camarades veulent la faire taire, menacent de la jeter par la fenêtre…
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26 septembre 2008 16:25
Le bac en poche, Sfia décide de tourner la page. Elle en a marre du Maroc et du militantisme. Marre de la répression. Marre d’être en permanence surveillée. Et puis, Si Allal est très malade - les poumons, comme tant de mineurs… Avec sa bénédiction, elle prend le chemin de l’exil. Pourquoi la Belgique ? Un peu par hasard, parce qu’à Jérada elle a fait la connaissance d’« expats » belges sympathiques.
Prenant exemple sur un ami marocain, Sfia choisit d’abord l’hôtellerie, puis change de voie. Elle suit des cours pour devenir assistante sociale et obtient une licence en sciences du travail. Elle a des amis à Schaerbeek, ville où se trouve aussi le siège du Mouvement contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie (Mrax), dans lequel elle milite. C’est là qu’elle va faire sa vie. Elle cherche du travail, sort avec des amies, puis rencontre, lors d’une soirée, un certain Zeki Bozkurt, cuisinier d’origine turque qu’elle juge d’abord parfaitement désagréable. Il deviendra le gérant d’un prestigieux restaurant… mais aussi, et surtout, son mari et le père de ses deux enfants. Zeki dirigeant aussi un club de golf à Tervuren, une banlieue cosy de Bruxelles, où le couple s’est fait construire une belle villa, la jeune femme n’a plus vraiment besoin de travailler.
Mais chassez le naturel… Schaerbeek est à l’époque dirigé par un maire ouvertement xénophobe. En 1991, Sfia réussit à se faire embaucher par la municipalité comme assistante sociale. Elle nourrit secrètement le projet de combattre de l’intérieur le racisme des édiles. Ainsi, elle dénonce la politique pratiquée aux guichets : une carte d’identité coûte 250 francs belges (6,20 euros) pour un Belge, et jusqu’à 15 000 (372 euros) pour un étranger. À son instigation, une émission de la chaîne francophone RTBF (« Au nom de la loi ») entreprend de révéler le scandale grâce à une caméra cachée. C’est un beau succès, mais… Sfia est virée !

Elle reviendra à la mairie en 1994, à la faveur des élections municipales. Élue sur la liste du PS, elle obtient le meilleur score de tous les candidats, mais se voit privée de l’échevinat. Sfia Bouarfa le ressent comme une injustice, une trahison, voire un geste raciste de la part de ses propres amis. « C’est là que j’ai vraiment découvert la politique », dit-elle. On lui offre pourtant ses sièges au Parlement de la région de Bruxelles (1995), puis au Sénat (2001), mais elle les vit comme autant de lots de consolation : c’est à la mairie de Schaerbeek qu’elle tient le plus. Hélas, on l’a vu, la Realpolitik resservira les plats en 2006.
Sfia, pourtant, ne désarme pas. Inquiète de la crise identitaire qui gagne aujourd’hui la Belgique, elle se prépare désormais pour les régionales de l’an prochain. Avant, sans doute, de prendre une retraite au goût d’inachevé…


Jeune Afrique.com
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27 septembre 2008 21:51
SFIA tout ce que je peu te souhaiter c'est de reussir ce que tu as toujours voulu etre.
 
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