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Municipalités . Le top 10 des magouilles
B
16 mai 2010 11:13
Par Mohammed Boudarham
Municipalités . Le top 10 des magouilles

(DR)


La Cour des comptes, dont le nouveau rapport continue de faire des vagues, a aussi épinglé la gestion des communes et leurs mille et une petites arnaques du quotidien.


Le rapport de la Cour des comptes a été un choc. Un de plus, pourra-t-on dire. Sauf que les dossiers chauds n’épinglent pas seulement les offices et les organismes étatiques. Il épluche aussi une série d’aberrations qui plombent sérieusement la gestion communale, poumon supposé du Maroc profond. Un exemple parmi d’autres : à Had
Kourt, petite localité dans la région de Sidi Kacem, il n’existe pas de morgue. Résultat : les corps sont acheminés sur 40 kilomètres jusqu’à Souk Larbaâ ou 80 km jusqu’à Sidi Kacem. Le tout à bord de voitures légères, en dehors de toute structure sanitaire. Des aberrations plus graves, ou plus cocasses, ont été compulsés dans le document de la Cour des comptes. Le “hit-parade” que nous en avons tiré donne une idée de l’ampleur de la gabegie. Florilège.

Appel d’offres, connais pas !
A Moulay Bousselham, station balnéaire dans le Gharb, trois aires de stationnement (parkings) étaient louées au fils d’un conseiller communal pour la modique somme de 20 000 dirhams par an. Sans aucun appel d’offres. Quand la commune a fini par faire jouer la concurrence, le montant du loyer a été multiplié par 10. En gros, la Cour des comptes reproche aux dirigeants de Moulay Bousselham de ne pas lancer d’appels d’offres. Et, quand ils le font, de publier les avis dans des journaux à très faible diffusion. Cette “omission” des règles de passation de marché a fait que la commune a payé des ordinateurs à 14 000 DH l’unité, soit plus de quatre fois le prix payé pour le même matériel bureautique (de même marque) par la commune de Khémisset. Mesurez toute la différence.

Ça roule à Demnate
Cette localité de la province d’Azilal mérite de faire son entrée dans le Guinness des records. En deux ans, la commune a acquis 14 pneus pour une même voiture et 27 pneus pour un seul camion. Rien que ça ! Malgré les explications du président de cette commune (difficultés d’accès de certaines zones), le verdict de la Cour des comptes est sans appel : la durée de vie minimale d’un pneu est d’une année. Pour l’anecdote, il a été aussi constaté que la commune paie à deux reprises les frais d’acquisition de pièces de rechange nécessaires à l’entretien des véhicules…

Voitures en solde
La commune de Salé est la championne des enchères publiques pour liquider les voitures placées en fourrière. Elle en organise régulièrement mais elle oublie, inexplicablement, de lancer la procédure de vente des véhicules immobilisés alors que la loi autorise cette cession dès le 13ème mois de retenue. Résultat : la qualité des véhicules se dégrade, leur valeur marchande aussi. En 2007, 36 voitures saisies ont été écoulées pour la modique somme de 262 680 DH. Soit 7296 DH par véhicule. Qui dit mieux ?

Les casseroles d’El Jadida
Entre 2004 et 2007, la commune de la capitale des Doukkala a dépensé 56 000 DH dans l’achat de journaux auprès d’un seul kiosquier de la ville. Sauf que le kiosque figurant sur les factures a été démoli en 2006. Le fonctionnaire qui a certifié ces commandes a déclaré qu’il n’a jamais reçu de journaux et qu’il agissait “sur ordre du président”. Pis encore, la commune a présenté aux magistrats de la Cour des comptes une facture de 150 000 DH, ayant servi à l’achat d’ustensiles pour la maison d’hôtes de la ville. Là aussi, les magistrats n’ont pas retrouvé la trace de la moindre cuillère à café dans cette résidence.

Recouvrement, où es-tu ?
A Imintanoute, les propriétaires des locaux de débit de boisson (cafés) sont choyés. La Cour des comptes a constaté que la plupart déclarent un chiffre d’affaires annuel ne dépassant pas 1500 DH, soit 4 DH par jour. Avec une déclaration aussi ridicule, la taxe due à la commune devient pratiquement nulle. Le problème, c’est qu’il ne faut pas compter sur le régisseur des recettes de la commune pour redresser ces établissements. Il ne prend pas toujours la peine de recouvrer les loyers des commerces et habitations de la collectivité. Près de 400 000 DH de recettes non encaissées ont été recensés.

Le tennis, le bar et l’association
A Khémisset, c’est le cas du club municipal de tennis qui intrigue le plus. Depuis plusieurs années, la gestion du site a été gracieusement concédée à une association… qui n’a aucune existence légale. En plus, la commune rétribue un “directeur” qui ne joue aucun rôle dans le fonctionnement effectif du club. Ce qui n’a pas empêché l’association, domiciliée dans les locaux du club sans titre légal, d’encaisser toutes les recettes de cette infrastructure sportive : un chiffre d’affaires de 138 747 DH a été réalisé durant la saison 2006 – 2007, rien que pour la piscine. Pis encore, un élu communal a même transformé la buvette du club en bar qu’il exploite pour son propre compte.

Contrats fictifs
Harhoura, localité près de Rabat, a découvert une méthode novatrice pour verser des primes à ses principaux “actionnaires”, via l’établissement de contrats fictifs. Outre le paiement de carburant de véhicules personnels (436 000 DH) ou encore les factures d’eau et d’électricité (660 000 DH) des locaux ne relevant pas de la commune, deux contrats de location fictifs (2400 DH mensuels chacun) ont été déterrés par les limiers de la Cour des comptes. L’entourloupe a duré près d’un an et demi.

Mieux que le chèque, le bon d’essence
A Chefchaouen, les bons d’essence servent de monnaie d’échange pour payer certaines prestations. C’est ainsi que des groupes de musique et des associations locales ont été régulièrement “payés” à coups de dotations de carburant de l’ordre de 58 334 DH, relève la Cour des comptes. Ce n’est pas tout. Pour pouvoir “transformer” le carburant en monnaie sonnante et trébuchante, les bénéficiaires étaient obligés de s’adresser à une station de service qui prélevait au passage un pourcentage de 35%.

Loyers pas chers
A Fqih Bensaleh, cinq villas, propriétés de la commune, sont louées à seulement 500 DH au profit de plusieurs cadres du ministère de l’Education nationale. Et encore : un seul locataire s’acquitte de cette mensualité. Les magistrats de la Cour des comptes ont relevé d’autres aberrations dans la gestion du patrimoine immobilier et foncier de la commune. Exemple parmi d’autres : une société d’affichage squatte douze emplacements dans la ville, sans convention ni contrat. Et sans verser la moindre redevance. La seule contrepartie concédée par ladite société consiste à prendre en charge l’affichage publicitaire… d’un festival du cheval placé sous le patronage du président de commune.

Lavez-vous, c’est gratuit
Dans la commune rurale de Sidi Abderrazak, près de Khémisset, les abattoirs sont mitoyens à une décharge à ciel ouvert. Les équipements vétustes, les crochets oxydés et les égouts fissurés de cette infrastructure font craindre le pire quant à la sécurité sanitaire des viandes vendues aux populations. De plus, le président de la commune permet à ses électeurs de laver leurs vêtements et leurs couvertures dans les locaux réservés à l’abattage. L’eau est évidemment fournie gratuitement, même si la facture annuelle payée par la collectivité s’élève à 100 000 DH. Il faut dire que la commune a les moyens : 38 MDH d’excédents sont dégagés chaque année.


Tutelle. Le poids de l’Intérieur
Dans la majorité des 32 communes décortiquées par les magistrats d’Ahmed Midaoui (patron de la Cour des comptes), l’influence du ministère de l’Intérieur est flagrante. Ce qui handicape financièrement les communes. Par intérêt ou par pur réflexe makhzénien, les élus continuent à vouloir être dans les bonnes grâces des représentants de l’autorité de tutelle. Cela se traduit par une prise en charge des frais de loyer, d’eau, d’électricité et de téléphone. Voire des frais de réfection du logement du caïd du coin ou le paiement du carburant du pacha du cercle. A Fqih Bensaleh, par exemple, la commune a déboursé 56 000 DH pour creuser un puits dans le domicile du pacha. Une dépense interdite par la loi puisque le représentant de l’autorité ne peut bénéficier de services facturés à la commune. Il faut croire que les réflexes de l’ère Basri ont la peau dure et rares sont les élus qui contrarient les désirs des “puissants” de l’Administration. Et si le ministère de l’Intérieur commençait, enfin, par rappeler à l’ordre ceux parmi ses agents qui bénéficient de toutes ces largesses ?


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