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Mémoire courte...ou mémoire sélective ?
s
31 janvier 2006 20:25
Cela commence à bien faire : le mur des lamentations depuis la victoire du Hamas aux élections et son cortège d’explications, de regrets, de mises en garde et de pseudo inquiétudes sur "l’islamisme radical" et "pour le bien des Palestiniens" a assez duré.

Nous en avons assez de lire et entendre des inepties du genre "cela va donner un prétexte à Israël pour ne pas négocier", ou les interrogations telles que "Le Hamas va-t-il accepter de désarmer ?" ou "Va-t-il accepter de reconnaître Israël ?" .

Tant de mauvaise foi nous sidère et pourtant, nous commençons à être assez blindés de ce côté.

A tous ceux qui ont apparamment la mémoire courte, nous aimerions rappeler :

1) qu’Israël n’a jamais eu besoin du moindre prétexte pour refuser la paix, pour continuer à coloniser et occuper les territoires palestiniens. Les dirigeants israéliens ne se sont pas gênés pour diaboliser le l’OLP, le Fatah, Yasser Arafat et déclarer qu’il n’étaient pas des interlocuteurs valables. Quant à Mahmoud Abbas, Sharon le traitait ouvertement et publiquement de "poule mouillée" et le ridiculisait, le mettant constamment en porte à faux vis-à-vis de sa population en l’amenant à faire toujours plus de concessions alors que les Palestiniens étaient chaque jour plus étranglés et martyrisés. Si Israël avait voulu faire la paix et vivre en sécurité, si Les Etats-Unis et l’Europe avaient voulu de la paix au Proche-Orient, nous l’aurions depuis longtemps, puisque cela fait maintenant près de 20 ans que les dirigeants palestiniens ne revendiquent un Etat indépendant que sur 22 % de leur terre initiale, c’est à dire la Cisjordanie, Gaza, Jerusalem Est, avec l’établissement de communications entre la Bande de Gaza et la Cisjordanie.

Comment peut-on se permettre de demander au Hamas s’il va reconnaître Israël alors qu’Israël refuse, en revanche, de se reconnaître, c’est à dire de fixer les frontières de son pays ?

Pourquoi ne demande-ton pas au Hamas : "Seriez-vous prêts à accepter une force de paix internationale sur la ligne verte ?" . On ne leur demande pas parce que la réponse d’Israël à cette question est NON ! Israël qui ne jure que par sa sécurité, refuse obstinément les propositions européennes et américaines d’envoi d’une force internationale sur les frontières reconnues par le droit international.

On demande au Hamas, qui vient de cesser toute opération militaire pendant un an, respectant une trêve qu’Israël n’a cessé de violer durant la même période : "Etes vous d’accord pour renoncer aux armes ?" . Qui a posé cette question à n’importe lequel des dirigeants israéliens ? Ainsi on voudrait qu’Israël puisse continuer à utiliser les tanks, les bombes, les missiles et toute l’artillerie lourde, pour maintenir son occupation, mais que le Hamas, renonce lui à la résistance armée contre l’occupant, qui est parfaitement légale.

Il est vrai qu’il n’est pas utile de demander aux dirigeants israéliens "Comptez vous faire cesser l’occupation ?", puisque Ehoud Olmert a pris les devants et fait savoir qu’il ne renoncerait jamais "aux blocs de colonies juives, ni à Jérusalem Est".

Y a-t-il eu un seul journaliste pour lui demander : "Comptez-vous renoncer à la construction du Mur jugé illégal par la Cour internationale de Justice ?". Non. Pourquoi ?

Venons-en à l’épouvantail de l’"islamisme", assorti de l’épithète "radical", pour faire bonne mesure et nous convaincre non seulement qu’Israël ne pourrait en aucun cas négocier avec "ces gens là", mais que les pauvres Palestiniens qui restaient encore défendables vont connaître l’enfer. Là encore, le festival d’hypocrisie n’est pas triste.

Tout d’abord, permettons-nous de poser la question : depuis quand les gouvernements occidentaux se gênent pour entretenir de très bonnes relations avec des régimes islamistes, et des plus intégristes, quand cela les arrange ? Le commerce se porte bien, comme chacun sait avec l’Arabie saoudite et d’autres Etats gouvernés par des islamistes.

Et pourquoi ne se met-on pas à plaindre les Israéliens qui sont obligés de vivre dans un Etat religieux où la religion fait la loi à tous les niveaux. Les "signes ostatoires" de la religion juive n’y sont pas encore obligatoires partout, mais la religion est imposée y compris aux juifs qui sont athées ou non pratiquants.. Ainsi seul le mariage entre juifs, prononcé par un rabbin, est reconnu en Israël pour les juifs. Tout autre mariage n’a aucune valeur. Le mariage civil n’y existe pas, pas plus que divorce civil. Si vous n’êtes pas circoncis par un religieux, vous ne serez pas reconnu comme juif et ne pourrez pas bénéficier de vos divers droits de citoyen (allocations familiales...) Israël est un Etat religieux, et en outre raciste, puisqu’il ne reconnait pas les mêmes droits à ceux qui ont la citoyenneté israélienne, qui sont nés sur le même sol, dont les parents et ancêtres sont nés sur le même sol, mais qui ne sont pas juifs.

Aujourd’hui, plus de 40 % des enfants israéliens sont scolarisés dans des écoles non laïques, où la religion occupe une place prépondérante, et où on enseigne aux enfants qu’ils font partie du peuple élu et que tous les arabes sont leurs ennemis. Cela ne fait froid dans le dos à personne parmi nos amoureux éperdus de la laïcité ?

Enfin, pourquoi ne pas donner au Hamas la possibilité d’être jugé sur ses actes ? Il promet dans ce domaine de ne forcer personne, dans les territoires palestiniens à se plier aux préceptes du Coran. Les Palestiniens ne sont pas des enfants que l’on peut facilement obliger à faire ce qu’ils n’ont pas envie de faire. Ils l’ont assez prouvé au cours de ces décennies.

Le Hamas, "radical", a par ailleurs fait des déclarations fort claires après ces élections. Son dirigeant, Mahmoud Zahar a réitéré sur CNN, à Wolf Blitzer, rédacteur en chef de la chaîne américaine, la proposition faite par son mouvement à israël : fin de l’occupation des territoires occupés en 1967, établissement d’un Etat palestinien sur ceux-ci, et trêve des armes de longue durée. Qu’est-ce que cela a de "radical" ?

Les Palestiniens veulent donner leur chance aux militants du Hamas, car ils ont été déçus non seulement par la corruption de certains de leurs dirigeants, mais surtout parce qu’ils ont cessé de résister à l’occupant en acceptant de faire ses quatre volontés pendant que ce dernier aggravait la situation du peuple palestinien. On nous dit que l’Autorité palestinienne "avait choisi la voix du compromis historique et des négociations". En 1993, certainement. Mais plus de 10 ans après. Ce qu’ont choisi certains dirigeants palestiniens c’est de se livrer pieds et poings liés à l’occupant, sans aucune contrepartie, sinon quelques avantages matériels pour certains d’entre eux.

Non seulement, ils n’ont jamais fait appel à la mobilisation populaire en Palestine, ni à celle de la communauté internationale, mais ils ont été jusqu’à approuver la visite de Sharon en France et ses nouveaux habits d’ "homme de paix" ; ils ont même réprimandé les opposants tunisiens qui avaient manifesté contre l’invitation faite par Benali à Sharon !

Et on voudrait que les Palestiniens ne les sanctionnent pas !

Non, il ne suffit pas de vanter le sens de la démocratie des Palestiniens, démocratie que l’on feint de découvrir au moment des élections, comme s’il s’agissait de sauvages n’ayant pas encore intégré les bienfaits de la colonisation, le reste du temps.

Il faut refuser le bourrage de crâne.

Il faut exiger qu’Israël soit placé sur la liste des pays terroristes, qu’un mandat d’arrêt international soit lancé à l’encontre de tous les criminels israéliens à la tête du gouvernement et de l’armée, tous ceux qui tuent, torturent, démolissent les maisons, déracinent les oliviers, essaient par tous les moyens de déstructurer la société palestinienne et d’y introduire le chaos.

Il faut refuser que ce gouvernement terroriste continue non seulement à occupper les territoires palestiniens, mais qu’il se permette en plus d’empêcher les Palestiniens de gérer ensemble et de manière démocratique l’issue de ces élections. Le Hamas souhaite, et l’a exprimé, gouverner avec l’ensemble des composantes politiques palestiniennes. Israel et les Etats-Unis mettent en revanche la pression sur le Fatah pour qu’ils pestifèrent le Hamas, afin de crééer le chaos. Nous espèrons qu’il y aura suffisamment d’hommes et de femmes déterminés, au sein du Fatah, à ne pas se soumettre aux volontés destructrices de l’occupant. Même si nous savons, les uns et les autres, qu’il ne peut y avoir de véritable "pouvoir", "autorité" ou "gouvernement" palestinien sous occupation, personne n’a le droit de choisir les dirigeants palestiniens à leur place.

par CAPJPO-EuroPalestine
siryne
s
31 janvier 2006 20:32
(Tous mes vœux au peuple de la Terre Sainte !)

par Israël Adam Shamir

Traduit de l'anglais en français par Marcel Charbonnier, membre de Tlaxcala,
le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique
([email protected]). Cette traduction est en Copyleft.


Chers compatriotes, fils et filles de Palestine, vous avez défié les ordres du Mort Vivant, vous avez défié les menaces de ses acolytes de Washington, Londres et Bruxelles. Vous avez choisi le camp de la foi et de la résistance. Vous avez manifesté votre esprit, que l’oppression n’a pu atteindre. Je suis très fier de votre noble fermeté, de votre croyance inébranlable en Dieu, de votre rejet audacieux du diktat de Tel-Aviv. Même sous l’occupation militaire de l’étranger, vous êtes le peuple le plus libre, le plus inflexible et le plus résilient du monde. Vous êtes plus libres que les Américains, qui se sont soumis à leur Patriot Act ; vous êtes plus libres que les Européens, qui répètent les ordres reçus de Washington et menacent l’Iran de sanctions, voire d’une guerre. Vous êtes plus pieux que le Vatican, qui joue avec la folle idée de redorer l’image de Judas afin de se rabibocher avec les juifs. Vous ne pouvez même pas aller d’un village à l’autre sans la permission des juifs, mais votre esprit est libre, et c’est fondamental. Aujourd’hui même, ils continuent à tuer vos filles et fils, mais ils ne sauraient tuer votre esprit indomptable.

« Vox populi – vox Dei » ; « la voix du peuple est la voix de Dieu », disaient les Romains, et cet oracle, comme tous les oracles, peut être interprété de plusieurs manières. On peut dans les résultats de ce scrutin l’élection normale et régulière du parti d’opposition après que le parti au pouvoir eut dépassé le terme prévu de sa mandature. On peut y voir un changement de génération, au pouvoir. On peut y voir le rejet de la volonté de l’Autorité palestinienne de brader les réfugiés et Al-Aqçâ, de son incapacité à faire accéder la jeune génération de Marwan Barghouthi et des combattants de l’Intifada aux responsabilités. On peut y voir un vote en faveur d’un gouvernement aux mains propres, car non corrompu.

Toutefois, ce serait une erreur majeure que de ne pas apercevoir la leçon spirituelle inhérente à cette élection. L’Islam est une forme locale, orientale, du christianisme, proche de l’Eglise nestorienne du Presbytérien Jean. C’est une foi faite de solidarité et d’égalité. Le peuple de la Terre Sainte a rejeté le paradigme matérialiste néo-libéral de Mammon, et il a suivi la voie proposée par le grand poète anglo-américain T.S. Eliott, consistant à édifier une société authentiquement chrétienne. Nous pouvons nous aussi suivre leur exemple, et choisir la solidarité et l’esprit, en laissant de côté consumérisme et agression.

La Terre sainte ne sera pas profanée ; elle ne saurait l’être. L’idée démente d’en faire une base militaire, un refuge d’escrocs, une agence matrimoniale juive et la capitale gay du monde entier, cette idée s’est effondrée. L’Islam est excessivement généreux et tolérant envers tous les croyants ; le choix opéré par leurs frères ne posera aucun problème, ni aux chrétiens croyants, ni aux juifs pieux. Ni non plus aux libres penseurs : ils jouiront du bénéfice qu’il y a à vivre dans une société protectrice. La gestion du Hamas à Bethléem a montré qu’il n’y a rien à craindre. Les dirigeants du Hamas ont exprimé leur volonté de partager le pouvoir avec leurs frères du Fatah.
Le nouveau parlement à majorité Hamas doit-il reconnaître l’Etat juif raciste et suprématiste ? Bien sûr que non ! Il a la possibilité de rejeter le partage [de la Palestine] et d’inviter tous les résidents permanents de la Terre Sainte à former ensemble une nouvelle autorité s’étendant sur la totalité de la Palestine, du Jourdain jusqu’à la Méditerranée.

Il peut s’inspirer de la Grèce, qui a refusé de reconnaître l’ « indépendance » de l’ex-république yougoslave de Macédoine, sous ce nom de « Macédoine », car ce nom était déjà pris. De la même manière, l’Etat juif n’est pas digne du noble nom d’Israël. Qu’il appartienne à l’Eglise chrétienne (comme nous le pensons) ou aux juifs pieux (comme ils le pensent), voire même aux descendants de l’Israël historique selon la chair – c’est-à-dire aux Samaritains de Naplouse – ce titre d’Israël est incongru, s’agissant de l’Etat sioniste. Nous ne devrions pas non plus utiliser le nom sacré de Jérusalem afin de désigner le gouvernement sioniste. L’Occident n’a jamais nommé le gouvernement de la République Démocratique Allemande « Berlin », car cela lui aurait conféré la légitimité dont elle était dépourvue ; il l’appelait « le gouvernement de Pankow », du nom du faubourg de Berlin où fut signé le décret de sa création. De la même manière, nous devons faire référence à l’autorité juive en la désignant du nom de son siège de facto, Tel-Aviv, et œuvrer à remplacer ce régime de Tel-Aviv par un unique gouvernement, sis à Jérusalem la Sainte.

L’Etat juif raciste nous a interdit, à nous qui en sommes les citoyens, de participer à ces élections, et il vous a exclus des élections à la Knesset, à Jérusalem.

Que ces élections soient les dernières élections séparées entre habitants indigènes et adoptifs de la Terre Sainte !

Israël Adam Shamir
siryne
s
1 février 2006 13:43
Colonialisme culturel occidental et libre choix des Palestiniens
mardi 31 janvier 2006

Par Gilad Atzmon
[1]

[peacepalestine.blogspot.com]

Traduit de l’anglais en français par Marcel Charbonnier, membre de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité linguistique ([email protected]). Cette traduction est en Copyleft.

Chers Amis,

je suis désolé de vous décevoir. Je n’ai pas l’intention d’écrire une réfutation détaillée de la lettre ouverte de M. Davidsson. Ceci, pour trois raisons.

a) je ne vois pas de quelle manière la cause palestinienne pourrait en quoi que ce soit bénéficier d’un débat de cette nature ;

b) je n’ai vraiment pas de temps à perdre à ce genre de stupidité : je joue chaque soir devant des centaines de personnes, et engager un débat avec un Davidsson pas content, pour moi, c’est une perte totale de temps ;

c) ce n’est peut-être pas sympa de le dire, mais M. Davidsson n’est pas de taille. La lecture de sa « lettre ouverte » indique que cet excellent homme est un moderniste conservateur, profondément englué dans une rhétorique désuète relative aux « valeurs universelles ».

Elias Davidsson eût-il été un tant soit peu plus cultivé, il aurait sans doute intégré que la notion d’humanisme universel n’est pas applicable à la question de l’Islam et du judaïsme. L’universalisme et le fait de penser en termes universels sont le fruit de la philosophie et de l’âge des Lumières, en Occident. L’universalisme est intrinsèquement lié à la notion de « sujet ». Dans le judaïsme, ainsi que dans l’Islam, l’être humain est le sujet de Dieu [pas de lui-même, ndt]. Il est un disciple, plus qu’un libre penseur. Cette différenciation démantèle toute possibilité de réduction terminologique transculturelle entre l’Occident et l’Orient. Autrement dit, parler de valeurs Universelles est, en soi, une forme de colonialisme culturel occidental. Si Davidsson tient absolument à être colonialiste, qui suis-je, moi, Gilad Atzmon, pour l’en empêcher ?

Dois-je le préciser ; je ne crois pas à la notion de valeurs universelles. En réalité, je ne sais même pas ce peuvent bien être les « droits humains universels ». De plus, j’ai tendance à être très méfiant vis-à-vis de ceux qui prétendent le savoir. Simplement parce qu’il m’arrive, de temps à autre, d’ouvrir un journal, je sais très bien que Blair et Bush assassinent au nom de l’ « humanisme universel ». Ceux qui suivent mes écrits savent très bien que je suis un disciple fervent de Martin Heidegger. Je pense que les objets sont formés par la langue. En d’autres termes, pour moi, le discours universel et le discours sur l’universalité sont totalement dépourvus de signification. De plus, je pense que ceux qui s’efforcent d’imposer le discours de l’universalité à autrui sont soit des ignorants, soit des gens qui aspirent à l’hégémonie.

Je l’ai dit : je n’ai nulle intention de répliquer à la lettre ouverte d’Elias Davidsson. Non. Il y a mieux : je vais demander à M. Davidsson de m’envoyer (à moi, ou à n’importe qui d’autre) une référence bibliographique à la lettre ouverte qu’il a certainement publiée à la suite de l’épouvantable assassinat de Sheikh Yassine. Si Davidsson est tellement outragé par moi, l’assassinat de Sheikh Yassine a dû au moins autant l’ulcérer. Au cas où il n’aurait pas publié une telle lettre ouverte, à l’époque, il peut m’envoyer, à moi ou à n’importe qui d’autre, ses commentaires ou ses condoléances publiés à l’intention du peuple palestinien après l’assassinat brutal du Dr. Abdel Aziz Rantissi. Je me permettrai même d’insister un peu, en demandant où étaient les Elias Davidssons et autres gardiens des valeurs universelles quand la quasi totalité de la direction du Hamas était en train d’être liquidée en série et en plein midi ?

Je vais vous le dire : d’une manière ou d’une autre, ils sont restés cois. Ils sont restés très, très cois. Pourquoi sont-ils restés cois ? Parce qu’ils n’aiment pas le Hamas. En gardant le silence en des circonstances aussi graves, ils ont fondamentalement approuvé la politique israélienne des assassinats contrôlés. D’une certaine manière, Davidsson et ses semblables ont extrêmement peu de respect pour des partis religieux, des politiques inspirées par des préceptes religieux et pour la religion, d’une manière générale. Certes, ils aiment le peuple palestinien, mais seulement dans la mesure où il leur rappelle eux-mêmes, c’est-à-dire des « juifs athées européens de la classe moyenne ». Si cela n’était pas encore très clair jusqu’à mercredi dernier, désormais, clair, ça l’est. Or, voyez-vous, les Palestiniens ne sont pas précisément des juifs athées européens de la classe moyenne. M. Davidsson trouve ça difficile à digérer. Malheureusement, je ne puis lui être d’aucun secours.

C’est précisément cela qui m’a toujours rendu si réticent à avoir un quelconque contact avec l’un quelconque de ces « militants » ethniques juifs. Inutile de dire qu’ils ont pourtant tous, peu ou prou, flirté avec moi et ma musique, et fort longtemps. Mais j’ai compris très tôt que leur agenda était totalement hypocrite. Ce qui leur tenait à cœur, ce n’était en rien la Palestine. C’était la défense de leur propre idéologie rationaliste athée, sur le dos du peuple palestinien !

Chers Amis. Je sais depuis pas mal de temps que la rue palestinienne est en train de glisser vers l’Islam. Je précise tout de suite que, contrairement à Davidsson et ses semblables, je n’ai pas peur de l’Islam. De fait, j’aime l’Islam et j’aime me trouver dans un environnement musulman. De plus, je constate que la démocratie, dans le monde arabe, peut conduire à l’Islam, alors que l’Islam n’est pas nécessairement voué à maintenir la démocratie. Et, comment dire ? Cela ne me dérange nullement, bien au contraire, puisqu’il s’agit véritablement du choix des masses et que cela me convient parfaitement. Et si cela ne suffisait encore pas, j’ajoute que je suis loin d’avoir conservé mon enthousiasme pour la Démocratie. Je n’oublie pas que c’est dans le cadre de la phase atteinte actuellement par la démocratie occidentale que des criminels de guerre assoiffés de sang comme Blair, Bush et Sharon ont été réélus.

Je ne suis pas islamologue, mais j’en sais assez pour dire que les juifs ont vécu sous la protection de l’Islam pendant des siècles. Nous savons tous parfaitement qu’un des principes de l’Islam est la protection de l’étranger. Quitte à choisir entre vivre dans une Palestine islamique ou une Palestine juive, je choisirais l’islamique, sans l’ombre d’une hésitation. Mieux : si on me donne à choisir entre la « démocratie juive » et l’Islam, je choisis l’Islam.

J’avoue avoir été plutôt inquiet au moment de mettre mon dernier article en ligne. La plupart de mes amis palestiniens sont des musulmans et des chrétiens laïcs. Beaucoup sont affiliés au Fatah. Ils sont, tous, très préoccupés par les derniers développements intervenus dans leur pays. Comme je l’ai indiqué dans mon article, ce vote n’exprime pas la volonté des Palestiniens de l’exil. D’une certaine façon, je les comprends fort bien. J’ai grandi en Israël, un pays qui glisse, lentement mais sûrement, vers le fondamentalisme religieux. Je sais ce qu’est le fondamentalisme, et je sais parfaitement que je serais strictement incapable de survivre ne serait-ce qu’un seul jour dans un environnement talmudique. Je comprends combien cela peut être difficile, pour mes amis palestiniens, qui se sont habitués à un mode de vie libéral occidental. Je suis conscient de tout ceci. Et pourtant, ceux qui vivent en Palestine occupée ont dit ce qu’ils avaient à dire ; ils sont allés voter et ils nous ont administré, à nous tous, une grande leçon. Ils nous ont montré ce qu’est l’esprit de résistance le plus héroïque. Ils ont dit à l’Occident, à Israël, à l’Union européenne, au monde arabe, aux Davidssons et aux autres gardiens du temple : « Vous pouvez tous aller vous faire voir ! Nous savons ce que nous voulons ! Votre fausse gentillesse, on en a marre ! Votre désir hypocrite d’aider, nous en avons plus qu’assez ! Votre solidarité nous fait gerber ! Nous n’avons pas besoin que vous veniez nous dire qui nous sommes et ce que nous devrions être. Ne nous libérez pas, s’il vous plaît, et ne sauvez pas nos femmes. Nous allons prendre soin d’elles, dorénavant. Lâchez-nous les baskets ! »

Combien de fois ne me suis-je pas retrouvé déçu et frustré, au cours de ce combat sans fin contre le sionisme et la juiverie mondiale qui le soutient ? Combien de fois n’ai-je pas eu à payer très cher le fait de dire ce que je pense ? Cette fois-ci, pour la première fois de ma vie, je sens véritablement un changement, dans l’air. Les Palestiniens vont vaincre. Avec moi. Ou sans moi. Ils vont gagner, parce qu’ils n’ont rien à perdre. Ils vont gagner, parce qu’ils le méritent.

Désolé, mes chers Amis. Avec un tel changement décisif dans l’air, une réfutation de l’idéologie dix-neuvième siècle d’un Davidsson est pathétiquement dénuée de sens. Je n’ai qu’un devoir : je dois voyager, de ville en ville, et féliciter le peuple palestinien, depuis la scène où je me produis.

C’est ce que je vais faire. Aujourd’hui. Demain. Après-demain. Depuis quatre jours, c’est ce que je fais, à Istanbul. Vous l’aurez sans doute deviné : à chaque fois, tout mon public est transporté sur un petit nuage... Et je vais vous dire pourquoi : c’est parce que l’esprit de révolte de la résistance palestinienne est un esprit avec lequel les gens n’ont aucune difficulté à sympathiser.

Vous voulez savoir pourquoi ?

C’est parce que les Palestiniens sont à l’avant-poste de la guerre contre le mal.

[1] Gilad Atzmon est écrivain et musicien. il a fait des études de philosophie. Il est l’auteur de deux romans :
A Guide to the Perplexed, traduction anglaise de Philip Simpson, éditions Serpent’s Tail, Londres, 2002 (www.serpentstail.com), traduction française : Guide des Égarés, éditions Phébus, mars 2005, 192 p., 15 € ;

My one and only love, éditions SAQI, Londres, 2005 [www.saqibooks.com].

Clarinettiste et saxophoniste, il a été sacré meilleur musicien de jazz britannique de 2003 par la BBC. Né en Israël en 1963, il a quitté Israël après ses 3 ans de service militaire. Il est désormais citoyen britannique.

Avec son groupe The Orient House Ensemble, il vient de publier le CD "Musik, re-arranging the 20th Century", ENJA Records 2004.

On peut trouver les textes originaux, en anglais, de ses articles publiés ici en français, sur son site [www.gilad.co.uk]
siryne
 
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