Menu
Connexion Yabiladies Ramadan Radio Forum News
Lecture conceptuelle - complément d'introduction
*
16 février 2024 11:42
Salam à tous,

Avant de rentrer dans le vif du sujet (l’étude des termes et concepts, en arabe et en français), je voudrais compléter mon introduction en précisant les concepts de paradigme et concept. Je prendrai comme exemple le premier terme que je voulais vous proposer 3aLaMa - signer.

L’étude de ces termes sera donc intégrée à ce complément d’introduction, je ferai un article ultérieur pour ce qui est de la compréhension de al-3alamîn plus spécifiquement, tel qu’utilisé dans le texte coranique.

Je compte sur vous pour me dire si cet article suffisamment clair, moi ça me paraît un peu brouillon. N'hésitez à me poser des questions ou émettre des critiques (constructives) afin que je puisse l'améliorer.

(Je le poste en commentaire)

Lien à l'introduction: [www.yabiladi.com]



Modifié 1 fois. Dernière modification le 16/02/24 11:44 par Louve*.
*
16 février 2024 11:55
Un concept, c’est l’idée générale, la représentation abstraite d’un objet, d’un ensemble d'objets ayant des caractères communs; ou d’une idée.

Un paradigme, c’est une structure théorique de pensée, qui oriente la recherche et la réflexion. En linguistique, le paradigme est l’ensemble des dérivés d’un étymon, et cet étymon lui-même.

Le concept c’est donc la manière dont on conçoit les choses, il peut varier d’un individu à l’autre ou d’une culture à l’autre. Le paradigme quant à lui s’impose en tant que structure immuable, il cadre la conception, l’approche désignée par l’étymon.

Le concept est d’ordre idéel, le paradigme est d’ordre structurel, il dispose le champ conceptuel (dans lequel on cultive les concepts).
Nous pouvons dire, dans notre contexte, que le paradigme représente l’ensemble des formes dérivées d’un même concept, dans la morphologie des mots, mais comme dans la pensée, l'idée. Le paradigme permet de cadrer le concept, et donc de l’appréhender dans son ensemble, selon ses différentes dimensions.

Si je prends comme exemple l’idée de signer.
Si vous ouvrez un dictionnaire standard, vous trouverez cette définition:
“Signer: apposer une signature”.
Cette définition reste très superficielle car elle ne renseigne pas sur l’idée dans sa globalité, dans toutes les dimensions du concept. Cette définition reste au niveau de l’objet (la signature) et non de la pensée. Voilà pourquoi il est souvent nécessaire de se référer à l’étymologie pour bien comprendre l’idée qui anime un terme, surtout si ce dernier est inscrit dans un texte à portée spirituelle, et ce afin d’arriver là où l’Auteur veut nous conduire, en manifestant le discours sous-jacent.

Signer: Du latin signo, signare: marquer d'un signe, sceller, signaler, désigner, distinguer

Signer n’est donc pas seulement le fait d’apposer une signature, c’est avant tout le fait de marquer d’un signe, de poser une marque, un indice porteur d’un sens, d’un signifiant. Le signe est un moyen de communication, il dit quelque chose, il marque, démarque, désigne, distingue, par un symbole que le lecteur pourra recevoir et reconnaître d’une manière ou d’une autre.

Si je prends l’exemple du langage, et plus spécifiquement de l’écriture, celle-ci est composée de signes: chaque lettre est un signe qui signifie un son. Un ensemble de sons forme un mot, étant lui-même un signe qui nous renvoie à un sens donné.

Le signe s’adresse avant tout à la pensée, à la conceptualisation, et non à l’objet lui-même. Si je vous écris bouteille, vous allez tous voir une bouteille dans votre esprit, bien qu’elle ne se trouve pas concrètement devant vous. Le signe bouteille aura donc induit en vous la conception de l’objet nommé, il manifeste l’idée de la bouteille. Ainsi, apposer une signature signifie apposer un signe qui désigne la personne qui l’a signée marquant ainsi son accord, et donc renvoie à cette idée (marquer par un signe pour signifier un accord ou une identité).
C'est là le prodige à la fois du langage et de l’esprit: la faculté de transmettre et de recevoir (donc interpréter) une abstraction, si objective soit-elle.

Nous pouvons ici délimité les frontières du paradigme
- d’un point de vue sémantique par les formes dérivées de signer: désigner, assigner, consigner, enseigner, résigner, dessiner, distinguer, signaler
- d’un point de vue idéel: on retrouve dans toutes ces formes les idées de “marquer, indiquer (par un indice), signer par la forme”; “signaler, distinguer, mettre en évidence”, et “révéler, manifester, communiquer, indiquer un sens”.
*
16 février 2024 12:00
Aussi, lorsque l’on parle de polysémie propre à la langue arabe, ce n’est pas tout à fait juste, car chaque terme issu d’une même racine est en réalité relié au même paradigme. On peut, et on doit trouver l’idée qui les relie. On retrouve la même “polysémie” dans la langue française. Par exemple, on ne va pas forcément faire le lien entre signer et résigner. Il est pourtant évident, morphologiquement parlant, qu’ils sont liés et donc doivent avoir un sens commun. Si on approfondit un peu, on voit que résigner signifie clore par un signe, sceller (par un sceau). En arabe, pour rester dans le même contexte, on désigne l’univers par al-3âlam, si nous restons au point de vue objectif, de l’objet, on ne fait pas le lien avec al-3ilm, la science par exemple. Ils sont pourtant tous deux issus du même paradigme 3aLaMa, signer. Il nous faut donc comprendre le sens de ces deux termes à la lumière de ce concept: al-3âlam: le dessein, ce qui est signifié, désigner, ce qui manifeste un sens caché; al-3ilm: l’étude des signes. Vous remarquerez que nous accédons de cette manière à la pensée que sous tendent les termes. La différence entre le français et l’arabe c’est qu’en français, il y a toujours une forme lexicale (préfixes, suffixes) qui différencie les termes selon le contexte (signer, dé-signer, con-signer). Cette forme lexicale ne se retrouve pas systématiquement en arabe, le sens va donc s’articuler selon le contexte et donner une impression de polysémie (liée que fait que l'on focalise sur l'une ou l'autre dimension du paradigme), alors qu’ils sont systématiquement reliés au même paradigme, puisqu’à la même racine. La pseudo-polysémie de la langue arabe se trouve être en réalité une déficience de la connaissance de la langue française (ou autre) du traducteur.
 
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com
Facebook