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l'intuition de Umar
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24 septembre 2014 22:08
As salam alaykoum wa rahmattallah wa barakatouh

L’intuition de ‘Umar



Khâlid b. Ma`dân rapporte que `Umar b. Al-Khattâb nomma Sa`îd b. `Âmir b. Hudhaym gouverneur de la ville de Hims (Emesse, ville de Syrie). Il se rendit un jour à cette ville et dit à ses habitants : « Comment avez-vous trouvé votre gouverneur ? » Ils se mirent tous à se plaindre de lui. Ce n’était pas étonnant de leur part parce qu’ils se plaignaient toujours de leurs gouverneurs, si bien qu’on avait surnommé la ville de Hims la petite Kûfa (ville Irakienne connues pour ses dénonciations calomnieuses des gouverneurs). Ils lui dirent : « Nous lui reprochons quatre choses : la première est qu’il ne vient nous voir que tard dans la matinée. — C’est vraiment grave, dit `Umar , et quoi encore ? — Il prend de chaque mois un jour durant lequel il ne sort pas de chez lui et ne nous reçoit pas. — D’accord ! Et quoi encore ? — De temps à autre, il s’évanouit au point qu’on se dit qu’il va mourir, puis il reprend conscience. »

`Umar les confronta avec son gouverneur Sa`îd b. `Âmir. Il pria Allah de ne pas être déçu de lui, puis lui dit :

— Ces gens disent : « Il ne sort nous voir que tard dans la matinée. »

— Dieu sait qu’il me répugne d’en parler, dit Sa`îd, mais je me vois dans l’obligation de vous en donner la raison. C’est que ma femme n’a pas de domestique et pour l’aider je me charge de la préparation du pain ; je pétris la pâte, j’attends qu’elle fermente, puis je la cuis. Une fois le pain prêt, je fais mes ablutions et je sors pour les recevoir.

— De quoi vous vous plaignez encore ? demanda `Umar aux représentants des habitants de la ville.

— Il ne reçoit personne la nuit, répondirent-ils.

— Qu’en dis-tu ? demanda `Umar à Sa`îd.

— Dieu sait que je déteste en parler, mais puisque vous insistez, je vais le dire : je leur ai consacré le jour et j’ai consacré la nuit à Allah — exalté soit-Il —.

— Quoi encore ? demanda `Umar.

— Il se réserve chaque mois un jour où il ne sort pas de chez lui pour s’entretenir avec nous.

— Explique-toi, dit `Umar.

— Je n’ai pas de domestique qui me lave mes vêtements et je n’ai d’autres vêtements que ceux que je porte. Je les lave moi-même et j’attends qu’ils sèchent, puis je les porte et je sors les voir à la fin de la journée.

— De quoi vous vous plaignez encore ?

— De temps à autre, il manifeste un grand état d’affliction et il s’évanouit.

— A quoi est dû cet état ? demanda `Umar.

— J’ai assisté à l’exécution de Khubayb [1], le Compagnon médinois, à la Mecque. Les incroyants de Quraysh avaient lacéré sa peau et l’avaient attaché à un tronc d’arbre, puis lui avaient dit : « Ne souhaiterais-tu pas que Muhammad soit à ta place ? — Je ne voudrais pas me trouver dans ma maison, avec ma femme et mes enfants, si, pour cela, Muhammad devait être piqué par une seule épine » répondit-il avant de s’écrier : « Ô Muhammad ! » Chaque fois que je me rappelle ce jour-là pendant lequel j’étais un associateur et un incroyant, je me dis qu’Allah ne me pardonnera jamais le fait de ne pas l’avoir sauvé de cette situation et je m’évanouis de regret et d’affliction.

`Umar dit alors : « Quand je t’ai nommé gouverneur, j’avais l’intuition que tu étais l’homme qui convenait à ce poste et maintenant j’en suis convaincu. Qu’Allah en soit loué ! » Il lui envoya mille dinars pour l’aider à rétablir sa situation matérielle.

Quand Sa`îd apporta cette somme à sa maison, sa femme lui dit : « Nous ne pouvons que louer Allah pour nous avoir épargné la peine de te servir tout le temps (une demande implicite de lui apporter un domestique). — T’indiquerai-je une chose meilleure que ta proposition ? Nous donnerons cet argent à celui qui nous le rendra le jour où nous en aurons le plus besoin. — D’accord, acquiesça-t-elle. »

Il répartit cet argent dans plusieurs bourses, prépara une liste de veuves, de pauvres et d’handicapés, puis chargea un de ses proches digne de confiance de les distribuer. Il resta un morceau d’or qu’il donna à sa femme pour le dépenser dans ses besoins. Celle-ci lui dit : « Vas-tu nous apporter un domestique et où est parti tout cet argent ? — Cet argent te sera rendu le Jour où tu en auras le plus besoin. » [2]

_________________________

[1] L’histoire de l’exécution de Khubayb a été rapportée par un certain nombre d’historiens reconnus comme Ibn `Uqba, Ibn Ishâq, Muhammad b. `Umar, Ibn Sa`d. Des extraits de cette histoire se trouvent dans le sahîh d’Al-Bukhârî. Nous vous la citons parce qu’elle est passionnante et elle montre le courage des Compagnons et l’amour qu’ils vouent à l’Envoyé d’Allah :

Après le meurtre de Sufyân b. Khâlid b. Nabîh de la tribu de Hudhayl, les Banû Lihyân qui étaient un clan de cette même tribu voulurent se venger. Ils se rendirent chez deux petites tribus, « ‘Udal » et « Al-Qâra », descendantes elles aussi de la tribu des Hudhayl afin de leur proposer une récompense si elles leur ramenaient les Compagnons de l’Envoyé d’Allah.

Les Banû Lihyân se dirent entre eux : « Si elles nous les ramènent, nous en tuerons ce que nous voudrons tuer et nous vendrons les autres à la Mecque, car il n’y avait pas une chose plus aimable à leurs yeux que le fait d’attraper un des compagnons de Muhammad pour le tuer et mutiler son corps en vue de venger leurs morts de la bataille de Badr.

Sept membres des tribus de `Udal et d’Al-Qâra se rendirent à Médine en faisant semblant d’avoir embrassé l’Islam. Ils rencontrèrent le Prophète et lui dirent : « Envoyé d’Allah, l’Islam s’est beaucoup répandu chez nous. Envoie un groupe de tes compagnons avec nous pour nous apprendre le Coran et nous instruire dans la religion. »

Il envoya avec eux sept hommes et désigna à leur tête `Âsim b. Thâbit . Arrivés à un endroit appelé Hada’a, situé entre `Usfân et la Mecque, les membres de ces deux tribus trahirent les émissaires du Prophète . Ils avertirent de leur présence deux cents hommes de la tribu de Hudhayl, tous des tireurs. Les ayant vus, `Âsim b. Thâbit et ses compagnons se réfugièrent sur une colline dominante. L’ennemi les cerna. « Descendez, leur dirent-ils, et livrez-vous, vous avez notre engagement que personne d’entre vous ne sera tué ! » `Âsim, le chef de l’expédition, dit : « Par Allah, jamais je ne me soumettrai à l’autorité d’un mécréant », puis il invoqua Allah en ces termes : « Mon Dieu, je défends aujourd’hui Ta religion, défends mon corps ! Mon Dieu, informe Ton Prophète de ce qui nous arrive ! » Allah exauça le vœu de `Âsim en informant Son Envoyé de ce qui arriva à son expédition.

Les tireurs assaillirent le groupe de musulmans et tuèrent `Âsim et trois de ses compagnons. Quelques temps auparavant, lors de la bataille d’Uhud, `Âsim avait tué deux frères qui portaient l’étendard. La mère de ces deux combattants, Sulâfa Bint Sa`d, avait juré qu’elle boirait du vin dans le crâne de celui qui les avait tués, et les hommes de Hudhayl étaient bien décidés à lui vendre sa tête pour qu’elle puisse assouvir sa vengeance. Mais Allah exauça l’autre vœu de `Âsim en envoyant contre eux un essaim d’abeilles tel un nuage. Quand ils s’en approchèrent, les abeilles les piquèrent. Ils convinrent de le laisser jusqu’au soir pour revenir le prendre. Allah envoya le soir un torrent en crue qui l’entraîna à un endroit inconnu. Le vœu de la mère ne fut alors jamais accompli.

Quand la nouvelle à propos de `Âsim parvint à `Umar b. Al-Khattâb , il dit : « Allah béni et élevé soit-Il protège le serviteur croyant après sa mort comme Il le protégeait quand il était vivant. »

Les trois autres, à savoir Khubayb b. `Adiyy, Zayd b. Ad-Dathina et `Abd `Abd Allah b. Târiq se rendirent à l’ennemi en se fiant à sa promesse. Une fois à leur merci, les mécréants détachèrent les cordes de leurs arcs et les attachèrent. `Abd Allah b. Târiq dit : « C’est le début d’une trahison. Par Allah je ne vous suivrai pas, j’ai eu en mes compagnons qui ont été tués un si bel exemple ! » Il refusa de les accompagner. Ils le traînèrent et quand ils virent qu’il leur résistait fortement, ils le tuèrent.

Quant aux deux captifs, Khubayb et Zayd, ils furent vendus aux Qurayshites. Khubayb fut acheté par les fils d’Al-Hârith car il avait tué leur père lors de la bataille de Badr. Safwân acheta Zayd pour la même raison. Les deux hommes furent gardés en prison à la Mecque en attendant que les mois sacrés se fussent écoulés.

Le captif Khubayb emprunta un jour à la fille d’Al-Hârith b. `Amr une lame de couteau. Le bébé de celle-ci se traîna à son insu jusqu’à Khubayb qui le prit. Quand elle vit son bébé sur les genoux de Khubayb qui tenait dans sa main la lame de couteau, elle fut saisie de frayeur. Khubayb, qui s’aperçut de la réaction de la femme, lui dit : « As-tu peur que je le tue ? Par Allah, jamais je ne le ferai. Dans notre religion, la perfidie est interdite. »

Elle a dit plus tard : « Je n’ai jamais vu de prisonnier meilleur que Khubayb. Je jure l’avoir vu manger une grappe de raisins, entre ses mains enchaînées, alors qu’il n’y avait pas de fruits à la Mecque ! C’était une nourriture dont Allah l’a pourvu ! »

A la fin des mois sacrés, les deux captifs furent emmenés en dehors du territoire sacré pour être exécutés. Khubayb demanda à ses exécuteurs de le laisser accomplir la prière. Il accomplit alors deux rak`as. Ce fut lui qui inaugura la sunna selon laquelle un condamné accomplit deux rak`as avant d’être mis à mort. En l’enchaînant, ils lui dirent : « Renonce à l’Islam et nous te rendons la liberté. » Il leur répliqua : « Je ne renoncerai pas à l’Islam même si je devais recevoir en échange tous les trésors de la terre. » Abû Sufyân lui dit : « Je t’adjure au nom d’Allah de me répondre. Ne souhaiterais-tu pas que Muhammad soit à ta place et que tu te trouves bien tranquille dans ta maison ? » Il lui répondit : « Je ne voudrais pas me retrouver dans ma maison si, pour cela, Muhammad devait être piqué ne serait-ce que par une seule épine, répondit-il. »

Khubayb et Zayd furent exécutés sous les yeux d’Abû Sufyân qui ne put s’empêcher de faire la remarque suivante : « Je n’ai jamais vu de gens qui aiment quelqu’un autant que les compagnons de Muhammad aiment Muhammad. »


[2] « Safwatu-s-safwa » d’Ibn Al-Jawzî -m. 597 de l’hégire- (1/256-257), « hilyatu al-awliyâ’ wa tabaqâtu al-asfiyâ’ » d’Abû Nu`aym -m. 430 de l’hégire- (1/246) et « târîkh dimashq » (L’histoire de Damas) d’Ibn `Asâkir -m. 571 de l’hégire- (21/162).
 
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