Menu
Connexion Yabiladies Ramadan Radio Forum News
L'arrêté scélérat du 26 février 1901
X
19 mai 2011 21:30
Il y a cent dix ans fut émis le décret scélérat portant atteinte à l'orthodoxie syntaxique et grammaticale du français, prélude à d'autres attaques contre notre noble langue, dans cette entreprise concertée de faire du parler de Corneille un sabir. Le fruit des assauts répétés et coordonnés des barbares, nous goûtons son suc amère chaque jour : les jeunes parlent un patchwork indigeste, une torture auditive faite de "verlan" de mots d'argot et, horreur ! de mots d'Arabe.


Voici un extrait dudit arrêté :

" On tolérera le présent du subjonctif au lieu de l'imparfait dans les propositions subordonnées dépendant de propositions dont le verbe est au conditionnel. Exemple : il faudrait qu'il vienne ou qu'il vînt."

Le déclin est un long processus.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 19/05/11 21:31 par *Raminagrobîs*.
A
20 mai 2011 01:43
Ainsi fusse-tige-t-il?
Vrai Addition avec un dédoublement du "d" serait ad-dition, ou plutôt dériverait de 3add (compter) puisque les chiffres étaient dits arabes, avant de les naturaliser selon les écoles hindous ou perses ... Il fallasse vraiment qu'il gênasse ... lol
Le français du moyen-âge ...
La belle langue française, ne l'est devenue qu'en s'inspirant des règles grammaticales arabes, pour évoluer prendre ses distances du latin, puis recourir au grec avec les encyclopédistes ...
Il y a des coup de savates et de sabat qui trainent pour ceux qui poussent le racisme jusque dans l'argot ...
Va voir où Carlos Magnus a étudié et suivi ses cours ... Le Grand Charlemagne des écoliers ...



Modifié 1 fois. Dernière modification le 20/05/11 01:46 par Abdoualhaq.
c
20 mai 2011 07:11
la ballade des pendus (f. villon)

Frères humains qui après nous vivez
N'ayez les coeurs contre nous endurciz,
Car, se pitié de nous pauvres avez,
Dieu en aura plus tost de vous merciz.
Vous nous voyez cy attachez cinq, six
Quant de la chair, que trop avons nourrie,
Elle est pieça devoree et pourrie,
Et nous les os, devenons cendre et pouldre.
De nostre mal personne ne s'en rie :
Mais priez Dieu que tous nous veuille absouldre!

Se frères vous clamons, pas n'en devez
Avoir desdain, quoy que fusmes occiz
Par justice. Toutesfois, vous savez
Que tous hommes n'ont pas le sens rassiz;
Excusez nous, puis que sommes transis,
Envers le filz de la Vierge Marie,
Que sa grâce ne soit pour nous tarie,
Nous préservant de l'infernale fouldre.
Nous sommes mors, ame ne nous harie;
Mais priez Dieu que tous nous vueille absouldre!

La pluye nous a débuez et lavez,
Et le soleil desséchez et noirciz:
Pies, corbeaulx nous ont les yeulx cavez
Et arraché la barbe et les sourciz.
Jamais nul temps nous ne sommes assis;
Puis ça, puis la, comme le vent varie,
A son plaisir sans cesser nous charie,
Plus becquetez d'oiseaulx que dez à couldre.
Ne soyez donc de nostre confrarie;
Mais priez Dieu que tous nous vueille absouldre!

Prince Jhesus, qui sur tous a maistrie,
Garde qu'Enfer n'ait de nous seigneurie :
A luy n'avons que faire ne que souldre.
Hommes, icy n'a point de mocquerie;
Mais priez Dieu que tous nous vueille absouldre.
X
21 mai 2011 11:40
Un passage en "bon français", texte de Madame de Sévigné (sans doute la meilleure plume féminine française, avec George Sand) :

"Mlle du Plessis nous honore souvent de sa présence. Elle disait hier qu'en basse Bretagne, on faisait une chère admirable, et qu'aux noces de sa belle-soeur, on avait mangé, pour un jour, douze cents pièces de rôti. A cette exagération, nous demeurâmes tous comme des gens de pierre. Je pris courage, et lui dis "Mademoiselle, pensez-y bien; n'est-ce point douze pièces de rôti que vous voulez dire? On se trompe quelquefois. - Non, madame, c'est douze cents pièces ou onze cents. Je ne veux pas vous assurer si c'est onze ou douze, de peur de mentir; mais enfin je sais bien que c'est l'un ou l'autre" et le répéta vingt fois, en n'en voulut jamais rabattre un seul poulet. Nous trouvâmes qu'il fallait qu'ils fussent au moins trois cents piqueurs pour piquer menu, et que le lieu fût une grande prairie, où l'on eût tendu des tentes, et que, s'ils n'eussent été que cinquante, il eût fallu qu'ils eussent commencé un mois devant. Ce propos de table était bon; vous en auriez été contente. N'avez-vous point quelque exagéreuse comme celle-là?"
X
22 mai 2011 04:45
Alphonse ALLAIS (1854-1905)

Complainte amoureuse

Oui dès l'instant que je vous vis
Beauté féroce, vous me plûtes
De l'amour qu'en vos yeux je pris
Sur-le-champ vous vous aperçûtes
Ah ! Fallait-il que je vous visse
Fallait-il que vous me plussiez
Qu'ingénument je vous le disse
Qu'avec orgueil vous vous tussiez
Fallait-il que je vous aimasse
Que vous me désespérassiez
Et qu'enfin je m'opiniâtrasse
Et que je vous idolâtrasse
Pour que vous m'assassinassiez
q
22 mai 2011 19:14
Je pense au contraire qu'aller vers une simplification de l’orthographe et de la grammaire française, en limitant ses archaïsmes, ne pourrait qu'être bénéfique.
Au départ, le latin est une langue qui s’écrit comme il se prononce. Mais avec le temps, le français a changé de prononciation tout en tentant de conserver l’étymologie, le plus souvent latine, de son lexique.
Par exemple : digitum —> doigt
: campus —> champ ; camp.
: tempus —> temps
: lupus —> loup

Dans tous ces exemples, on voit que les dernières consonnes ne sont plus prononcées, mais demeurent écrites par fidélité à l'étymologie. De même que les terminaisons des verbes conjugués "ent " ; etc.

Par contre, la grammaire anglaise est bien plus simple.
Résultat ; pour maitriser sa langue, un écolier anglais aura moins d'efforts à fournir qu'un petit Français, lequel devra y passer bien plus de temps pour arriver au même résultat.
Pendant que l'anglophone pourra consacrer le temps gagné à apprendre autre chose, tel que des matières scientifiques par exemple, le Francophone s'échinera à retenir des difficultés totalement abstraites et donc inutiles.

Je ne vois pas en quoi le fait d'écrire "faloir" au lieu de "falloir" ou "sène" au lieu de "scène" nous rendrait moins intelligent

Le français c'est " pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué " !
[i]L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit.[/i] Aristote
X
22 mai 2011 20:53
Le cas de la conjugaison est différent. Écrire chariot avec un -r et charrette avec deux -r, ça ne semble pas être motivé par quoi que ce soit de "raisonnable". Ce sont des difficultés supplémentaires qui effectivement, peuvent être contre-productives.
Et je trouve le vieux français assez laid.

La concordance des temps, c'est autre chose. Nous parlons là l'un temps abandonné, l'imparfait du subjonctif. Il a une valeur littéraire certaine.

D'ailleurs, on le retrouve parfois au détour d'une phrase mais souvent à la troisième personne du singulier. C'est vrai que "assassinassiez" n'est pas de la meilleure tonalité.
c
23 mai 2011 00:05
Citation
*Raminagrobîs* a écrit:
Le cas de la conjugaison est différent. Écrire chariot avec un -r et charrette avec deux -r, ça ne semble pas être motivé par quoi que ce soit de "raisonnable". Ce sont des difficultés supplémentaires qui effectivement, peuvent être contre-productives.
Et je trouve le vieux français assez laid.

comme quoi, chacun à son opinion sur ce qu'il faudrait dépoussiérer, jeter aux poubelles. j'aime à lire en vieux francois.
mais pourquoi infliger cela à nos enfants (qui ne nous ont rien fait) ? grinning smiley
quidam a raison, il faut simplifier, rendre plus accessible la langue française. le fossé se creuse entre une jeunesse utilisant le langage sms, le sabir populaire et le francais plus littéraire. et l'anglais s'impose.
moi, ce que je demande à mes gamins, c'est de parler et d'écrire un francais correct puis l'anglais. ce sera déja bien. libre à eux ensuite d'y intégrer les "mots nouveaux", de l'argot...etc


La concordance des temps, c'est autre chose. Nous parlons là l'un temps abandonné, l'imparfait du subjonctif. Il a une valeur littéraire certaine.

certaine mais parfois voire souvent soporifique.
X
23 mai 2011 00:30
Il faut maintenir un niveau de langue de référence, sans exiger de tous qu'ils s'y conforment. Mais ce niveau de langue doit exister, comme en Arabe, qui est une langue bien conservée.
Si le français s'adapte à l'usage que l'on fait, dans quelques années, on parlera en grognant. Le niveau de langue tend à baisser et les académiciens ont raison de tirer la sonnette d'alarme. La langue est un des principaux éléments de la culture et de l'identité. Mais avec un président aussi mauvais en français, le salut ne viendra pas de la présidence :

Citation
Sarkozy a écrit:
«Quelles qu'avaient pu être avant la guerre leurs opinions, ils se batturent tous au fond pour la même idée de la liberté, la même idée de la civilisation»"]

Commémoration du 70e anniversaire de l'appel du Général de Gaulle.

Maintenant, il est claire que le subjonctif imparfait a été délaissé parce qu'il présentait quelques étrangetés.

"Vous fûtes" est déjà étrange alors "Il aurait fallu que vous fussiez", c'est du martiens pour la plupart des français. C'est bien ce français qu'il faut que vous parlassiez, que vous parlâtes même, afin que vous me montrassiez à quel point c'est laid, mais eussé-je été mieux au fait de ce mode de conjugaison, j'aurai sans doute évité quelques fautes...
C'est lourd et une erreur est vite arrivée, même quand on s'appelle Tarek Ramadan (09:40).

Le passé simple est cependant un beau temps.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 23/05/11 00:41 par *Raminagrobîs*.
A
23 mai 2011 02:18
Une langue peut-être belle par la forme, les tournures, les métaphores etc. Ce qui importe surtout c'est la construction para-synthétique, un moyen mnémo-technique permettant de retrouver la racine, de regrouper les mots dérivés, d'avoir des mécanismes de modulation du sens de la racine par le biais des préfixes et des suffixes, pour simplifier l'appréhension des termes. Je vais, nous allons .... chercher midi à quatorze heures.
Une langue doit être précise, avec la formidable explosion scientifique, génératrice de concepts et de mots nouveaux, il est nécessaire de gérer les sémantèmes d'une manière plus scientifique.
Port : porter, apporter, emporter, reporter, déporter, rapporter, supporter, importer, exporter, transporter, héliporter ... puis avec les suffixes générer des noms etc ...
Dans le domaine des mathématiques entre une relation, une fonction, une application nous parlons d'opérateurs "ressemblant" définis par des noms distincts, qui a priori devraient porter un même nom générique connoté pour les différentier entre eux, réduisant le rôle des définitions. En d'autre termes la reconstruction phono-générative (le vocable) doit permettre une régénération sémantique (le sens).
L'avenir est aux langues simples et précises portant en elles des clefs "normalisées" favorisant la reconstruction du sens.
D’après ce que l'on dit l'allemand serait précis, est-ce pour cette raison que le modèle allemand réussi relativement au français, voir les nobels ? ...
q
23 mai 2011 21:06
@ coldman

puisque tu dis aimer l’ancien français, ça m'a rappelé que j'avais une prof qui nous avait fait apprendre une récitation ; "La complainte de Rutebeuf " qui est un poème d'un célèbre poète du moyen-âge ; Rutebeuf ( vers 1230 - 1285 )

Heureusement que c'était traduit en français moderne, et le poète se demande que sont devenu ses amis perdus de vue.
On étaient bien jeunes à l'époque, on trouvaient le poème obscur et le sens nous échappaient.
C'est bien plus tard que je l'ai compris.
Merci madame Toato.


la complainte de RUTEBEUF



Que sont mes amis devenus
Que j'avais de si près tenus
Et tant aimés
Ils ont été trop clairsemés
Je crois le vent les a ôtés
L'amour est morte
Ce sont amis que vent me porte
Et il ventait devant ma porte
Les emporta

Avec le temps qu'arbre défeuille
Quand il ne reste en branche feuille
Qui n'aille à terre
Avec pauvreté qui m'atterre
Qui de partout me fait la guerre
Au temps d'hiver
Ne convient pas que vous raconte
Comment je me suis mis à honte
En quelle manière

Que sont mes amis devenus
Que j'avais de si près tenus
Et tant aimés
Ils ont été trop clairsemés
Je crois le vent les a ôtés
L'amour est morte
Le mal ne sait pas seul venir
Tout ce qui m'était à venir
M'est advenu

Pauvre sens et pauvre mémoire
M'a Dieu donné, le roi de gloire
Et pauvre rente
Et droit au cul quand bise vente
Le vent me vient, le vent m'évente
L'amour est morte
Ce sont amis que vent emporte
Et il ventait devant ma porte
Les emporta

Rutebeuf (1230-1285)
Adaptation en Français moderne
de la Griesche d'Hiver.


J'ai retrouvé des passages du texte original. A comparer...mais les strophes semblent mélangées.


Contre le temps qu'arbre desfueille,
Qu'il ne remaint en branche fueille
Que n'aut a terre,
Por povreté qui moi aterre,
Qui de toutes pars me muet guerre,
Contre l'yver,
Dont molt me sont changié li ver,
Mon dit commence trop diver
De povre estoire.
Povre sens et povre mémoire
M'a Dieu doné, li rois de gloire,
Et povre rente,
Et droit au cul, quand bise vente.
Li vent me vient, li vent m'esvente,
Et trop sovent
Plusors foïes sent le vent.
..................................................


LA COMPLAINTE RUTEBEUF

Ne covient pas que vous raconte
Comment je me suis mis à honte,
Quar bien avez ouï le conte
En quel manière,
Je pris ma fame derreniere,
Qui bele ne gente ne iere
..................................................

Li mal ne sevent seul venir :
Tout ce m'estoit a avenir
S'est avenu.
Que sont mi ami devenu
Que j'avoie si près tenu
Et tant amé ?
Je cuit qu'il sont trop cler semé :
Il ne furent pas bien semé
Si sont failli.
Itel ami m'ont mal bailli ;
C'onques tant com Dieu m'assailli
En maint costé,
N'en vis un seul en mon hoste :
Je cuit li vent les m'a osté.
L'amor est morte :
Ce sont ami que vent emporte,
Et il ventoit devant ma porte
Les emporta,
C'onques nul ne m'en conforta,
Ne du sien rien ne m'aporta.



LE MARIAGE RUTEBEUF

Ja n'i sera ma porte ouverte,
Quar ma raison est trop deserte
Et povre et gaste.
Sovent n'i a ne pain ne paste.
.....................................................
Cest ce qui plus me desconforte,
Que je n'ose entrer en ma porte
A vuide main.
Savez comment je me demain ?
L'esperance de l'endemain
Ce sont mes festes.
[i]L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit.[/i] Aristote
c
23 mai 2011 21:34
moi aussi ça me saoulait l'ancien francais lorsque j'etais jeune. ça m'est venu plus. tard. je trouve certains mots en vieux francais plus "ronds", la formulation plus éloquente.
X
24 mai 2011 22:20
Citation
Abdoualhaq a écrit:

D’après ce que l'on dit l'allemand serait précis, est-ce pour cette raison que le modèle allemand réussi relativement au français, voir les nobels ? ...

L'Allemand semble être la langue de la pensée et cette caractéristique n'est pas étrangère au la profusion de philosophes nés Outre-Rhin (les plus importants au monde, si on excepte les Grecs). Elle permet sans doute beaucoup de nuances, c'est la langue de l'esprit. La langue japonaise est une langue précise, tournée vers l'utilité. C'est une langue "technique" et fonctionnelle. L'Arabe semble être la langue de l'abstrait, d'ou peut être la richesse de sa poésie.

Les "génies" contemporains n'ont fait que capitaliser su le savoir des anciens. Leur mérite ne vaut pas celui des premiers penseurs puisque les derniers se nourrissent des premiers. Le vrai génie, ce n'est pas celui qui a inventé le pneu le plus évolué au monde. C'est celui qui il y a quelques décennies, à inventé un pneu en caoutchouc, inutilisable de nos jours.

Les philosophes vont au plus profond des choses, dépassent la limite de ce que le commun peut atteindre.
Personnellement, je reste toujours subjugué par la profondeur de pensée de certains d'entre eux. On se découvre en les lisant, ils sont uen connaissance approfondie de la nature humaine.

Mais malheureusement, la plupart d'entre eux ont une vision assez humaniste des choses, ils pensent orgueilleusement et s'attribuent le mérite de leur profondeur d'esprit. Alors qu'ils devraient mieux que quiconque, de part la connaissance qu'ils ont de l'Homme, savoir qu'aussi profond soit leur raisonnement, il ne parviendra jamais à appréhender la réalité des choses puisqu'ils dénient généralement tout élément supra-sensoriel.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 24/05/11 22:24 par *Raminagrobîs*.
X
24 mai 2011 22:21
Voici ce que disait Muhammad Iqbal (père spirituel du Pakistan) sur Nietzsche

Citation
a écrit:
La demeure du philosophe allemand Nietzsche

Partout, l'Être est en lutte avec le non-Être, et nul ne connaît le secret de cette voûte tournante. Partout la mort porte le message de la vie. Oh! Heureux l'homme qui sait ce que c'est que la mort. Partout la vie est à bon marché comme le vent, elle est instable, mais est en quête de stabilité! Mes yeux ont vu cent mondes éphémères, jusqu'à ce que mon regard parvienne aux confins de la création. Dans chaque monde, j'ai vu une autre lune et d'autres Pléiades, d'autres coutumes, d'autres formes de vie! Le temps, dans chacun de ces mondes, s'écoulait comme un flot, ici lent, là plus rapide : en un lieu notre année équivalait à un mois, dans un autre, à un instant; ce qui était beaucoup en un monde était peu dans un autre. Notre esprit, dans un monde, était plein de talents, dans un autre monde, humble et méprisé !

Aux confins de ce monde contingent, se trouvait un homme à la voix pleine de passion : son regard était plus perçant que celui de l'aigle, son visage trahissait la passion qui embrasait son coeur. A chaque instant augmentait la fièvre dans son sein, et il avait sur les lèvres un vers qu'il répétait sans cesse : « Ni Gabriel, ni paradis, ni houri, ni Dieu, seulement une poignée de terre brûlée du désir du coeur! »

Je dis à Rûmî : « Qui est ce fou? » Il répondit : « C'est un sage allemand. Il se tient entre deux mondes; le chant de sa flûte est un chant antique. Cet Hallâj sans corde et sans gibet redisait de nouveau et différemment des paroles anciennes. Ses paroles étaient audacieuses et ses pensées élevées; les Occidentaux furent coupés en deux par le glaive de ses discours! Il ne trouva aucun compagnon dans ses extases : il était ivre de Dieu, on le prit pour un fou! Les intellectuels ne connaissent rien à l'amour et à l'ivresse ils le remirent aux mains des médecins. Chez ces derniers, il n'y a que fraude et qu'hypocrisie : malheur à l'homme ivre de Dieu qui naît en Europe! Avicenne ne tient compte que des traitements donnés dans les livres : on te perce une veine ou bien l'on te donne une pilule somnifère.

Nietzsche fut un Hallâj étranger à sa propre patrie; il échappa aux mollahs, mais les médecins le tuèrent!

Il n'y avait pas en Europe d'homme connaissant la Voie mystique; or, sa mélodie était trop puissante pour les cordes de son luth. Personne n'indiqua le chemin à ce voyageur, et cent accidents lui arrivèrent en cours de route. Il était une monnaie, et personne n'en fit l'essai; il était un théoricien de l'action, et personne n'en fit un homme d'action. Un amant qui se perd dans ses propres soupirs, un voyageur qui s'égare sur son propre chemin! Son ivresse brisa tous les flacons, il s'arracha de Dieu et à la fin de lui-même. Il voulait percevoir avec son oeil extérieur l'union de la Beauté et de la Puissance. Il voulait que jaillit de l'eau et de la terre ce fruit qui ne peut être produit que par le coeur seul.

Ce qu'il cherchait, c'est le Degré de la Majesté divine, et ce niveau est au delà de la raison et de la sagesse. La vie est le commentaire des mystères du « Soi », Lâ et Illâ sont des étapes du Soi. Il s'arrêta au Lâ et ne parvint pas au Illâ, il disparut sans avoir compris le sens de « Serviteur de Dieu ». Embrassant les manifestations de Dieu, et pourtant en étant ignorant, comme le fruit est loin de la racine de l'arbre. Son oeil ne voulait voir que l'homme, et son cri audacieux était : « Où est l'Homme? » Sinon, il aurait éprouvé de la répugnance pour les êtres terrestres, et comme Moïse, il aurait aspiré à la Vision de Dieu ! Oh! S’il avait pu vivre au temps de Ahmad, afin de parvenir à la Joie éternelle! Sa raison était en discussion constante avec son Moi. Toi, suis ta propre route, car cette route est la Répondre Citer Alerter un modérateur
meilleure. Avance maintenant, car voici un lieu où naissent les discours sans paroles.
 
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com
Facebook