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Jour de fête à Hébron
28 novembre 2008 20:48
Colons et soldats israéliens de toutes origines, visiteurs américains et français exhibant leurs fusils : des Juifs célèbrent la fête de Sarah à Hébron. En dépit de ces démonstrations de force, la cité n’en est pas moins palestinienne.

Ce samedi, les membres de la famille Pachao se promènent dans les rues d’Hébron. Sarah et Yossef sont accompagnés de leurs enfants. Pourquoi ont-ils choisi de venir habiter ici ? Quand je pose cette question aux Pachao, Yossef, le père de famille, me répond : “Pour le bon air.” De type asiatique et la peau sombre, les Pachao sont venus habiter à Kiryat-Arba [colonie urbaine voisine d’Hébron et foyer ultranationaliste juif] il y a dix ans. Originaires d’un village indien situé à la frontière du Myanmar, ils appartiennent à la communauté indienne des Bnei Menashé [Fils de Manassé].

Ils reviennent de la prière organisée au tombeau des Patriarches à l’occasion de la fête de Hayei Sarah [la Vie de Sarah, épouse d’Abraham]. Avec plusieurs milliers d’autres Juifs, ils ont envahi les routes, interdites pour l’occasion à la circulation automobile. L’apparence asiatique de cette famille aux kippas blanches vissées sur les têtes n’est pas l’image la plus insolite que l’on puisse voir sur le “chemin des pénitents” tracé entre Kiryat-Arba et Hébron et menant à la “maison de la paix”, nom ironiquement donné à la “maison de la querelle” [maison palestinienne que les colons affirment avoir achetée alors que la justice israélienne déclare illégale cette transaction], vers laquelle tous convergent.

Un mini-Woodstock face au tombeau des Patriarches

Un étranger qui se retrouverait transplanté à Hébron aurait bien du mal à y retrouver ses petits. Des gardes-frontière qui discutent en amharique [langue des Juifs éthiopiens] avec des colons. Leurs collègues druzes qui bavardent entre eux en arabe. Des soldats, des policiers et des gardes-frontière qui prient ensemble, entassés autour du caveau d’Abraham. Des Juifs américains et français venus armés de leurs fusils-mitrailleurs. Une mer de chapiteaux qui, en une sorte de mini-Woodstock, submerge la pelouse face au tombeau des Patriarches. Un mélange inimaginable de langues et autant de femmes qui ont pris possession des tentes pour y prier. Et, pour couronner le tout, la vision tout aussi délirante d’un quartier palestinien à l’abandon, vidé de la plupart de ses habitants originels, lieu d’un transfert par excellence, une ville morte dont les fantômes n’ont plus que leurs larmes pour pleurer.

Parfois, un habitant effrayé, rescapé du quartier palestinien, traverse à la hâte la rue voisine, gardant pour lui la rage qui lui dévore le cœur. A travers le grillage tendu au-dessus de la rue pour protéger les passants des pierres jetées par les colons, on repère parfois le visage livide d’une vieille femme pétrifiée par la peur, d’un enfant apeuré ou d’un adulte gorgé d’amertume, tous emprisonnés dans leur cage. Il n’est pas difficile d’imaginer ce que peuvent ressentir ces Palestiniens en ce samedi où les juifs célèbrent la fête de Hayei Sarah.

Kremschnitt” [Tranche à la crème] patrouille dans sa voiture. Le célèbre chef de la police d’Hébron s’arrête pour dire bonjour. Ainsi donc, même la casquette ridicule qui me masque à moitié le visage pour que les colons ne me reconnaissent pas n’a servi à rien. Il ne fait pas bon s’appeler Gidéon Lévy un soir de fête à Hébron. “Ramasse ta merde et fiche le camp d’ici”, me crient ici et là des voyous qui, ce soir, feront la loi dans les vieilles rues. J’entre enfin dans la “maison de la querelle”, un vaste immeuble inachevé d’appartements qui appartient à des Palestiniens [mais dont se sont emparés les colons]. Ce samedi, c’est une maison pilote, opération “portes ouvertes” en quelque sorte. Avec un appartement modèle un peu sordide : un papier plaqué sur la porte de bois indique “Famille Levinger” [les fondateurs de la colonie d’Hébron]. Entassés et attablés sous des chapiteaux dressés sur le toit, des groupes d’invités peuvent admirer le miracle de la dépossession. Au pied de l’immeuble, on peut lire : “Un Juif n’achète qu’à des Juifs”. Ou, plus poétique : “La Cour suprême, c’est Sodome” ou “Il faut tuer les Arabes”.

Un charretier palestinien posté à côté d’un barrage militaire ramasse les croûtes de pain jetées au sol par les milliers de soldats postés sur les toits de la vieille ville pour protéger les colons. Tout à coup, à 14 h 15 précises, une clameur immense vient recouvrir toute cette agitation. Les muezzins d’Hébron appellent à la prière de l’après-midi et rappellent ainsi qu’Hébron est pour toujours et à jamais palestinienne.

Gidéon Lévy
Ha'Aretz

Source : [www.courrierint.com]
L
28 novembre 2008 22:42
Une impression de surréalisme
c'est la fête, youppi ! Cela ressemble a la phrase culte (sur un air désabusé)
"on vit une époque formidable"
 
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