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Une jeunesse belle et mobilisable
b
6 juillet 2005 19:28
ou quand le journal hebdo sourit...

[www.lejournal-hebdo.com]

Une jeunesse belle et mobilisable

Huitième édition et toujours la même question : comment des centaines de milliers de jeunes venus de tous les coins du royaume s'approprient, quatre jours durant, les rues, y chantent, y dansent sans que la moindre vitre ne soit cassée, de bagarres déclarées ou encore de pneus crevés ? Cette même jeunesse qualifiée il n'y a pas si longtemps d'Apaches, et dont finalement aujourd'hui, on sait peu de choses tant personne ne prend la peine de s'y intéresser.
Les stéréotypes ont fini par remplacer l'analyse. Raccourci facile qui alimente le discours de ceux qui prônent l'immaturité ou même la sauvagerie du peuple pour agiter les vieux démons. Pourtant, s'il n'y avait qu'une seule chose à retenir du Festival d'Essaouira, ce serait bien celle-là : notre jeunesse est belle.

Le propos peut sembler naïf, mais il est le seul à traduire l'émotion que l'on ressent lorsque l'on est plongé dans cette foule ondulant des nuits entières sur les rythmes saccadés des « qraqrebs » gnaouis. Magie à mettre sur le compte de cette musique aux effluves mystiques ? Ce serait simpliste.
Le succès du festival est à chercher ailleurs. Dans les ingrédients de la potion magique souirie, il y en a un éminemment politique. Le festival est un vrai festival populaire. L'invité d'honneur, c'est la rue.

Alors, en quittant le festival d'Essaouira, on se prend à rêver : à imaginer que nos dirigeants comprennent que notre jeunesse ne demande qu'à être mobilisée, qu'elle a tout à donner à celui qui saura la respecter.

b
6 juillet 2005 19:30
et ca aussi.

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Essaouira
Nuits magiques
La 8ème édition du Festival d'Essaouira, qui s'est tenue du 23 au 26 juin dernier, fut incontestablement la plus aboutie des éditions.



Mine de rien, le Festival d'Essaouira Gnaoua et Musiques du Monde présente tout de même pas mal d'inconvénients : il ne dure que quatre jours quand une semaine au moins aurait été nécessaire pour décharger ses accus et venir à bout d'une programmation riche et éclectique. Il demande un don certain d'ubiquité pour assister aux différentes rencontres musicales qui sont toutes un must et se chevauchent malheureusement souvent. Enfin, les crabes, vendus sur des étals qui fleurent toujours aussi bon la brise marine, restent désespérément vides et toujours hors de prix. Quant au reste, cette 8ème édition du Festival d'Essaouira ne fut assurément que du bonheur et, ayant acquis l'âge de la maturité, se pose d'ores et déjà comme la plus belle et la plus aboutie des éditions.

Populairement d'abord : les organisateurs parlent de 450 000 visiteurs, soit un peu plus que l'édition précédente, bien qu'il semblât à beaucoup qu'il y avait moins de monde que d'habitude, que l'on se marchait moins sur les pieds en tout cas. Quelle que soit la vérité, il est acquis que le festival attire aujourd'hui davantage de puristes et d'amoureux de la fusion, au détriment de simples curieux qui ont dû se lasser depuis huit années maintenant. Et en ce sens, le festival est une parfaite réussite, un peu à l'image de ce que souhaitait sa directrice Neyla Tazi, qui reconnaissait volontiers que son bébé ne pouvait plus grossir davantage en nombre, et qu'il se devait surtout d'affiner sa programmation artistique jusqu'à en tirer sa quintessence.


Rencontres exceptionnelles

Artistiquement ensuite : à l'instar des éditions précédentes, les rencontres entre les gnaoua et les musiciens World (voire ces derniers entre eux) goupillées par les trois directeurs artistiques, Karim Ziad, Loy Ehrlich et Abdeslam Alikane, furent d'un niveau de fusion quasi parfait, souvent transcendental, suffisamment bien travaillées pour surprendre un public et des journalistes bien exigeants. A ce propos, la nouveauté résidera surtout dans la récurrence des rencontres réussies, offrant si peu de déchets qu'elles semblent avoir été longtemps écrites à l'avance, quelque part, sous une voûte céleste.
Dès le premier jour, la main de Dieu semblait s'être penchée sur cette 8ème édition, qui démarrait en douceur ce jeudi 23 juin sous un soleil brûlant et sans ce vent légendaire qui fait tout le charme et la réputation d'Essaouira. Un calme étrange enrobait la cité avant que le plus emblématique des jeunes maâlems, Hamid El Kasri, accompagné de ses congénères, Abdelkabir Merchane et Abdeslam Alikane, mais aussi de plusieurs musiciens World, n'entonne les premières notes du concert d'ouverture.

Journalistes, habitués de la manifestation et simples festivaliers savent de suite que cette édition sera particulière, électrisante. Certes, tout n'est pas parfait, et ne saurait de toutes les manières le devenir un jour.
Il y aura toujours des imbéciles qui voudront intégrer un espace badgé sans badge, et une fois à l'intérieur, réaliser qu'on n'y vit pas mieux le festival. Et il y aura toujours des râleurs pour se plaindre de tout, car tel est le secret d'un festival réussi : un joyeux bordel organisé où l'on prend un maximum de plaisir à chaque coin de rue, devant chaque concert, on, off, improvisé…Et du plaisir, il y en eut un paquet, notamment lors de cette rencontre exceptionnelle qui, a priori, ne payait pas de mine, mais se révèla comme l'une des plus belles (sinon la…) du festival.

Jeudi soir, à Dar Souiri, la petite cour intérieure est noire de monde. Deux artistes, un homme et une femme, Ellika et Solo, une violoniste suédoise et un griot sénégalais portant fièrement sa kora, ont métissé leur héritage musical et offert la plus belle fusion des âmes, des instruments et des cultures à un public médusé qui n'aurait jamais cru l'improbable rencontre, possible. Un grand moment du festival qui se répètera à l'infini, au gré des concerts disséminés ici et là à travers Mogador, baignant dans des rythmes lancinants de qraqebs, guembris et autres percus. Certes, Bozilo fit, en milieu de soirée, étalage de son joli jazz mâtiné d'influences diverses, notamment Balkanes et Thalweg fit voyager le public vers les chaleurs kabyles dont on ne sort pas indemne. Le tout comme une promesse de lendemains enchanteurs…qui le furent effectivement.
Vendredi fut peut-être la journée la plus intense (musicalement parlant) du festival. On y découvrit les sonorités indiennes du groupe de flamenco, Jaleo, qui gratifia l'assistance, lors de sa rencontre avec le génial maâlem Hamid El Kasri, d'une reprise originale de son titre-phare, « Hamdouchia », dont on garde encore la chair de poule. Rif Gnawa, jeune groupe marocain, perdit un peu pied lors de son concert sur la place Moulay Hassan en début de soirée, et Daniel Waro, Réunionnais et superbe représentant de la culture maloya (ou culture de la rébellion), se chargea de rétablir l'équilibre lors de son superbe concert acoustique. Sans fards ni artifices, juste par la grâce d'une voix pure et puissante, il fit à son tour chavirer Dar Souiri qui menait à ce moment-là deux réussites à zéro face à son « concurrent », Chez Kébir. Et puisqu'il faut le plus subjectivement du monde choisir son favori ce jour-là, c'est tout naturellement qu'on jettera notre dévolu sur l'hommage à Abderrahmane Paca rendu par le Groupe Paca et ses invités, Omar Essayed des Nass El Ghiwane, Mohamed Derham des Jil Jilala et Essousdi des Lemchaheb. Mené par Younès Paca, talent insolent et fils de son père aujourd'hui bien malade, le groupe gratifia une large assistance des plus belles chansons des Nass El Ghiwane, de celles qui ont déjà rejoint le panthéon des classiques marocains.

Sirènes musicales

Nous sommes au cœur du festival. La mayonnaise a déjà pris et à mi-chemin, le cahier des charges largement rempli. Tout ce qui arrivera désormais ne sera que du bonus, et quel bonus ! Que celui qui n'a jamais succombé aux sirènes musicales de Naïny Diabaté, griotte mandingue charismatique et hyper chaleureuse, à la voix surpuissante et au charme dévastateur, fasse son mea culpa. Son concert, suivi de celui du maâlem Mahmoud Guinéa, sont venus faire écho à la rencontre aboutie entre les Tyour Gnaoua, Ellika et Solo, Roger Biwandu et Etienne M'Bappé, une heure auparavant. Le rythme est donné et tout le monde s'y tient peu ou prou. Pas de fausse note, ni musicale ni organisationnelle, tout le monde se tient à carreau et les policiers, rameutés de Casablanca, se plaisent à rêver à voix haute d'une mutation dans cette ville calme qu'est Essaouira. Un calme perturbé en milieu de journée par les chants à capella du jeune groupe kénitri, Midnight Shems, qui a véritablement secoué un jeune public séduit par tant de fraîcheur et de talent à la marocaine. La veille, la sélection junior marocaine venait à bout de son homologue italienne en quart de finale de coupe du monde.

La fête pouvait être complète. Elle le sera le lendemain, dimanche, avec le concert de clôture de Youssou N'Dour, icône mondiale de la World, demi-dieu au Sénégal et véritable bête de scène, qui a gratifié une foule en délire d'un concert de clôture de folie. Un peu avant, Darga, jeune groupe marocain en devenir, ouvrait le bal sans panache mais sans se louper non plus, dégageant par trop ce sentiment de prétention en totale dichotomie avec la notion de groupe, pour séduire. A titre de comparaison, Hoba Hoba Spirit explosait la baraque deux ans plus tôt dans un même registre, se posant de fait comme les véritables hérauts contemporains de la nouvelle scène marocaine. Pas grave, cette 8ème édition avait déjà réussi son pari et se posait, définitivement, comme l'édition la plus aboutie de son histoire. Trop peu aidés eu égard au retentissement de la manifestation dans le monde, les pointures du festival devront néanmoins cravacher dur pour maintenir le niveau.



 
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