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Les formes et le langage du theatre
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22 août 2014 09:10
Comparez ces scènes d'exposition: quelles informations nous donnent-elles sur les personnages et le lieu de l'action? Comment le thème de l'amitié est-il traite dans chaque extrait?

Texte 1
La scène est a Paris ...

PHILINTE Qu'est-ce donc? Qu'avez-vous?
ALCESTE Laissez-moi, je vous prie.
PHILINTE Mais encor, dites-moi, quelle bizarrerie ...
ALCESTE Laissez-moi la, vous dis-je, et courez vous cachez .
PHILINTE Mais on entend les gens, au moins, sans se fâcher.
ALCESTE Moi, je veux me fâcher, et ne veux point entendre.
PHILINTE Dans vos brusques chagrins je ne puis vous comprendre,
Et quoique amis enfin, je suis tout des premiers ...

ALCESTE,se levant brusquement.
Moi, votre ami? Rayez cela de vos papiers.
J'ai fait jusques ici profession de l'être ;
Mais après ce qu'en vous je viens e voir paraître,
Je vous déclare net que je ne le suis plus,
Et ne veux nulle place en des coeurs corrompus.

PHILINTE Je suis donc bien coupable, Alceste, a votre compte?
ALCESTE Allez, vous devriez mourir de pure honte ;
Une telle action ne saurait s'excuser,
Et tout homme d'honneur s'en doit scandaliser.
Je vous vois accabler un homme de caresses,
Et témoigner pour lui les dernières tendresses ;
De protestations, d'offres et de serments,
Vous chargez la fureur de vos embrassements ;
Et quand je vous demande après quel est cet homme,
A peine pouvez-vous dire comme il se nomme ;
Votre chaleur pour lui tombe en vous séparant,
Et vous me le traitez, a moi, d'indifférent .
Morbleu ! c'est une chose indigne, lâche, infâme,
De s'abaisser ainsi jusqu'à trahir son âme ;
Et si, par un malheur, j'en avais fait autant,
Je m'irais, de regret, pendre tout a l'instant .
Moliere, Le Misanthrope, I, 1 (1666)

1 . Pourquoi Alceste est-il en colère? Comment cette colère se manifeste-t-elle dans le dialogue?
Quels gestes et quels déplacements du personnage peut-on imaginer sur la scène?
2 . Quel procède caractéristique d'une dispute apparaît au début de la scène? Quelles différences peut-on observer entre Philinte et Alceste?
3 . Commentez les différences de longueur des répliques dans cet extrait .

Texte 2
La scène est a Naples ...

Une rue devant la maison de Claudio . [. . .]
COELIO, rentrant . - Malheur a celui qui, au milieu de la jeunesse, s'abandonne a un amour
sans espoir ! Malheur a celui qui se livre a une douce rêverie, avant de savoir ou sa chimère
le mène, et s'il peut être paye de retour ! Mollement couché dans une barque, il s'éloigne
peu a peu de la rive ; il aperçoit au loin des plaines enchantées, de vertes prairies et le
mirage léger de son Eldorado . Les vents l'entraînent en silence, et quand la réalité le
réveille, il est aussi loin du but ou il aspire que du rivage qu'il a quitte ; il ne peut plus ni
poursuivre sa route ni revenir sur ses pas . (On entend un bruit d'instruments.) Quelle est cette
mascarade? N'est-ce pas Octave que j'aperçois? (Entre Octave.)
OCTAVE. - Comment se porte, mon bon monsieur, cette gracieuse mélancolie?
COELIO. - Octave ! o fou que tu es ! tu as un pied de rouge sur les joues ! - D'ou te vient
cet accoutrement? N'as-tu pas de honte en plein jour ?
OCTAVE. - O Coelio ! fou que tu es ! tu as un pied de blanc sur les joues ! - D'ou te vient
ce large habit noir? N'as-tu pas de honte en plein carnaval ?
COELIO. - Quelle vie que la tienne ! Ou tu es gris, ou je suis moi-même.
OCTAVE. - Ou tu es amoureux, ou je le suis moi-même.
COELIO. - Plus que jamais de la belle Marianne.
OCTAVE. - Plus que jamais de vin de Chypre.
COELIO. - J'allais chez toi quand je t'ai rencontré .
OCTAVE. - Et moi aussi j'allais chez moi. Comment se porte ma maison? Il y a huit huit jours
que je ne l'ai vue.
COELIO. - J'ai un service a te demander.
OCTAVE. - Parle, Coelio, mon cher enfant . Veux-tu de l'argent? Je n'en ai plus. Veux-tu
des conseils? Je suis ivre. Veux-tu mon épée, voila une batte d'arlequin. Parle, parle,
dispose de moi.
COELIO. - Combien de temps cela durera-t-il? Huit jours hors de chez toi ! Tu te tueras,
Octave.
OCTAVE. - Jamais de ma propre main, mon ami, jamais ; j'aimerais mieux mourir que
d'attenter a mes jours.
Alfred de Musset, Les Caprices de Marianne, I, 1 (1833)

1. Quelles sont les deux parties principales de cet extrait? Quel est le registre dominant de chaque
partie?
2 . Quel contraste peut-on observer entre Coelio et Octave? Comment Octave souligne-t-il ce
contraste? Relevez les jeux sur les mots qui permettent de passer d'une réplique a l'autre.
3 . Les renseignements principaux sur les personnages nous sont-ils donnés par le texte prononcé ou
par les didascalies (le texte en italique) ?

Texte 3

Route a la campagne, avec arbre.
Soir.
Estragon, assis sur une pierre, essaie d'enlever sa chaussure. Il s'y acharne des deux mains, en
ahanant . Il s'arrête, a bout de forces, se repose en haletant, recommence. Même jeu.
Entre Vladimir.
ESTRAGON (renonçant a nouveau). - Rien a faire.
VLADIMIR (s'approchant a petits pas raides, les jambes écartées). - Je commence a le croire.
(Il s'immobilise.) J'ai longtemps résisté a cette pensée, en me disant, Vladimir, sois raison-
nable, tu n'as pas encore tout essayé. Et je reprenais le combat . (Il se recueille, songeant au
combat . A Estragon.) - Alors, te revoilà, toi.
ESTRAGON. - Tu crois?
VLADIMIR. - Je suis content de te revoir. Je te croyais parti pour toujours.
ESTRAGON. - Moi aussi.
VLADIMIR. - Que faire pour fêter cette réunion? (Il réfléchit.) Lève-toi que je t'embrasse.
(Il tend la main a Estragon.)
ESTRAGON (avec irritation). - Tout a l'heure, tout a l'heure .
silence.
VLADIMIR (froissé, froidement). - Peut-on savoir ou monsieur a passé la nuit?
ESTRAGON. - Dans un fossé .
VLADIMIR (épaté). - Un fossé ! ou ça ?
ESTRAGON (sans geste). - Par la.
VLADIMIR. - Et on ne t'a pas battu?
ESTRAGON. - Si . . . Pas trop.
Samuel Beckett. En attendant Godot, I (Editions de Minuit, 1952).

1 . Sur quel malentendu est fondé l'enchaînement des deux premières répliques?
2 . Cet extrait vous parait-il remplir le rôle informatif d'une scène d'exploration?
3 . Définissez le ou les registres présents dans ce dialogue.
 
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