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Les évènements en France : les points de vue des autres pays
13 novembre 2005 11:05
VU DE PRAGUE


"La France a toujours été fière de sa politique d'intégration des immigrés et aimait la donner en exemple aux autres", rappelle Mlada Fronta Dnes. Or, depuis quelques jours, "il n'en reste que des carcasses de voitures brûlées, des ossements de magasins et des tas de cendres. D'un côté de la barricade (aujourd'hui réelle), la fameuse politique d'intégration des gouvernements successifs, de l'autre, la réalité : une discrimination raciale cachée à l'égard des immigrés d'Afrique et d'autres coins du monde. Mais, qui plus est, à l'égard de leurs descendants. Pour beaucoup d'entre eux, la carte d'identité nationale ne suffit pas pour garantir les mêmes chances devant le travail et le logement. Le cercle vicieux où l'individu sans travail s'appauvrit et devient frustré se met vite en place. Il est chassé vers les quartiers plus pauvres qui deviennent des ghettos. La situation provoque des tensions et mène aux extrémismes. De là il n'y a qu'un pas pour mettre le feu aux voitures", estime le journal tchèque.


"Pourtant, c'est depuis des années que la France se débat dans le marasme d'une crise sociale alors que tous, les hommes politiques et les citoyens, refusent les réformes nécessaires, leur immobilisme freinant les autres pays de l'UE. Ils refusent, même si leur modèle d'Etat social, impossible à financer, menace de conduire un jour le pays à la catastrophe. Ce jour-là, ce ne seront pas seulement les enfants d'immigrés qui mettront le feu aux voitures, mais tous."

"En plus, dans la crise actuelle, les hommes politiques français ont montré un bel exemple de conduite chaotique et ont failli totalement. Nicolas Sarkozy, ministre de l'Intérieur et candidat présidentiel, a taxé les émeutiers de 'racaille' et essuie l'accusation de racisme. Le Premier ministre Dominique de Villepin (qui veut aussi être président) s'est tu pendant cinq jours pour laisser son concurrent mijoter dans son jus, tandis que le chef de l'Etat tardait d'une manière inadmissible à appeler au calme. Le résultat - la lumière des flammes - nous le voyons chaque nuit."

"Ce qui est malheureusement sûr, c'est que tout pays européen ou les Etats-Unis d'Amérique peuvent demain être confrontés à la même situation. Les problèmes qui, en France, ont surgi des coulisses et l'incapacité des politiciens d'y apporter une réponse devraient nous servir de leçon. Mais il n'en sera rien. Ni en France ni ailleurs."

13 novembre 2005 11:09
VU D'ESPAGNE

La France, ce pays qui bouge à coups de révoltes

"Si l'ouragan Katrina a montré la marginalisation de la population noire de La Nouvelle-Orléans, ces affrontements ont mis en évidence la profonde fracture sociale française", estime El País. "Et il ne sert à rien de chercher des réseaux criminels pour expliquer le mouvement qui a débuté dans une banlieue de Paris et s'est répandu comme une traînée de poudre", assure le quotidien espagnol. "Le président Chirac ne s'est pas remis du non à la Constitution européenne et l'ambiance de fin de régime a alimenté la crise vécue ces derniers jours. Chirac a eu besoin de dix jours pour lancer son appel au rétablissement de 'l'ordre républicain'. En France, un pays qui bouge à coups de révoltes, on sait comment les choses commencent mais jamais comment elles se terminent. Une minorité rebelle hors de contrôle peut changer le cours de son histoire.
13 novembre 2005 11:10
VU DU PORTUGAL

De mai 1968 à novembre 2005

Si le Diário de Notícias refuse d'employer l'expression "petite guerre civile", déjà utilisée ça et là dans la presse internationale à propos des émeutes qui secouent la France, le quotidien lisboète les considère en revanche comme "une annonce des confrontations sociales futures qui guettent toutes les grandes villes européennes". "La violence s'est déjà propagée à de nombreuses villes françaises", rappelle l'éditorialiste, et bientôt des "répliques se feront sentir un peu partout en Europe. Seul un aveugle ne peut pas voir la mèche du baril de poudre en train de brûler." Pour lui, ce "novembre français pourrait bien avoir la force de contagion de Mai 68. Ce qu'on a fabriqué autour de Lisbonne n'a rien à envier à la banlieue parisienne."
13 novembre 2005 11:10
VU D'ARGENTINE

Les blogs et la rage

"En ces jours de furie à Paris, alors que des centaines de voitures s'enflamment chaque nuit, les blogs se multiplient sur Internet, dans un phénomène qui évoque les gazettes de l'époque de la Révolution française de 1789", note le quotidien argentin Clarín. "Autrefois, les feuilles manuscrites visaient à rassembler toutes les volontés derrière un seul homme. Aujourd'hui, les blogs agissent comme lieux de discussion et d'organisation entre protestataires, mais ne servent pas à désigner un leader. Les identités de ceux qui écrivent ces pages restent très obscures", remarque le journal de Buenos Aires.
13 novembre 2005 11:11
VU D'ALLEMAGNE

Le poids des mots, le choc des ghettos

Non, le modèle d'intégration français n'est pas mort, estime la Frankfurter Allgemeine Zeitung, qui consacre un dossier spécial aux émeutes dans les banlieues. Mais l'ambition républicaine mériterait que les gouvernants fassent preuve d'un doigté et d'un discernement qui leur font défaut aujourd'hui :

"Le modèle d'intégration sociale qui est au cœur de la République française est-il en phase terminale ? Il y a deux ans seulement, le débat sur le foulard avait, dans une espèce d'acte rituel, renforcé les fondements de la République et réaffirmé ce qui en Allemagne est défini par le concept malheureux de Leitkultur [culture dominante] : ici, ce qui est commun ; là, ce qui sépare ; et, entre les deux, les règles impératives de la vie en commun. Et voilà que les affrontements repartent de plus belle et d'un tout autre côté que celui d'excités musulmans ou d'obscurs groupes terroristes. Ce qui doit alarmer dans cette affaire, c'est que les actes de violence spontanés, incendies de voitures et bris de vitres, qui se sont étendus à d'autres banlieues parisiennes quelques nuits après Clichy, n'ont rien de nouveau, mais reviennent périodiquement depuis quinze ans. L'Etat, qui possède en théorie le meilleur concept pour faire vivre une société pluriculturelle, ne maîtrise pas la réalité, qu'il soit gouverné par la gauche ou par la droite."

"Le problème, c'est la gestion des symboles. Et la symbolique commence par le choix des mots. Tous les troubles qui se sont produits dernièrement sont associés à une série de glissements sémantiques. L'été dernier, à la suite d'un incident tragique entre habitants de la banlieue, Sarkozy, le ministre de l'Intérieur, avait déclaré vouloir nettoyer la banlieue de la violence 'au Kärcher' et offert ainsi à cette marque d'appareils de nettoyage une place inespérée dans le vocabulaire politique. Cela fut perçu dans le pays avec plus d'amusement que de contrariété – ce sont les taches, pas les gens, qu'on enlève avec cet engin. Mais, quand le même ministre a été insulté par des jeunes alors qu'il visitait un commissariat [fin octobre], sa réaction n'a plus évoqué la saleté mais les personnes. Sarkozy a promis aux habitants du quartier de les débarrasser de ces 'voyous' et de cette 'racaille', et leurs propres enfants étaient compris dans le lot."

"Ces mots ne sont pas directement responsables des troubles actuels. Ceux-ci sont l'escalade d'une guerre des nerfs qui oppose quotidiennement de petites bandes de jeunes à la police depuis le jour où deux adolescents ont trouvé la mort dans des circonstances encore non éclaircies. On ne peut cependant séparer les mots et les événements dans l'écho qu'ils rencontrent tous deux dans les médias. La disproportion des mots de Sarkozy provoque un malaise jusque dans l'électorat conservateur. Il faut du doigté pour tenir un discours énergique en politique. L'un des prédécesseurs de Sarkozy, Jean-Pierre Chevènement, avait il y a des années employé dans des circonstances comparables le mot 'sauvageons', qui fait penser à des sauvages, mais il avait immédiatement précisé la définition exacte du terme : pousse non greffée qui produit peu de fruits. Les expressions inconsidérées de Sarkozy ont fait sortir les vandales des banlieues pour les replacer soudain où ils le voulaient – dans les médias."

"S'ils s'en prennent de préférence aux véhicules de la police et des pompiers, aux bureaux de poste et éventuellement aux écoles, ce n'est pas par une haine de l'Etat politiquement formulée. C'est plutôt le prix que la République doit payer pour son omniprésence fièrement proclamée, et parfois uniquement affirmée, dans tous les domaines de la vie. Les fauteurs de troubles ont besoin d'un gros adversaire, pas seulement de quelques unités de police, pour y projeter comme sur un écran leur frustration active. La mise en place d'une police de proximité et d'autres mesures ont depuis quelques années tellement rapproché l'Etat de la réalité des banlieues que cette surface de projection s'est considérablement réduite. En optant pour la confrontation verbale, Sarkozy lui a redonné une importance et elle se couvre de lettres de feu toutes les nuits."

"Le pays prend les choses sans panique mais avec inquiétude. Le modèle français d'intégration n'a pas échoué, il paie toutefois un lourd tribut à une ambition qui souhaite l'égalité dans tout le pays, mais crée parfois de l'inégalité dans certains quartiers. Certains ont presque été soulagés d'apprendre que, dans un quartier, ce n'étaient pas seulement les lieux institutionnels qui avaient été incendiés mais aussi un café. C'était pour eux un indice que la tempête politique allait peut-être bientôt s'apaiser et que les événements à venir pourraient être classés dans la rubrique de la délinquance ordinaire. L'Etat doit cependant agir avec plus de discernement pour cela. Est-il en mesure de le faire ? Un nombre croissant de Français en doutent."
13 novembre 2005 11:13
Revue de presse

BANLIEUES EN FLAMMES - L'avis de la presse arabe

L'explosion de violence qui secoue la société française fait les grands titres des journaux dans le monde entier. Les quotidiens arabes, et algériens en particulier, s'interrogent sur cette France qui a produit sur son territoire un "quart-monde" menaçant la paix civile.

"On s'attendait à entendre 'Ayawah !', le cri de guerre des émeutiers kabyles, dès la nuit tombée sur la banlieue rouge de Paris. Mêmes méthodes, mêmes effets. Les villes du neuf-trois (93, Seine-Saint-Denis) éparpillées sur les flancs droit et gauche de l'autoroute A1 sont en flammes depuis le 27 octobre. Elles ont vite donné le ton de la révolte à leurs voisines et néanmoins jumelles de la grande ceinture parisienne", écrit le quotidien algérien Liberté pour commenter les nuits d'émeutes en France.

"Si les matchs entre la République et ceux que Sarkozy a traité de 'racaille' (c'est ainsi qu'ils se nomment eux-mêmes, cela dit) se jouent en nocturne, la misère, elle, s'étale au grand jour au milieu des barres des banlieues", poursuit le journal - la misère, qui se mesure par "les 20 % de la population de Seine-Saint-Denis qui est au chômage, soit le double de la moyenne nationale", et qui fait des habitants des "banlieues en flammes" le "quart-monde français". Liberté ne cherche pas à trouver des excuses aux "incendiaires à peine sortis de leurs couches", mais essaie de décrire les conditions de vie de cette population qui offre "un corpus inégalable pour ethnologues en herbe". Et de dénoncer la politique de "la France, toutes tendances politiques confondues, qui a laissé faire pendant trente ans".

Son confrère La Tribune a pour sa part choisi de s'arrêter sur les propos du président français, Jacques Chirac, qui, à l'issue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité intérieure sur les violences dans les banlieues, "est sorti de son mutisme au onzième jour des violentes émeutes qui ont ébranlé la France". Ainsi, "Jacques Chirac a finalement affirmé à la presse, le dimanche 6 novembre, que la 'priorité' était le 'rétablissement de la sécurité et de l'ordre public' dans les banlieues". Aujourd'hui le Maroc reprend de son côté les propos du ministre de l'Intérieur français, Nicolas Sarkozy, dont "la politique et les interventions musclées sont critiquées de toutes parts, y compris par les familles des victimes, qui ont refusé sa visite".

Cependant, force est de constater que la presse du Maghreb reste globalement discrète sur les événements qui se déroulent en France. En revanche, Asharq Al-Awsat, quotidien saoudien édité à Londres, fait sa une sur le sujet et lui consacre plusieurs pages. "La France, connue pour être la vitrine européenne du métissage des cultures et de l'amitié euro-méditerranéenne, l'Etat des droits et des libertés, a échoué dans sa gestion d'un problème hérité de la période de la colonisation. Ils sont 5 millions de Français d'origine étrangère à vivre dans des conditions misérables. Il est impensable, dans un pays démocratique, qu'une si forte minorité n'ait aucun représentant au sein du Parlement, une institution supposée refléter toutes les composantes du pays, sa racaille et ses seigneurs", s'indigne l'éditorialiste du journal.

Asharq Al-Awsat reconnaît que, ces derniers jours, les comportements violents dont la responsabilité incombe à cette population d'immigrés "les montrent comme étant de la racaille et des voyous", c'est-à-dire comme les a décrit le ministre de l'Intérieur. "Oui, brûler les écoles, agresser les passants, dont certains ont été battus à mort, voilà des comportements de racaille. Hélas ! C'est ainsi que s'exprime cette frange de la population française qui n'a pas d'autre tribune pour s'exprimer et qui est exclue de la vie politique."

Sur le même ton, Al-Quds Al-Arabi, autre quotidien panarabe édité à Londres, dénonce les propos tenus par Nicolas Sarkozy à l'encontre d'une "population essentiellement d'origine maghrébine et musulmane, qui vit dans des régions pauvres et démunies, formant une ceinture de misère autour de la capitale". Traiter les jeunes issus de cette immigration de "racaille" est "irresponsable de la part d'un ministre". Le journal rappelle qu'actuellement en Europe et en France les campagnes de dénigrement à l'encontre des Arabes et des musulmans "sont permanentes et entretenues par les milieux d'extrême droite. Tout musulman est présumé terroriste jusqu'à preuve du contraire."

Mais, là encore, le quotidien ne cherche pas à trouver d'excuses aux actes de violence et appelle les "responsables de ces communautés d'immigrés à s'opposer aux fauteurs de troubles qui incitent à la violence et essaient de perturber la paix civile". Et Al-Quds Al-Arabi fait le vœu que ces événements jouent le rôle de "choc électrique pour les deux parties, le Français et l'immigré, afin qu'ils entament un vrai dialogue allant aux racines du problème".

Al-Hayat, autre quotidien arabe édité à Londres, publie pour sa part en première page une carte de la France affichant le nombre de "voitures incendiées durant la dixième nuit des troubles" dans les différentes villes de France. Le journal insiste sur "la propagation des violences, qui ne se limitent plus aux banlieues de Paris", tandis qu'Al-Quds Al-Arabi relève "les inquiétudes des autres pays européens, qui craignent l'extension de ces troubles".

Pour gérer la crise actuelle, les appels au calme se multiplient et "les gouvernants s'interrogent" pour finalement "convoquer Azouz Begag [ministre délégué à la Promotion de l'égalité des chances], un gentil, et Dalil Boubakeur [recteur de la mosquée de Paris], un inutile", ironise Liberté. Et le quotidien algérien de souligner, par ailleurs, le "silence assourdissant des communistes, qui ont donné son nom à la banlieue parisienne rouge. Silence mortel des footballeurs français, les blancs-blacks-beurs, qui ont fait jouir la France en 1998. Silence empoisonnant des artistes cathodiques diplomates de l'UNESCO, qui savent si bien voyager et si mal laisser leurs yeux se promener hors de leurs murs."

Hoda Saliby
13 novembre 2005 11:14
VU D'IRAN

Pays musulmans, boycottez la France !

"Paris à feu et à sang", écrit l'éditorialiste du Tehran Times. Pour ce journal très proche du régime islamique, cette situation prouve que "le gouvernement français maltraite ses citoyens noirs". "Les Français d'origine africaine subissent des discriminations depuis des années. Une simple comparaison entre le niveau de vie des Français blancs et noirs montre que les Français blancs sont racistes et considèrent leurs concitoyens noirs comme des esclaves", soutient l'éditorialiste Hassan Hanizadeh, connu pour ses prises de position extrêmes. "La France se veut un modèle de démocratie dans le monde, mais, dans le même temps, elle tolère la discrimination envers sa population noire", critique-t-il. L'éditorialiste, toujours très fidèle au régime, en profite pour dénoncer "le gouvernement néocolonialiste de Jacques Chirac ainsi que les Etats-Unis et les autres pays occidentaux, qui utilisent les mêmes méthodes de discrimination à l'encontre des pays du tiers-monde".

Pour le Tehran Times, "comme la plupart de ces pauvres Français noirs sont musulmans", il est du devoir de "la république islamique d'Iran et des autres pays musulmans d'observer leurs devoirs religieux et humanitaires pour former une commission d'enquête sur les conditions de vie de ces musulmans. Si le gouvernement français rejette la proposition des pays musulmans, elle devra être boycottée par tous les Etats musulmans jusqu'à ce qu'elle change son comportement envers les musulmans français." Et l'éditorialiste de conclure que "la France est dans une situation si critique que l'extension de ces démonstrations de violence pourrait même mener à l'effondrement de la France et à sa division entre le zones musulmane et chrétienne".

Dans l'autre journal anglophone de la capitale, Iran Daily, l'éditorialiste se veut plus modéré. "Les émeutes en France ne sont pas plus qu'une agitation passagère. Il est peu probable que ces violences fassent tomber le gouvernement", estime-t-il. "Cependant, ce qui peut être une grande source d'inquiétude pour Paris et d'autres Etats européens est la prolongation des troubles. Si les émeutes ne sont pas maîtrisées d'ici quelques jours, elles seront la preuve de l'inefficacité du gouvernement." Mais Iran Daily salue le caractère démocratique de la situation. En effet, "les démocraties florissantes ont si bien informé leurs citoyens de leurs droits que même les immigrés peuvent maintenant les réclamer. Bien que ces troubles risquent d'avoir des conséquences socio-économiques déplorables, ils n'entameront pas le système démocratique."

13 novembre 2005 11:15
VU DE RUSSIE


Les défaillances des médias français


Le bihebdomadaire Novaïa Gazeta, qui publie comme toute la presse russe des réflexions et reportages sur les émeutes en France, s'interroge, à la lumière des événements, sur le fonctionnement des médias français, leur rôle, leur rapport au politiquement correct et à l'autocensure. A propos du phénomène de ghettoïsation des quartiers difficiles, le journal cite en exemple la lente dégradation du quartier des Halles, au cœur de la capitale, devenu en quelques années le "club central des banlieues", "une plaque tournante du trafic de drogue", "un lieu de rixes entre bandes", sans que, toutes ces années, la presse française s'empare sérieusement du sujet.

Au cœur de Paris, le processus de ghettoïsation était en marche, nul ne s'y est intéressé. Alors, en banlieue... "Les journalistes français étaient capables de rapporter des reportages de Kaboul ou de Bagdad, mais pas du centre de Paris", s'indigne l'auteur, témoin de ce processus car longtemps riverain du quartier. "La mission sanitaire du journalisme n'est pas remplie en France. Un reportage à Bagdad est payé vingt fois plus cher qu'une enquête dans les ghettos de la banlieue."

Par ailleurs, l'article regrette l'abus du politiquement correct. "La presse française, très politiquement correcte et pratiquant l'autocensure, n'informe pas les citoyens sur la couleur de la peau des victimes des agresseurs. Ainsi, un photographe a été battu à mort. Sa disparition n'a éveillé aucune protestation. De même pour la femme handicapée brûlée au troisième degré... Personne n'est sorti dans la rue pour protester contre cette tentative de meurtre barbare..."



13 novembre 2005 11:15
VU DU ROYAUME-UNI

Il faut réintégrer les jeunes dans l'économie française

"Toute stratégie visant à ramener la paix sociale doit s'accompagner de la levée des obstacles qui ont poussé ces sans-culottes d'aujourd'hui en marge de l'économie française", note le Financial Times, en relation avec les jeunes rendus responsables de l'anarchie qui balaie la France. "Le point essentiel est que le marché du travail français marginalise à dessein les populations jeunes, moins qualifiées et hors normes. Les politiques qui luttent contre le chômage n'effacent pas nécessairement la marginalisation. La Grande-Bretagne a connu des émeutes et découvert que les auteurs d'attentats suicides avaient grandi sur son sol. Mais les opportunités économiques permettent d'évacuer la pression de cette marmite où l'insatisfaction engendre la haine et la colère. La justice et le sens commun ordonnent que tous puissent équitablement en profiter."
13 novembre 2005 11:16
VU DE HONGRIE

Les "compatriotes" de Sarko indésirables dans les cités

Vendredi soir, la voiture de la télévision hongroise a été saccagée en banlieue parisienne. Simple hasard ou non ? s'interroge le site d'information hongrois numéro un, Index, avec le témoignage d'un lecteur du Blanc-Mesnil à l'appui : "Quand on sort son appareil photo, on est tout de suite entouré par des gamins qui nous posent des questions – dans une forme qui n'est pas amicale du tout. Quand ils nous demandent d'où nous venons, nous préférons dire que nous sommes tchèques. Ces jours-ci, dire qu'on arrive de Hongrie, le pays d'origine du ministre de l'Intérieur, n'est pas trop bien vu."

Le site signale également l'incendie de l'atelier du peintre d'origine hongroise Victor Vasarely, dans la commune d'Annet-sur-Marne. Bien que classé à gauche, Index ne mâche pas ses mots quant aux émeutiers : "Si les chers immigrés sortent pour incendier, ils ne font qu'exprimer leur culture, n'est-ce pas ? Les Français blancs mangent du fromage et font du synthétiseur, les Français noirs et musulmans incendient. Pas tous. L'immigration a également ses réussites. Mais ceux qui réussissent s'enferment, à l'instar de leurs compatriotes blancs, et attendent l'arrivée des cocktails Molotov par la fenêtre. En revanche, ceux qui les lancent les considèrent comme des collabos."

D'où le constat que "l'intégration n'a pas réussi. Non parce qu'il n'y avait pas assez d'appartements. En Europe, des centaines de milliers de réfugiés – par exemple de Transylvanie – ont habité pendant de longues années dans des wagons sans aller mettre le feu à côté de chez eux – certes, la télé ne leur a pas inculqué, le soir, que tu n'es rien ni personne si dans ton téléphone portable il n'y a pas de caméra ni de tondeuse à gazon. Non, la raison de l'échec, c'est que, en une trop courte période de temps, trop de gens incompatibles sont arrivés en Europe… Dans le monde de rêve libéral ont surgi des foules qui bénéficient de la protection du libéralisme sans pour autant accepter ce dernier."

Même ton dans le quotidien libéral Magyar Hírlap : "L'Etat et les municipalités pourraient, certes, faire un peu plus en faveur de l'éducation. Mais, pour ce faire, ils auraient besoin de partenaires. Ce qui n'est pas facile à trouver, puisqu'on entend des musulmans dire : 'Je déteste le mot intégration, parce que ça sous-entend que les Français devraient nous intégrer et que nous, les immigrés, nous devrions nous intégrer dans la société française.' En effet, c'est justement ce qui devrait se passer. Et, aussi longtemps que cela ne se réalisera pas, l'Europe devra réglementer l'immigration de façon radicale."

Quant au premier quotidien du pays, Népszabadság, de tendance socialiste-libéral, il dénonce à la fois les forces d'extrême gauche, "pour qui les révoltes rappellent, de façon nostalgique, Mai 68" et ceux qui, "surtout à l'extrême droite, qualifient les émeutes d''intifada'". Mais, selon le journal, "ceux de la majorité ne sont pas aussi simplistes. C'est pourquoi ils sont les plus pessimistes. Car, pour eux, les racines des maux sont plus profondes que ne pensent les populistes ou les islamistes aveugles. Le vrai sujet de leur inquiétude est le modèle d'intégration français, qui, fondé sur la solidarité et la justice, a longtemps fonctionné. Mais la mondialisation, le manque de moyens et la toute-puissance du rationalisme économique ont progressivement érodé ses valeurs… L'opposition de gauche compte sur l'échec du gouvernement. Et les membres du gouvernement se montrent du doigt. Mais ils montrent surtout Nicolas Sarkozy. Avec ces émeutes de ghetto, le ministre de l'Intérieur, qui veut briguer la présidence, est arrivé à un tournant. Si ce partisan de la méthode dure s'en sort aujourd'hui, il aura gagné... en 2007 aussi. Sinon, il se pourra que son nom ne signifie plus rien en France dans deux ans."

13 novembre 2005 11:17
VU DE GRÈCE

Sarkozy doit payer

Le "soulèvement des nouveaux 'misérables' menace maintenant l'Europe", titre Elfetherotypia. "En France, le ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, se trouve dans l'œil du cyclone, alors qu'en Europe la menace gagne du terrain. Si la violence des jeunes est le résultat de l'abandon, de la pauvreté et du démantèlement de l'Etat social en France, ce phénomène existe partout en Europe, et instaurer un système sécuritaire à l'américaine ne mènera à rien." "Qui sauvera donc les Français ?" demande le quotidien athénien.

"Sarkozy allume le feu", estime Ta Nea. "Et, puisque quelqu'un doit payer, autant que ce soit lui." "Le ministre de l'Intérieur français a eu des propos sévères et a annoncé des mesures bien trop conservatrices sur le contrôle de la criminalité dans les ghettos de la banlieue parisienne. Résultat, le peuple se retourne contre lui, ironise le quotidien. Manipulés ou non par le match Sarkozy-Villepin arbitré par Jacques Chirac, les Français sont intolérants et ont peur comme le reste des Européens. En Grèce, les 900 000 immigrés sont aujourd'hui regardés différemment : même les Albanais, qui ne menacent pas de se soulever dans l'immédiat, sont montrés du doigt."




13 novembre 2005 11:20
VU DU ROYAUME-UNI 2

Adieu au modèle républicain

"Liberté ? Les musulmanes françaises n'ont pas le droit de porter le foulard à l'école. Egalité ? Les personnes de couleur ont deux fois plus de chances d'être au chômage. Fraternité ? Le gouvernement français admet que les politiques d'intégration ont échoué. Réalité. Des émeutes éclatent pour la onzième nuit d'affilée." A l'image de The Independent et de sa une à la fois amère et sentencieuse, le presse britannique interprète, le lundi 7 novembre, les émeutes urbaines comme l'échec du modèle hexagonal.

"La vérité est que, depuis au moins deux décennies, les quartiers qui entourent la plupart des villes françaises ont été l'autre face de la plaisante réputation du pays en matière de qualité de vie, analyse la chroniqueuse Mary Dejevsky dans The Independent. Ils ont été un refuge bien pratique pour tous ceux qui ne pouvaient ou ne voulaient pas rejoindre la France conventionnelle : les pauvres, assurément, mais surtout les immigrés de première, deuxième et troisième génération." "On peut penser que si les quartiers avaient été moins oubliés, leurs problèmes auraient atteint le haut de l'agenda politique plus tôt, poursuit la chroniqueuse. Si les gouvernements français successifs ont pu les négliger si honteusement, c'est en grande partie parce qu'ils sont loin des yeux et donc loin du cœur de la majorité des gens. Si ces quartiers ont été laissés livrés à eux-mêmes et si longtemps acceptés comme des zones virtuellement interdites et au-delà des lois, c'est aussi parce que les politiciens qui se sont succédé l'ont choisi. Ils ne voyaient aucun bénéfice électoral à le faire."

Ces deux France, le correspondant de The Guardian à Paris les décrit côte à côte à Aulnay-sous-Bois. Ici, dans un lotissement, "une France calme, confortable, préoccupée des bonnes choses de la vie ; à moins d'un kilomètre, une autre France, des blocs de béton et les hauts immeubles de la Cité des 3 000".

Le correspondant en France de The Daily Telegraph compare, de son côté, les émeutes actuelles avec celles qui ont secoué le Royaume-Uni dans les années 1980. "Les émeutiers britanniques noirs de cette époque et les émeutiers français noirs et d'Afrique du Nord d'aujourd'hui partagent les mêmes sentiments de désenchantement envers la société dans laquelle leurs parents ont été encouragés à s'installer, écrit Colin Randall. Les jeunes hommes de Tottenham ou de Toxteth se considéraient, souvent avec raison, victimes de la discrimination ; les enfants d'immigrés algériens et subsahariens en France voient les qualités vantées de liberté, d'égalité et de fraternité comme une illusion."

"Mais, remarque le journaliste, et c'est la principale différence entre les générations d'émeutiers, la plupart de ceux qui vivent dans les ghettos français sont des musulmans et ont grandi dans une période de radicalisation islamique. Beaucoup des jeunes qui lancent des cocktails Molotov se réfèrent à des fidèles de la mosquée à peine plus vieux qu'eux. Ces hommes sont capables d'être, à la fois, des forces du bien et de la discorde."

Pour The Times, "le gouvernement a bien du mal à proposer autre chose que la stratégie 'républicaine' que les gouvernements successifs de droite et de gauche suivent depuis des années". "La France a toujours considéré son modèle comme supérieur à l'approche anglo-saxonne de la diversité, qui a permis aux minorités ethniques de maintenir des liens solides au sein de communautés culturelles et religieuses", rappelle le quotidien, qui constate qu'"après trois décennies d'afflux massif d'immigrés, tout le monde s'accorde sur le fait que le modèle français ne marche pas, même si personne ne dit que l'approche américaine et britannique a produit de meilleurs résultats." Et paradoxalement, s'étonne The Times, "la figure qu'on associe le plus à une nouvelle approche radicale est Nicolas Sarkozy". Mais "ses propositions ont été très mal reçues".


Source : [www.courrierint.com]

Môh Tsu
 
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