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Etincelle de liberté de presse en Algérie
A
9 novembre 2006 03:48
J'ai écouté parler deux hommes, cette semaine, le désespérant Yazid Zerhouni et le courageux opposant tunisien Moncef Marzouki. Et ce que j'en déduis n'est pas à l'honneur de nos élites : il se produit quelque chose de très sérieux au Maghreb, une sorte de réveil démocratique, dont l'Algérie semble non seulement étrangère mais, plus grave, de plus en plus exclue, par la faute de l'apathie générale et de la répression d'un pouvoir autoritaire, corrompu, grabataire, sourd aux nouvelles idées qui secouent la planète.


Au Maroc, sous l'impulsion ou le consentement du jeune roi Mohammed VI, une nouvelle société civile voit le jour, avec ces jeunes hommes et ces jeunes femmes qui brisent des tabous séculaires, imposent des débats impensables, de la liberté de la femme à celle de la presse, lancent d'incroyables défis aux puissances de la régression sociale. C'est le pays tout entier qui paraît connecté à l'essor mondial. En Tunisie, où les choses sont moins mûres, un important mouvement contestataire pointe le nez, une “résistance civile qui utilise tous les moyens pacifiques pour imposer ses droits et libertés”, pour reprendre les termes de Moncef Marzouki. Le pouvoir de Ben Ali le sait depuis octobre 2005 et l'imposante grève de la faim menée, avec succès, par des opposants sous les caméras étrangères : la Tunisie de la dictature n'en a plus pour longtemps. Chez nous, tétanisés par le terrorisme intégriste et le gourdin des gouvernants, nous en sommes encore à nous taire devant les éclats de voix du pouvoir, à lui laisser l'initiative de nous débarrasser de l'islamisme en échange de notre silence, pour ne pas dire de notre obséquiosité, et à s'émouvoir, ensuite, qu'il marchande avec l'intégrisme sur notre dos. Les uns lui prêtent leur plume, les autres s'en font les bouffons. Nous avons le talent de brader un demi-siècle de luttes pour un plat de lentilles, de tourner magnifiquement le dos à notre responsabilité historique, nous avons le talent, plus pathétique, de nous acheter des réputations surfaites au bazar de Tartarin. On se plaît à polémiquer avec Yasmina Khadra et à s'émouvoir de débats enfantins à l'heure où se joue le destin d'un pays partagé entre un pouvoir corrompu et la charogne intégriste. Nous sommes fiers d'abdiquer notre fierté aux pieds de ces deux monstres hideux de la tragédie algérienne, de leur abandonner le soin de trouver un pacte entre eux, et de ne même pas nous en informer. Qui reprocherait au régime de Bouteflika, pendant ce temps, de profiter de l'aubaine ? C'est-à-dire de continuer de traiter une question de vie et de mort, la question du terrorisme et de l'intégrisme, par le mensonge de l'arracheur de dents et la fourberie du chevillard. Regardez-le qui s'amuse à agiter l'épouvantail intégriste au nez de la société pour la dissuader de bouger, de manifester, de revendiquer. Ecoutez-le mentir pour se donner, aux dépens de la République, les airs du pouvoir intraitable et responsable. Car, pendant que Yazid Zerhouni, d'une voix désabusée, nous donne de faux chiffres sur le nombre d'islamistes armés, les maquis se repeuplent, les attentats se multiplient et les négociateurs intégristes, confortés par le regain de violence, obtiennent de la République qu'elle se déculotte chaque jour un peu plus. Car enfin, M. le ministre, quand vous jurez, avec l'air docte du marabout devant sa boule de cristal, que 80% des hommes armés ont quitté les maquis depuis le référendum sur la Charte, cela sous-entend que les innombrables tueries d'aujourd'hui sont l'œuvre des 20% qui restent sourds à vos avances. Si peu d'hommes pour autant de boucheries ? Voilà qui devient ennuyeux. Vous placez l'opinion devant un dilemme inconfortable : donner crédit à la thèse du qui-tuequi ou se gausser de vos professions de foi. Pour ma part, n'étant pas encore gagné par les suspicions à la mode, je préfère encore rire de vos chiffres. Mais pour combien de temps encore ? Notre ministre devrait songer à contrôler sa vieille tentation pour la bêtise laquelle, il devrait enfin le savoir, consiste à avoir une réponse à tout. Justifier l'échec d'une entreprise politique par la menterie est un exercice fort périlleux. Il faut avoir de sérieuses prédispositions pour le canular. En bon policier, M. Zerhouni devrait savoir que le commissaire San-Antonio a dit qu'un politicien ne peut faire carrière sans mémoire, car il doit se souvenir de toutes les promesses qu'il lui faut oublier. Et il est déjà l'heure d'oublier vos illusoires engagements à rétablir la paix par la voie pétainiste. A quoi bon s'obstiner devant l'évidence ? Les maquis se sont reconstitués et les intégristes ont été remis sur selle. Il faut devoir, à présent, expliquer et s'expliquer plutôt que de s'adonner aux charmes des fables pour enfants. C'est votre devoir majeur devant les générations futures. Avant San-Antonio, Winston Churchill avait laissé cette sage définition à l'intention des postulants à la postérité : “Un bon politicien c'est celui qui est capable de prédire l'avenir et qui, par la suite, est également capable d'expliquer pourquoi les choses ne se sont pas passées comme il l'avait prédit.” Au lieu de cela, nos dirigeants s'enfoncent dans le discours autosuffisant, heureux de ne rencontrer aucun contradicteur qui mettrait à nu leurs mensonges, ravis d'évoluer seuls sur une scène désertée par les élites, les intellectuels et les partis d'opposition, s'adonnant à un vil négoce : leur survie contre la réhabilitation politique des intégristes. Allons-nous laisser plus longtemps un pouvoir corrompu négocier pour nous notre propre avenir ? Allons-nous laisser plus longtemps se dérouler sous nos yeux cet infâme assassinat du projet démocratique algérien ? Saurons-nous protéger nos enfants de l'inquiétante avancée des idées intégristes ? Un silence lâche s'accompagne toujours d'une douce résignation puis d'un coupable renoncement. On sait où commence l'abdication : par une manchette sur l'écrivain Anouar Abdelmalek, un petit appel au meurtre versé comme gage à de loyaux ralliements, ou une chaleureuse poignée de mains à Rabah Kébir. On ne sait pas où elle finit. Notre démission aurait de funestes conséquences pour les prochaines années. Qu'avonsnous à craindre de plus redoutable que le déshonneur ? Le combat contre le terrorisme intégriste est l'affaire de la société, pas du régime corrompu. Nous ne pouvons plus laisser le pouvoir instrumenter la violence pour sa propre survie. Utiliser le terrorisme pour briser l'essor de la société. Or, c'est précisément ce que dit Moncef Marzouki : “Les régimes arabes ne survivent que grâce à la violence, car sans le phénomène du terrorisme, ces régimes seront confrontés à leurs propres indigences.” (1) Et c'est là qu'intervient le cas Marzouki. S'il nous fallait une leçon de courage, prenons celle qui nous vient de Tunisie, de cet homme de 61 ans, chef d'un parti d'opposition non reconnu, qui choisit de quitter son exil en France où il est établi depuis cinq ans en tant que professeur de médecine, pour rentrer dans son pays et affronter, sur son terrain, la dictature de Ben Ali. Moncef Marzouki n'ignore rien de ce qui l'attend : le jour même de son arrivée à Tunis, il est convoqué devant le juge d'instruction pour répondre de l'accusation d'“incitation de la population à la désobéissance civile”. Que lui reproche-t-on ? D'avoir déclaré sur la chaîne Al Jazeera que “la seule riposte d'une population lassée de la répression et de la corruption est d'entrer dans une résistance civile en utilisant tous les moyens pacifiques pour imposer ses droits et libertés”. Pas moins. Marzouki ne se contente pas de jeter un pavé dans la mare à partir de l'Europe. Après cette tonitruante déclaration, il donne l'exemple et entre luimême en résistance, dans son pays. “Ici en Tunisie, mon pays, je suis encerclé, isolé, mais à partir du moment où j'ai lancé un appel à la résistance civique et pacifique, je ne pouvais plus rester à Paris”, dit-il au journaliste d' El Watan qui l'a rencontré. Le régime de Ben Ali est dérouté par cet opposant qui le nargue sur son sol. Et qui, surtout, le pousse aux situations extrêmes. Marzouki s'engage à ne pas retourner en exil, affirmant son droit au sol et refuse de comparaître devant, dit-il, “une justice de simulacre pour répondre de violations de pseudo-lois édictées par un pseudo-Parlement et dont la seule finalité est d'habiller de légalité démocratique, la fourberie et la brutalité de la dictature”. Le régime lui ayant envoyé des voyous pour le corriger, il décide de ne plus sortir de son domicile et se déclare assigné de facto à résidence. “Je resterai donc dans ma maison encerclée par la police politique, jusqu'à un changement radical de la situation politique me permettant ainsi qu'à tous les Tunisiens de marcher librement dans les rues et d'exercer tous nos droits et libertés sans peur ni restrictions.” Cet homme a des vérités en tête et compte bien les dire. Il sait tout sur le régime de Ben Ali et sur la façon de conduire la Tunisie vers la démocratie. La Tunisie et le reste. “Le Maghreb ne peut se construire sans démocratie”, dit-il au journaliste d' El Watan. Il sait que cela lui coûtera cher, mais il sait que la liberté a un prix qu'il faut savoir payer. Race nouvelle ? Méditons cet exemple si proche de nous.
M.B.



Modifié 1 fois. Dernière modification le 09/11/06 08:13 par Annabis.
n
9 novembre 2006 11:12
L'article dit tout a fait l'inverse et dennonce une Algérie qui, a l'inverse de ses voisin, refuse l'ouverture et sombre dans le despotisme.

Son titre initial est: Kabylie. Algérie : Marzouki et le bazar de Tartarin

Il a été publiè dans "Le Soir d’Algérie" et repris sur [www.kabylienews.com]

Son auteur Benchicou est le symbole de la repression de la presse en Algerie. Il vient de sortir de prison ou il a passe plusieurs mois (plus d'un an?).
 
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