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Banlieues : « Pas de paix sans justice »
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18 novembre 2005 22:17
Aucun système, ni républicain, ni anglo-saxon, n’est à l’abri des révoltes urbaines quand sont réunis les trois grands facteurs que sont l’injustice sociale, une discrimination raciale, réelle ou ressentie, et la violence policière. Retour sur quelques grandes flambées, en Grande-Bretagne, aux États-Unis et en Afrique du Sud.


Brixton, Bradford, Watts, South Central, Soweto, les Minguettes ou Clichy-sous-Bois, quels que soient le lieu et l’époque, les violences urbaines ont un terreau commun fait d’abandon social et de concentration ethnique. Il s’y ajoute toujours comme élément déclencheur une violence policière ou une déclaration provocatrice. Le tout aggravé par un sentiment diffus d’impasse et une absence totale de représentation politique. Dans la banlieue de Londres en 1981 (Brixton), au nord de Leeds (Bradford, en 2001), comme au coeur de Los Angeles en 1965 (Watts) ou en 1992 (South Central), sans même parler du township de Johannesbourg (Soweto), ce sont toujours des années de violences quotidiennes faites aux habitants qui débouchent sur ces poussées éruptives.

Brixton, 1981. Comme Nicolas Sarkozy, Margaret Thatcher souhaitait, en 1981, « rétablir la loi et l’ordre », ignorant obstinément les causes profondes de l’émeute. Entre 1978 et 1982, le taux de chômage avait pourtant augmenté en Grande-Bretagne de 300 % ! Mais la Dame de fer décide de renforcer les contrôles policiers pour mater les mécontentements. Dans les quartiers pauvres tels que Brixton (au sud de Londres), les populations antillaises et indiennes subissent la crise de plein fouet ainsi qu’un harcèlement policier aveugle et incessant.

À l’instar des provocations verbales de Nicolas Sarkozy aujourd’hui, celles de Margaret Thatcher transforment les problèmes sociaux en problèmes ethniques. En considérant que la misère de ces quartiers ne peut s’expliquer que par la démission de parents laxistes, elle contribue à mettre le feu aux poudres. Les émeutes de Brixton en 1981 sont les affrontements les plus violents qu’aura connus l’Angleterre depuis la Seconde Guerre mondiale.

Sans aucun doute, ce sont ces événements du début de l’ère ultralibérale qui ressemblent le plus aux violences que connaît actuellement la France. Il suffit pour s’en convaincre de rappeler que le département de la Seine-Saint-Denis (93), la banlieue d’où sont partis ces affrontements, recense quelque 120 000 demandeurs d’emploi, ce qui représente 17 % de la population active. Et que 18 % de la population vit au-dessous du seuil de pauvreté.

Bradford, 2001. Mais beaucoup d’autres révoltes urbaines jalonnent l’histoire récente de la Grande-Bretagne, dont notamment les heurts entre manifestants d’origines indienne et pakistanaise avec les policiers, en juillet 2001, à Bradford, dans le nord du pays. Il y avait eu une centaine de blessés.

Watts, 1965. Il y a quarante ans, l’un des quartiers les plus pauvres de Los Angeles, Watts, peuplé à 80 % de Noirs, avait été le théâtre de violentes émeutes. Mais, à l’inverse de la Grande-Bretagne des années Thatcher, les États-Unis connaissent à l’époque une croissance faramineuse qui renforce le sentiment d’injustice dans les quartiers les plus misérables.

Aux frustrations ressenties par les Noirs s’ajoutent les propos racistes régulièrement tenus par le chef de la police de Los Angeles. Dans ce contexte explosif, le 11 août 1965, l’arrestation abusive de Marquette Frye, un Noir de 21 ans, va mettre le quartier à feu et à sang. La population élève des barricades, la police est bombardée de briques et de cocktails Molotov. Malgré l’instauration du couvre-feu par l’armée, les émeutes ne cesseront que six jours et 34 morts plus tard.

South Central, 1992. La grande métropole californienne n’en est pas quitte avec la violence. En avril et mai 1992, des émeutes et une répression encore plus meurtirère ravageront le quartier pauvre de South Central.

La révolte éclate à la suite de l’acquittement prononcé à l’endroit de policiers qui ont tabassé un automobiliste noir, Rodney King, devant la caméra d’un cinéaste amateur.

Dès l’annonce du verdict, les manifestants se rassemblent. Leur mot d’ordre, qu’ils ont le mérite de formuler, pourrait servir de cri de ralliement à toutes les émeutes urbaines : « Pas de paix sans justice ! » La répression fera 55 morts, deux mille blessés et un milliard de dollars de dégâts.

Clotilde Monteiro
La liberté des autres étend la mienne à l'infini.
 
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