La classe politique israélienne n’a de cesse de commenter les premiers comptes-rendus de la commission Winograd. Sur ordre de la Haute Cour de justice, les retranscriptions (édulcorées) des témoignages du vice-Premier ministre Shimon Peres et du général Amos Malka ont en effet été rendues public.
Il n’en fallait pas moins pour le couvercle de la marmite s’entrouvre pour laisser échapper la vapeur. Depuis le temps que l’opinion publique attendait ce moment, il était évident que ceux qui avaient de près ou de loin quelque chose à redire sur la conduite de la guerre du Liban s’en donnerait à cœur joie dès que les premières informations seraient disponibles. Dont acte !
En fait, celui qui a le plus fait parler de lui, est Shimon Peres. Pour ce dernier, l’armée n’était pas prête à s’engager dans la guerre. Il ne fallait donc pas « y aller ». De plus, selon Peres, le Premier ministre n’a pas mis toutes les chances de sont côté en omettant de s’adjoindre les conseils de stratèges avisés. « Il n’aurait jamais dû dévoiler ses plans publiquement… Cela a donné la possibilité au Hezbollah d’anticiper les actions d’Israël… »
Quand au général Amos Malka, il déplore le fait que personne ne l’a informé que les témoignages pourraient être rendu publics. Non pas qu’il aurait dit autre chose à la commission mais selon lui ceux qui ont témoigné auraient certainement prit conseil avant de porter certaines accusations. Selon Malka, il se pourrait que certains d’entre eux aient à faire face à des procès de la part de ceux qu’ils ont accusé.
Pour ce qui le concerne, il regrette que le témoignage publié ait été censuré pour raisons sécuritaires. Malka explique en effet que « les propos qui ont été dévoilés ont été sortis de leur contexte et que toutes les parties que la censure a éliminées ne permettent plus de comprendre correctement ses propos ».
Quoi qu’il en soit, la publication des deux témoignages a quelque peu fait déborder la marmite qui ne demandait que cela. A gauche, Ehoud Barak a commencé à rameuter ses troupes en prévision des primaires du parti travaillistes du mois de mai. Pour l’ancien Premier ministre, il est urgent de se préparer à ‘l’après-winograd’ afin de proposer une alternative concrète à la population.
A priori, il ne fait aucun doute pour Ehoud Barak, que les conclusions du rapport Winograd devraient entraîner la chute du gouvernement d’Ehoud Olmert. Position qu’un nombre non négligeable de membres de Kadima semblent partager. Eux aussi prennent les devant et tentent de structurer le devenir du parti.
Et en tête de ces ‘visionnaires’ se trouve l’actuelle ministre des Affaires étrangères, Tsipi Livni. Au cours d’une intervention lors de l’ouverture de la 14e section du parti, Mme Livni a insisté sur le rôle que pouvait tenir Kadima dans le spectre politique israélien. Fustigeant ceux qui se bornent à ne parler que de la ‘droite’ et de la ‘gauche’, elle a déclaré qu’il y avait un parti du centre – Kadima – et que la plateforme pour laquelle le peuple avait voté devait être mise en application. Se rappelant de son ancien parti, le Likoud, elle a tenu à préciser que la formation de droite ne savait que « dire non ! ». Selon elle, Kadima a les moyens d’aller de l’avant et de prendre des risques pour le bien-être de la population.
Tout ceci ressemble fort à une campagne préélectorale et Mme Livni prend de plus en plus la parole pour exprimer sa vision stratégique pour Israël sur des sujets qui vont bien au-delà de ses fonctions. Elle oublie aussi fréquemment de soutenir dans ses propos l’actuel Premier ministre comme si elle voulait se désolidariser de lui en douceur, histoire de ne pas être éclaboussée quand le pavé Winograd tombera dans la marmite. Marmite qui est déjà en ébullition…
Des évènements de ces derniers jours, il faut tirer une indication simple mais d’importance : chacun prépare ses boulets dans son petit coin et attend le feu vert pour commencer les hostilités. Pour le moment, fêtes de Pessah obligent, il y a fort peu de chances pour que les choses s’agitent. Mais dès que la commission Winograd aura remis son rapport, il y a fort à parier que les amoureux d’aujourd’hui deviennent les pires ennemis de demain.
Au royaume des caméléons, l’homme invisible est roi… non ?
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