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Une affaire caricaturale
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11 février 2006 16:49
C’était sans doute fatal dans une histoire de caricatures : chacun y est allé de son trait le plus gras pour dénoncer l’autre, et se montrer soi-même dans ses pires excès. Les dessinateurs danois avaient voulu représenter Mahomet, et ils ont fait resurgir le « choc des civilisations ». Une histoire caricaturale en somme, bien éloignée de la réalité, et résumée par un antagonisme trop simple pour être honnête : « Fanatisme contre liberté de la presse ». Il faut donc y regarder de plus près pour essayer de déjouer les pièges tendus à une opinion traumatisée par la violence des manifestations qui se sont déroulées ces jours-ci à Damas, à Beyrouth, à Djakarta ou à Téhéran. Une opinion qui ne comprend pas la disproportion entre la cause supposée - de simples dessins de presse - et l’effet : des drapeaux brûlés, des ambassades incendiées.

Le premier piège réside dans l’image grossissante d’un « monde arabo-musulman » qui serait tout entier à feu et à sang. Non. Quelques milliers de personnes vociférant et saccageant des bâtiments consulaires danois et norvégiens, c’est déjà beaucoup trop ! Mais on est loin des centaines de millions de femmes et d’hommes qui se réclament de l’islam. Ceux-là, dans leur immense majorité, ont été certes blessés dans leur sensibilité par les caricatures de Mahomet parues dans un quotidien danois, mais n’ont brûlé aucun drapeau, ni hurlé aucun slogan de haine. À y voir de plus près, le lien de cause à effet ressemble plutôt à un mauvais prétexte.

La diffusion tardive des caricatures de Mahomet hors des frontières danoises, quatre mois après leur parution, et la subite exploitation de la « colère du peuple » par des États ou des groupes n’ont guère de rapport avec la spontanéité populaire. Et il n’est pas très difficile d’apercevoir derrière chacune de ces manifestations violentes des raisons cachées liées à des ressentiments récents, et à des arrière-pensées locales qui motivent plus sûrement l’ire collective que les seules caricatures du prophète Mahomet. On en voudra pour preuve, à Gaza, l’empressement de certains groupes du Fatah à jeter de l’huile sur le feu pour mettre dans l’embarras le Hamas au moment où celui-ci tente de nouer ses premiers liens diplomatiques avec les capitales occidentales.

L’autre lecture biaisée vient du côté occidental. Elle nous raconte une histoire grandiloquente de liberté qui ne peut souffrir aucune entrave, ne connaît jamais l’autocensure, moque et caricature à tout-va sans se soucier des sensibilités et des situations. Laïques ou athées, nous serions donc tous condamnés à répéter avec l’un des frères Karamazov : « Si Dieu n’existe pas, tout est permis. » On représentera donc, si cela nous chante, le prophète Mahomet, barbu, hirsute et enturbanné. On le dessinera selon notre bon plaisir, annonçant par exemple du haut de son nuage qu’il n’a plus de « vierges » à livrer à des terroristes islamistes concupiscents, ou encore arborant un turban en forme de bombe. Allons donc ! Trêve d’hypocrisie !

Tout le monde sait bien que ce n’est pas si simple. Que cette liberté invoquée peut cacher des motifs moins nobles, et que règne ces temps-ci au royaume du Danemark une ambiance pourrie (voir l’article de Marion Dumand, p. 10) autour de la question de l’immigration. On en sait aussi un peu plus sur les engagements sulfureux du journal, Jyllands Posten, qui a lancé ce périlleux appel d’offres à des talents impatients d’explorer les limites de leur propre liberté, et de livrer au monde un message « courageux » et ô combien « original » sur le thème « islamistes violeurs » et « musulmans terroristes ». L’humour est évidemment chose subjective. Mais on peut tout de même se demander où est l’intérêt d’en passer par l’art supposé de la dérision pour reprendre les préjugés les plus vulgaires que colporte notre époque. Où donc est la dérision ici ?

Il y a cependant une leçon positive à retenir de cette affaire. Comme les manifs sont instrumentalisées et ultraminoritaires dans le monde musulman, la référence aveugle aux « grands principes » est marginale chez nous. Hormis un titre (France Soir), et quelques chroniqueurs, la presse française a, dans son immense majorité, déjoué le piège de la caricature... En une semaine, le principe de responsabilité s’est peu à peu imposé. Les termes simplistes du débat ont changé. Le trait gras s’est estompé. Le contexte a refait son apparition. Celui d’un monde arabo-musulman en proie à toutes les difficultés, cible des bombes américaines en Irak, victime d’une interminable injustice en Palestine, et livré tantôt à des dictatures pseudo-laïques, tantôt à des régimes d’inspiration islamiste.

La toile de fond politico-économique est reparue. Nous avons fait, pour une fois, preuve d’un peu moins d’ethnocentrisme que d’ordinaire pour comprendre que la religion peut occuper, ailleurs que chez nous, une place toute différente. Qu’elle peut imprégner tous les aspects de la vie sociale. Et cela d’autant plus quand, depuis quarante ans, les oppositions démocratiques ont été consciencieusement anéanties par les grandes puissances, ou avec leur complicité. Et que la religion est devenue un mode de résistance à la domination culturelle de l’Occident, ou à des régimes dictatoriaux. On peut le déplorer. Mais le monde est ainsi, et c’est notre monde.

Denis Sieffert
La liberté des autres étend la mienne à l'infini.
D
11 février 2006 16:56
Salam,


ca fait longtemps qu'on t'a pas vu sur le forum, rebienvenue
[hr] [b][center]Si perçante soit la vue, on ne se voit jamais de dos[/center][/b][b]Boycottez pour la paix !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! [color=#FF0000]Boycottez!!!!!!!!![/color][color=#FFFFFF]!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!![/color] [color=#009900]Boycottez pour les enfants de Gaza!!!!!![/color][/b]
2
11 février 2006 16:58
winking smiley



Citation
Donatello a écrit:
Salam,


ca fait longtemps qu'on t'a pas vu sur le forum, rebienvenue
La liberté des autres étend la mienne à l'infini.
D
11 février 2006 17:03
Ahlane Loubna !


Contente de te revoir parmi nous !

Merci pour cet article ! Mais qui c'est Denis Sieffert ! La source please !
Vivre sous occupation, c'est l'humiliation à chaque instant de sa vie ... Résister à l'occupation, c'est vivre libre !Aujourd'hui Gaza, demain Al-Qods !
b
11 février 2006 17:08
salut djenine,


sieffert est un journaliste de "politis". il me semble même qu'il en est le rédacteur en chef...
D
11 février 2006 17:22
Citation
bulle a écrit:
salut djenine,


sieffert est un journaliste de "politis". il me semble même qu'il en est le rédacteur en chef...


Salam Bulle !



Merci pour l'info ! smiling smiley !
Vivre sous occupation, c'est l'humiliation à chaque instant de sa vie ... Résister à l'occupation, c'est vivre libre !Aujourd'hui Gaza, demain Al-Qods !
 
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