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Grand Angle

Gestion des réseaux d’eau et d’électricité au Maroc : Droit dans le mur ?

Personne n'échappe à la critique. Parmi les acteurs de la gestion des réseaux d'eau et d'électricité au Maroc, la Cour des comptes marocaine, dans son dernier rapport, publié le 29 mars, accable autant les sociétés délégataires de services publiques dont certains employés sont directement accusés de fraude, que l'Office National de l'Eau Potable, lui même. Difficile de les imaginer aptes, alors, à faire face à l'urbanisation du Maroc, véritable défi pour la mise en place des réseaux d'eau, d'électricité et d'assainissement.

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La Cour des comptes marocaine dans sont rapport publié, le 29 mars, affirment que des étrangers présents au Maroc, entre 2005 et 2009, dans le cadre de leur travail au sein de certaines sociétés délégataires de services publiques ont exporté illégalement des devises. Ces sociétés privées étrangères interviennent dans différents secteur de l’action publique, comme la gestion des réseaux d’eau et d’électricité.

«L’intervention du secteur privé dans la gestion de l’eau et de l’électricité n’apporte pas l’efficience et ce secteur peut être également affecté par la corruption», estime Mehdi Lahlou, économiste à l’Institut National de Statistiques Appliquées et d’Economie (INSAE), président de l’Association Maroc pour un Contrat Mondial de l’Eau (ACME-Maroc).

L’an dernier, dans son précédent rapport, la Cour des Comptes avait déjà pointé du doigt les sociétés délégataires des services d’eau et d’électricité. La Lydec, à Casablanca, filiale du groupe Suez Environnement, Redal, à Rabat, et Amendis, à Tanger, toutes deux filiales du groupes Veolia, n’avaient pas rempli la totalité de leurs engagements contractuels avec les Villes et avaient procédé de façon anticipée à la distribution des dividendes, rappelle l’Economiste.

Public privé, même galère

Cette année, pourtant, les pétitions signées à Oujda et les manifestations de Marrakech contre la hausse des factures d’eau et d’électricité ne sont pas dirigées contre des sociétés délégataires, mais deux régies publiques autonomes de distribution de l’eau et de l’électricité. Cette année, la Cour des comptes cible également l’Office National de l’Eau Potable (ONEP) qui vend l’eau aux régies publiques et sociétés délégataires privées. Retard dans la réalisation de projets, prérogatives outrepassées ... l’ONEP a beau être un organisme public, il n’apparait pas, au regard de ce dernier rapport, mieux géré que les sociétés délégataires.

Au Maroc, sociétés privées ou régie autonomes font toutes face au même défi majeur, propre aux pays en voie de développement : la croissance urbaine. «Des quartiers se construisent de façon anarchique et illégale en périphérie des villes sans eau ni électricité, chaque opérateur intervient ensuite à son gré pour placer qui ses réseaux électriques, qui ses adductions d’eau potables ...», explique Aziz Iraqi, enseignant chercheur à l’Institut National d’Aménagement eu d’Urbanisme, à Rabat. «L’efficience interacteur est très mauvaise. Le manque de coordination, de synchronisation de communication entre les différents services crée des coûts additionnels», estime Claude de Miras, économiste à l'Insitut de Recherche pour le Développement (IRD), au Maroc.

Equation insoluble : exploiter ET investir

Il viennent s'ajouter à des coûts d’investissements tels que le modèle mis en place sur incitation de la Banque Mondiale dans les années 80, les délégations de services publics, ne parviennent pas à remplir leurs engagements pris par contrat avec les Villes. «A l’origine le modèle français des concessions a été pris en exemple, mais en plus du fermage, c'est-à-dire de l’exploitation des réseaux d’eau et d’électricité et de leur entretien, on a ajouté les investissements qui étaient, en France, assumés par l’autorité délégante et non la société privée», explique Claude de Miras. Cette attribution supplémentaires aurait pu être viable dans le cadre de villes arrivées à maturité, mais pas dans celui d’une croissance urbaine continue voire exponentielle qui suppose des investissement dans les réseaux d’eau, d’électricité et d’assainissement très importants.

Ces coûts d’investissements mettent également à mal «l’originalité du modèle marocain : 'l’eau paye l’eau’ ou plus exactement le multi-service», détaille Claude de Miras. Au Maroc les sociétés délégataires aussi bien que les régies ont la particularité de gérer à la fois les réseaux d’électricité, d’eau potable, et d’assainissement. Jusqu’ici, «les excédents dégagés sur la vente de l’électricité, au niveau des opérateurs, servent à financer les coûts d’assainissement», explique Claude de Miras. Le poids des investissements, en particulier pour l’assainissement, est toutefois trop lourd et devrait obliger le Maroc à revoir son modèle.

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