«J’avais 17 ans. C’était l’été. Il faisait beau, il faisait soleil. J’habite près de la plage et j’étais sortie marcher sur la côte, dans ce que je pensais être mon quartier, une extension de mon chez moi». C’est en ces termes que H.L. commence son récit, faisant allusion à ce qu’elle décrit comme étant l’une des expériences les plus bouleversantes de toute son existence. Intitulé «ce n'est pas votre faute», ce témoignage circule beaucoup sur les réseaux communautaires de la toile.
«Je fus accostée, par deux jeunes hommes que j’ai ignoré, je fus suivie, je fus menacée, j’ai marché plus rapidement mais je fus arrêtée. L’un d’entre eux immobilisa mes mains, me somma de le suivre sous peine de m’ouvrir le visage avec sa lame de rasoir. Je le suivis. Et pendant que l’autre faisait le guet à 100 pas de nous deux, il me viola, me bouscula, et m’insulta. Puis les rôles s’échangèrent, et j’étais à la merci du second homme, qui à son tour me viola, me bouscula et m’insulta», continue-t-elle, avec émotion.
Toujours selon ses mots, les histoires de viol diffèrent souvent mais restent similaires. «La peur, les sueurs froides, le moment où résister devient inutile et qu’on réalise ce qu’on est sur le point de vivre. Les membres qui tremblent, la certitude qu’on nous tuera après coup et le sentiment que personne ne nous sauvera (…) Et la peur, surtout la peur et le sentiment que son monde implose avec fracas mais que ces fracas n’assourdissent que nous».
Des témoignages qui affluent
«Ce soir-là, j’étais vierge, j’étais sortie faire un tour. Je fus agressée, je fus violée, je fus droguée et laissée sur la plage, à moitié nue, les pieds liés, la bouche bandée et les membres toujours tremblants des menaces paralysantes que j’avais reçues», raconte l’ex-mineure qui a eu le malheur d’être violée dans un pays qui ne lui «offre» pas plus que la possibilité d’épouser son violeur. Histoire de «sauver son honneur» et de «chasser la honte» à sa famille. Aujourd’hui, suite à la polémique d’Amina Filali, un webzine marocain a eu l’idée de lancer un appel à témoignages de la part des Marocaines victimes de viol. Résultat, les expériences relatées par les internautes violées inondent le site.
«Mon histoire est une parmi des millions. Et j’ai longtemps hésité à la raconter. Ce genre de témoignages met souvent les gens mal à l’aise. Ils ne “savent pas quoi dire”. Ils en parlent comme d’un secret, ils disent le mot viol à voix basse, ou ne le disent pas. Ils ne savent plus comment vous parler. Ils ne savent plus de quoi vous parler. Puis ils gardent votre histoire en eux comme un secret dont ils ont honte pour vous», poursuit H.L.
Si cette Marocaine a pris son courage à deux mains en se défoulant sur la toile, d’autres restent otages de leurs mauvais souvenirs, de peur d’être jugées ou lésées par les lois marocaines en vigueur. Car un viol n’est pas un simple rapport sexuel : «c’est une humiliation, c’est une blessure émotionnelle et physique, injustifiable et impardonnable», témoigne la blogueuse.