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Grand Angle

« My Makhzen and Me » : Un film sous contraintes [Interview]

«My Makhzen and Me», le film de Nadir Bouhmouch, sur le Mouvement du 20 février est visible en ligne à partir de demain sur son site. Pendant deux mois de tournage au Maroc, Nadir Bouhmouch, presque seul et sans budget, a voulu «montrer que les choses ne sont pas toujours telles qu’elles apparaissent. L’image d’un Maroc parfait qu’essaye d’établir le Makhzen n’est pas la réalité.» Le processus de réalisation du film est révélateur de ce que Nadir veut dénoncer. Interview.

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Yabiladi : Comment avez-vous décidé de réaliser ce film ?

Nadir Bouhmouch : L’histoire de ce film a commencé l’été 2010, quand je suis revenu des Etats-Unis pour voir ma famille pour deux mois. J’ai amené une caméra avec moi pour réaliser un court métrage de fiction sur une petite fille palestinienne. Quand je suis arrivé a l’aéroport, on m’a confisqué ma caméra, et je me suis retrouvé en train à me bagarrer contre le système : les douaniers, le Centre Cinématographique Marocain. J’ai pu récupérer ma caméra au bout de trois semaines.

Pendant ces trois semaines, j’ai vu que mon pays avait une mauvaise cote que je n’avais jamais ressentie avant, mais qui a toujours été là. Ils ont confisqué ma caméra pour me censurer mais, en essayant de me censurer, ils ont allumé un feu en moi. Quand je suis revenu aux Etats-Unis, bien avant le 20 février, j’avais prévu de faire un film sur le Centre Cinématographique Marocain. Je voulais dénoncer sa corruption et je voulais présenter le CCM comme une machine qui empêche la liberté d’expression. Mais après le 20 février, j’ai commencé à me dire qu’il fallait s’attaquer à quelque chose de plus grand et de plus important. Je voulais attaquer la source, et non pas l’embouchure d’une rivière sale.

 Comment avez vous été accueilli, avec votre caméra, par les manifestants ?

 Au début, ils étaient suspicieux parce que j’étais nouveau : je suis apparu soudainement en juin, lorsque je suis revenu des Etats Unis où je fais mes études. Beaucoup d’activistes se connaissaient depuis février ou avant. Mais après la première manifestation, ils étaient ravis de m’avoir avec eux. Ils considéraient que mon projet avait de la valeur. Ils m’ont montré tout ce qui est essentiel et ils m’ont vraiment ouvert les yeux.

 Quelles difficultés techniques ou «policières» avez vous rencontré ?

 Les difficultés techniques et «policières» sont très liées. La répression est à l’origine de la plupart de mes difficultés techniques. Je savais que si j’étais avec un «crew» c'est-à-dire avec un équipement complet et de qualité : une grande camera, des microphones et autre matériel, je serais très visible. Il était certain que je serais arrêté. J’ai donc choisi de faire sans cela : je me suis introduit dans les manifestations tout seul et avec une camera plus petite qu’un téléphone, mais qui tourne en HD 1080p. Malheureusement, cette caméra ne peux pas zoomer, elle n’a pas d’écran ni les options nécessaires pour obtenir des images de qualité. En plus, elle a un petit micro avec une qualité de son affreuse. Résultat : les têtes sont parfois coupées, le ciel est trop lumineux …

 Quel enseignement tirez-vous du Mouvement, un an après son lancement ?

 Le mouvement a crée un précédent pour notre pays. Ces jeunes ont secoué les fondations politiques du Maroc : ils nous ont appris qu’il est possible de faire entendre notre voix, d’interpeller et de questionner. C’est la première fois qu’on voit cela au Maroc. Les jeunes du Mouvement du 20 février sont rentrés dans les cahiers de l’Histoire. Même s’ils ne peuvent réussir aujourd’hui, demain, quand il en aura assez, le peuple saura qu’il a toujours la possibilité de mettre les pieds dans la rue. C’est ça le succès du 20 février.

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