La peur n’est plus au rendez-vous quand il s’agit de manifester son mécontentement au Maroc. Pour cette fois-ci, une médiation de la part du procureur de Taza a permis aux habitants de cette province et celle de Taounate de rentrer tranquillement chez eux. En effet, ces derniers en signe de colère ont planté il y’a quelques jours, un drapeau sur le devant d’une «Jeep» dans laquelle s’étaient réfugiés deux gendarmes, et ont également parsemé le capot de billets de 20 DHS, rapporte Assabah. N’eût été l’intervention du magistrat, quelle aurait été la suite des évènements, puisque la population a refusé celle des responsables de la gendarmerie de Taza et de Fès ? Soulagement dès lors et applaudissements.
Les autorités ont retenu la leçon
Ravivées avec le printemps Arabe et la naissance du Mouvement du 20 Février en 2011, de nombreuses protestations et manifestations sont récurrentes dans le Royaume. «C’est en 1998 déjà, alors que le gouvernement Youssoufi était en place que des grèves et revendications ont commencé à avoir lieu. Elles ont notamment donné lieu à l’émergence d’une société civile active», confie le politologue Mohamed Darif contacté par Yabiladi.
La liberté d’expression s’est considérablement élargie dans le Royaume depuis lors. Des manifestations ont régulièrement eu lieu sous le gouvernement de Abbas El Fassi en 2007 dans le monde rural notamment à Sefrou et à Sidi Ifni mais aussi dans les métropoles comme à Rabat. «La population a découvert sa capacité à exercer des pressions», affirme Mohamed Darif. L’influence du 20 Février a été manifeste ces derniers mois à travers ses discours et le PJD n’a pas manqué de rebondir en défendant lors de sa campagne des slogans relatifs à l’éradication de la corruption, entre autres.
Contrairement à la journée du 4 janvier dernier lorsque des affrontements entre forces de l’ordre et étudiants avaient donné cours à des violences à Taza, il n’y a pas eu de heurts lors de cette manifestation de colère des habitants des deux provinces. «Les autorités ont manifestement compris l’inutilité de sévir face aux protestations d'ordre sociales».
Effort collectif national
«Les mouvements sociaux n’ont pas encore pris une dimension nationale», regrette Mohamed Darif. En effet, ceux-ci se limitent la plupart du temps à «une seule ville ou à une seule campagne». Il faudrait parvenir à une «contagion» et à une action collective pour espérer «tenir tête à la corruption» par exemple. De son avis, ce sont des actions collectives qui accélèreront l’éradication de la corruption dans le Royaume.
Par ailleurs, la corruption doit être combattue sous toutes ses formes, notamment celle «institutionnelle» et «accidentelle», estime Mohamed Darif. La lutte doit s’effectuer sur tous les niveaux et pas seulement au niveau du quotidien.