L’ascension du PP a été spectaculaire, il faut le dire. Sur les 350 sièges de la chambre des députés, 185 sont pour le Parti Popular. C’est les résultats du scrutin anticipé qu’a connu l’Espagne hier : sur 96% des suffrages, 45% des voix allaient au PP, mettant toutes les cartes dans les mains de Mariano Rajoy, leader du PP. La nouvelle n’est pas pour réjouir le Maroc. Le pays a connu des années noires lorsque le PP était au pouvoir entre 1996 et 2004 avec José Maria Aznar à sa tête. Ce même parti a été derrière la condamnation du Maroc par le parlement européen au lendemain des évènements de Gdeim Izik en novembre 2010. Aujourd’hui, l’équilibre précaire des relations maroco-espagnols risque-t-il de pâtir avec un gouvernement espagnol de droite ?
Maroc-Espagne sous le PP : ennemis ou alliés ?
Son succès, lors du scrutin de dimanche, le PP le doit à une campagne électorale discrète, sans fortes promesses ni programme chargé. Profile bas donc pendant toute la campagne. Le PP fera-t-il profile bas sur les dossiers épineux l’opposant au Maroc également ? Sans doute, car Rajoy a tout misé sur un objectif : sortir l’Espagne de la crise économique. «Je lancerai un message à l'Europe, au monde et à l'Espagne […] La priorité sera de contrôler notre déficit et de ne pas augmenter notre dette publique.» disait Mariano Rajoy. «Nos ennemis, ce sont la crise économique et le chômage et nous allons les combattre.» insistait-il lors des festivités qui ont suivi l’annonce des résultats hier. Alors contre ces ennemis là, le PP ferait-il du Maroc un allié pour les combattre ?
L’épine «Sahara» risque-t-elle d’envenimer les relation ?
Difficile à dire. Les résultats des accords de pêche et agricoles Maroc-UE restent mitigés. Si les magnats de la pêche espagnole y sont largement favorables, les agriculteurs espagnols n’y trouvent pas leur compte. Et certains députés UE espagnols n’hésitent pas à utiliser le conflit du Sahara pour justifier une cassation de l’accord. «Il recèle beaucoup d’incertitudes sur le problème du Sahara et il préoccupe bon nombre d’organisations professionnelles européennes». D’ailleurs, le Parti Popular reste agrippé à ses positions sur le Sahara. Cette formation politique préconise l’autodétermination des sahraouis, à l’extrême opposé de la position marocaine incarnée par le plan d’autonomie, reléguant ainsi la neutralité du PSOE (parti socialiste espagnol) au deuxième rang. Une neutralité qui arrangeait bien le royaume chérifien. Selon Bernabe Lopez Garcia, professeur d’Histoire de l’islam contemporain, au département des Etudes arabes et islamiques, à l’Université autonome de Madrid, si le PP campe sur ses positions concernant le Sahara, le risque de tensions entre les deux pays, n’est pas à exclure. Mais «l’Espagne, dans cette période de crise économique, ne peut pas se permettre d’entretenir des relations tendues avec un voisin aussi important que le Maroc», temporise le professeur.
Les conflits maroco-espagnols semblent donc relégués au second rang dans un contexte économique critique, mais une éventuelle montée du Parti Justice et Développement (PJD) lors du scrutin du 25 novembre ne risque-t-elle pas de compromettre la trêve ? Si le PJD est perçu comme un parti islamiste, les Espagnols pourraient voir dans sa victoire une probable montée du terrorisme.