Paris : Les bureaux de Charlie Hebdo incendiés

Les journalistes de Charlie Hebdo n’ont pas pu aller travailler ce matin puisqu’une partie des bureaux de la publication ont été détruits hier soir vers 1h du matin par un incendie volontaire. Selon un témoin, des cocktails molotov auraient été lancés contre une vitre du bâtiment, ce qui aurait entraîné l’incendie. Pas de victimes mais plus de 150 m2 d’espace bureaux et des ordinateurs sont partis en fumée. Très vite, le parquet de Paris a ouvert une enquête pour connaître les circonstances de l’incendie. Pour l’instant, la police soupçonne des groupes extrémistes religieux ou politiques d’être derrière l’incendie.

Charlie Hebdo devient Charia Hebdo

Cet incendie intervient le jour-même de la sortie d’un numéro polémique baptisé «Charia Hebdo» avec «en Une, un dessin représentant le prophète Mohamed visiblement joyeux avec ces mots : «100 coups de fouet, si vous n'êtes pas morts de rire !». Dans ce numéro, le lecteur peut trouver un «édito de Mahomet» intitulé «L'apéro Halal», une double page de dessins pour expliquer «la charia molle» ou encore un supplément «Charia Madame». En dernière page, «les couvertures auxquelles vous avez échappé», un dessin représente Mohamed avec un nez rouge de clown et cette phrase: «Oui, l'islam est compatible avec l'humour», a rapporté l’AFP hier.

De son côté, le directeur de l'hebdomadaire Charb n’arrivent toujours pas à croire ce qui est arrivé. "Ce n'est pas la première fois que nous dessinons Mahomet, nous le faisons presque toutes les semaines, Nous voulions réagir à l'annonce de l'instauration de la charia en Libye et à la victoire du parti islamiste Ennahda en Tunisie.", explique-t-il au Monde.

Il nie également avoir voulu cibler les musulmans avec cette couverture provoquante. "Nous avons critiqué beaucoup plus les intégristes catholiques. En 19 ans, nous avons eu 13 procès avec certains d'entre eux et un seul avec des musulmans. On ne se lève pas chaque matin en se disant: "qu'est-ce qu'on va pouvoir raconter sur l'islam aujourd'hui?"

Pourtant des messages de protestation avaient commencé à circuler dès dimanche soir dernier sur le web. Certaines personnes suggéraient sur Twitter d'acheter le journal pour le brûler. Ensuite, la polémique est monté d’un cran après la publication, hier soir, de menaces sur la page Facebook du journal. Des messages comme «on va tous vous tuer» ou encore «l’Islam vaincra» avaient été envoyés à la rédaction.

Comme un malheur n’arrive jamais seul, le site internet de Charlie Hebdo a été piraté. Tôt ce matin, la page d’accueil renvoyait vers une page montrant La Mecque avec ce slogan: "Not god but Allah"  signifiant «pas d'autre Dieu qu'Allah».

Les réactions

Alors que l’équipe du journal se réunissait ce matin sur le trottoir devant le bâtiment incendié pour reprendre son travail, les premières réactions de personnalités religieuses et politiques sont tombées en cascade ce matin. Mohamed Moussaoui, Président du Conseil Français du Culte Musulman a déclaré :

" S'il s'agit d'un incendie criminel, nous condamnons fermement. En 2006, le CFCM avait porté plainte contre des caricatures [de Mahomet] beaucoup plus violentes [et] même si la justice a relaxé Charlie Hebdo, elle a dénoncé l'apologie de musulmans violents."

De son côté, le directeur du journal "Libération" a invité les journalistes de Charlie à venir travailler dans sa rédaction et leur a également proposé «l’asile journalistique» pour qu’elle puisse s’exprimer sur ces colonnes.

François Hollande qui est en pleine campagne présidentielle, n’a pas manqué de faire part de sa réaction. "Ces actes démontrent que le combat pour la liberté de la presse et le respect des opinions demeure permanent, et que le fondamentalisme doit être éradiqué, sous toutes ses formes.", a-t-il déclaré.

Enfin, cerise sur le gâteau, le ministre de l’intérieur Claude Guéant a affirmé de son côté : "La liberté de la presse est une liberté sacrée dans notre pays, il faut absolument tout faire pour la préserver et c'est pour cela que, qu'on aime ou qu'on n'aime pas Charlie Hebdo, tout le monde, tous les Français doivent se sentir ce matin solidaires d'un journal qui exprime par son existence et par sa façon d'être, la liberté de la presse».