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Maroc : Des ministres de pacotilles pour un gouvernement en baudruche [Edito]

Nous avons sûrement le gouvernement le plus faible que le royaume ait connu ces 15 dernières années. Cette fin de mandat sonne comme la victoire des intérêts particuliers sur l’intérêt général. Alors que les finances publiques sont mises à mal par l’explosion de la facture de la caisse de compensation, nos ministres préfèrent donner raison au lobby automobile.

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Temps de lecture: 4'

L’irréformable caisse de compensation qui sert à l’Etat à maintenir les prix des produits de première nécessité (farine, sucre, gaz, carburant) va engloutir cette année près de 45 milliards de dirhams, soit grosso-modo l’équivalent du déficit budgétaire 2011 (5% du PIB). Les voix se font donc de plus en plus fortes pour trouver une solution urgente à cette abyssale dépense budgétaire, d’autant plus que tout le monde aujourd’hui convient que cette subvention profite surtout aux foyers les plus aisés, alors qu’elle est censée aider les plus modestes.

Nizar Baraka a essayé de désamorcer la bombe en expliquant qu’en réalité ce n’est pas 45 milliards mais beaucoup moins si on tient compte des taxes perçues (TVA, TIC, …) Même ceux qui ont un BAC moins 12 en économie savent très bien que cela n’a rien à voir puisque si ces produits n’étaient pas subventionnés, les taxes perçues auraient été les mêmes car les prix à l’import ont augmenté.

Subventionner les plus riches

Inutile donc d’essayer de chercher une porte de sortie sans le moindre effort politique. La seule solution est de s’attaquer de manière frontale à la grande injustice de la caisse de compensation : des subventions qui profitent avant tout aux classes les plus aisées. Un allègement ou un arrêt de la subvention étant peu envisageable dans le contexte actuel (Printemps arabe, élections législatives anticipées), comment récupérer le trop perçu par les plus riches a posteriori ?

Il y a tout juste un an (fin octobre 2010), nous avions ouvert le débat sur un système de bonus-malus et de taxe écologique pour atténuer justement l’effet d’aubaine pour les ménages les plus aisés. Près d’une année plus tard, le gouvernement proposait une idée très proche, à savoir l’augmentation substantielle de la vignette pour les véhicules de grosses cylindrés. L’idée est simple : récupérer sous forme d’une taxe le trop perçu en subvention carburant. Rien d’extraordinaire ni de révolutionnaire dans cette mesure ciblant les foyers aisés qui aurait dû passer comme une lettre à la poste.

Touche pas à ma subvention !

Pourtant les importateurs de véhicules se sont émus de ce coup porté aux ventes de véhicules tout terrain et autres voitures de luxe. Si l'on suit la théorie fumeuse de ce lobby, un acheteur de Porsche Cayenne ou de Jaguar à 1 million de Dirhams, risque finalement de choisir une petite Kia Picanto pour ne pas payer sa vignette à 20 000 au lieu de 10 000 dirhams. De qui se moque-t-on ? En tout cas, le gouvernement vient de leur donner raison en tirant une croix sur l’augmentation de la vignette.

Les importateurs de véhicules ne sont pas à leur première opération de lobbying réussie. Ainsi fin 2010, ils ont réussi à convaincre le ministère de l’Equipement de limiter l’import de véhicules à ceux âgés de moins de 5 ans, prétextant le respect de nouvelles normes écologiques. Il faudra dans ce cas nous expliquer comment un gros 4x4 tout neuf peut consommer moins qu’un véhicule de tourisme de 6cv datant de 2001 par exemple. Les premiers ciblés et touchés par cette mesure ont été directement les retraités MRE qui venaient de bénéficier d’un abattement sur le dédouanement de leur véhicule. Malgré la pression médiatique que nous avions exercé afin de préserver l’intérêt de cet abattement, une responsable au sein du ministère des MRE nous avait expliqué en off que le lobbying automobile était beaucoup trop fort. Finalement, in extremis, les retraités MRE bénéficieront d’une mesure dérogatoire pour 2 ans limitant l’import de véhicule âgé à moins de 10 ans au lieu de 5.

Un gouvernement à l'écoute... des lobbies

Ce sont donc ces mêmes importateurs qui profitent de la baisse des droits de douane qui ne veulent pas que l’on augmente la vignette. Ce sont ces mêmes importateurs qui profitent de l’essence subventionné pour vendre des véhicules qui consomment 15l/100km, qui font pression sur le gouvernement.

Mais bien que ce comportement des lobbies va à l’encontre de l’intérêt général, ce n’est pas à eux qu’il faut en vouloir. Car quoi de plus normal pour ses importateurs de véhicules que de défendre leurs intérêts ? Là où le bât blesse, c’est le comportement déliquescent de notre gouvernement qui dit amen à tout, sans se soucier de l’intérêt de la nation, sans avoir une vision globale de l’économie de ce pays. Ces ministres qui sont censés représenter le pouvoir exécutif, ont en réalité autant de vision pour le pays, qu’une chouaffa (voyante) de Sidi Abderrahmane.

Taxons les pauvres pour continuer à rouler en 4x4

Le ballon d’essai sur la taxation de la fortune et la hausse de la vignette a fait long feu. En à peine un mois tout s’est dégonflé, telles des baudruches, tous se sont dégonflés, vidant ainsi la loi de Finances 2012 des seules mesures volontaristes de ce gouvernement en fin de course. Alors comment croire ces mêmes ministres (Baraka et Mezouar) qui n’ont de cesse de rappeler qu’il faut réformer la caisse de compensation alors qu’ils n’ont même pas été capables d’augmenter la vignette auto et récupérer une partie des subventions dans la poche des plus riches ? Comment accorder du crédit à leurs promesses électorales alors qu’ils avaient tous parlé de cette réforme en 2007 et la reprenne encore pour 2011 ? Comment dans ce contexte ne pas comprendre le citoyen marocain qui refuse de donner du crédit à la mascarade électorale en s’abstenant ?

En 2012, comme les années précédentes, ce sont les pauvres fellahs (paysans) et les modestes familles des villes qui payeront pour que le riche puisse continuer à rouler sans se soucier du prix du carburant. Mais que nos pauvres ne s’inquiètent pas, ce même gouvernement a pensé à eux. Même si aujourd’hui ils n’ont pas de véhicules pour profiter de l’essence subventionné, dans quelques années ils pourront «profiter» du TGV entre Tanger et Casablanca.

merci
Auteur : abdo447
Date : le 28 octobre 2011 à 10h53
Merci pour l'explication.

mais 17 DHS le 1Litre c'est une Fortune dans un PAYS ou le SMIG Horaire est de 9,66 DH/heure (BRUT) !!
Vous vous trompez...
Auteur : webmaster
Date : le 28 octobre 2011 à 10h41
L'huile de table n'est plus subventionnée depuis de nombreuses années abdo447 !

Sinon la France produit son huile de tournesol et de colza, contrairement au Maroc qui doit l'importer.
quelqu'un peut m'expliquer ?????
Auteur : abdo447
Date : le 28 octobre 2011 à 10h25
comment se fait-il qu'un LITRE de l'HUILE de Table Subventionné est vendu 17 DHS

alors qu'en France SANS SUBVENTION 1L de l'huile de Table est à 12 DHS ??????????????????
la réponse est dans l'article
Auteur : sosomache
Date : le 28 octobre 2011 à 10h19
Les solutions constructives sont apportées dans cet article si on le lit sérieusement : le gouvernement n'aurait pas dû céder aux revendications du lobby automobile tout simplement. Cet édito révèle deux problème graves au Maroc : un, le montant astronomique de la caisse de compensation 45Mds DH et deux, le besoin de diminuer notre déficit budgétaire qui est tout aussi astronomique. Or, la situation ne permet pas de diminuer le montant de la caisse de compensation (cela provoquerait l'augmentation du prix des produits de première nécessité avec toutes les conséquences que l'on imagine). Une des solutions constructives pour réduire notre déficit était donc de taxer les riches notamment par l’augmentation de la vignette pour les véhicules de grosses cylindrés. Malheureusement, le gouvernement n'a pas eu le courage de voter cette taxe.
petite faute
Auteur : sosomache
Date : le 28 octobre 2011 à 09h59
tous ce sont dégonflés => tous se sont dégonflés
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