Le quotidien valencien Las Provincias rapporte, jeudi 18 août, sur son site internet, un fait divers peu commun qui a touché une famille de Marocains de la ville d’Alicante, dans la région de Valence, au sud-est de l’Espagne. Les Madrani, installés en Espagne depuis une douzaine d’années, n’ont jamais eu de problème jusqu’à ce lundi 15 août. Alors que la mère de la famille préparait de la viande pour la rupture du jeûne, elle est violemment prise à partie par ses voisines qui se plaignent des odeurs du barbecue. S’en suivent des injures puis une violente bagarre entre la famille et ses voisins de l’immeuble.
La police, entre bavure et racisme
Le comportement de la police espagnole dans cette affaire suscite bien des interrogations. D’après le témoignage de l’un des enfants de la famille, un policier s’est d’abord présenté à l’appartement habité par la famille Madrani au moment des premières plaintes. «Le policier est venu et il nous a dit que s’il revenait, ce serait pour nous amener tous», explique l'enfant. A se demander si les odeurs de cuissons constituent un délit.
La police ne s’arrête pas là. Lorsque les injures virent à la bataille rangée entre les Madrani et leurs voisins, le couple de Marocains et quatre de leurs enfants sont arrêtés. La police n’a arrêté aucun de leurs voisins. «C’est du racisme, non parce que je le dis, mais parce qu’on n’a arrêté que nous […]. Mon père a signalé aux policiers qu’on m’avait frappé, mais ils n’en ont pas fait cas», déplore Taha, un des enfants.
Pourtant, le reporter de Las Provincias, qui a assisté à la scène, atteste que les membres de la famille ont essuyé une véritable tentative de lynchage de la part de leurs voisins. Ces derniers auraient d’ailleurs forcé la porte de l’appartement pour les passer à tabac.
Etonnamment, cette violation flagrante de domicile ne figure pas dans le constat établi par les éléments de la police. Les Madrani sont d’ailleurs accusés du délit de «bagarre tumultueuse». Alors qu’ils sont au poste de police, des agents auraient même essayé de les dissuader d’intenter un recours.
Sauvés par le juge
Malgré les intimidations, la famille, soutenue par deux avocats, introduit une requête d’habeas corpus. Il s’agit d’une disposition qui empêche à tout citoyen d’être emprisonné arbitrairement. En analysant le dossier, le juge Juan Carlos Cerón constate des incohérences. Il se rend d’abord compte que les personnes présentées par la police comme étant les coupables sont les seules à présenter sur leurs corps des traces de la bagarre.
De plus, le délit dont les accuse la police suppose selon la loi espagnole, qu’il y aurait deux groupes d’égale importance or selon Las Provincias, les Madrani étaient opposés à une vingtaine d’assaillants. Il n’en fallait pas plus : le magistrat a prononcé, mardi même, leur remise en liberté. Après cet épisode, où les véritables coupables ont vraisemblablement été protégés par les forces de l’ordre, les Madrani entendent porter plainte contre leurs agresseurs.