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Grand Angle

France : Médias et diversité

Si la diversité dans les médias est au cœur des préoccupations du CSA français, les compagnies audiovisuelles manquent toujours de couleurs. Discrimination à l’embauche ou difficulté d’accès aux écoles de journalisme pour les enfants d’immigrés ? Le club Averroès demande l’application de sanctions pour les entreprises de presse à la traine en matière de diversité, et les grandes écoles de journalisme revoient leurs conditions d’admission.

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Ali Baddou animant sa nouvelle émission "Le Grand Mag"
Temps de lecture: 3'

La diversité n'est pas assez représentée dans les médias français. C'est en tout cas ce que révèle le dernier rapport du Club Averroès, association de défense de la diversité dans les médias. Pour Hervé Bourges, président du comité permanent de France Télévisions, «la diversité à France Télévisions [est] loin d’être exemplaire». Autocritique plutôt dure pour une chaine qui montre des signes de bonne volonté avec le retour d’Audrey Pulvar sur l’écran de France 2, l’émission culturelle d’Elisabeth Tchoungi, et la critique culture sur France 3 de Leila Kaddour-Boudadi, la fille d’un ouvrier immigré. La présence d’un grand nombre de journalistes issus de l’immigration sur France Ô plaide également en la faveur de la compagnie. Le club Averroès félicite également la chaine dans son rapport pour son «évolution positive dans les magazines de France Télévisions, tant au niveau des invités, experts ou témoins, que dans le traitement des sujets».

Cependant, le groupe qui a été parmi les premiers à signer la Charte de la Diversité a été devancé par TF1 qui a décroché le Label de la Diversité de l’Afnor. Son «Harry (Roselmack) en immersion» enregistre des audiences spectaculaires. Le Club Averroès présente Canal+ comme première de la classe avec une représentativité «exemplaires». Rappelons que le franco-marocain Ali Baddou y anime depuis le 27 juin sa propre émission, «Le grand Mag», après avoir été chroniqueur, dès 2007, dans le Grand Journal de Michel Denisot.

Les chaines de la TNT ont par contre été durement apostrophées par le rapport du Club Averroès. Créées en 2005, ces chaines jeunes par leur âge et par leur publique, restent «hermétiquement sourdes aux avancées de ses ainées», comme on peut le lire sur le rapport qui déplore leur «inertie» en la matière. Les chaines de la TNT y sont même décrites comme «mauvais élèves du PAF».

Des efforts soutenus

La Charte de la Diversité, quant à elle, continue de collecter des signatures. Kag Sanoussi, Secrétaire Général de cette organisation, précisait en 2010 que «Par cette signature, nous incitons les medias à devenir les représentants d'une diversité de société assumée et intégrée, autant dans leurs équipes que dans leurs programmes». La même année, 15 nouvelles chaines ont signé la Charte : ARTE France, M6, NRJ groupe et RTL groupe, etc. Le CSA a pour sa part mis en place l'Observatoire de la diversité présidé par Rachid Arhab.

Si Hervé Bourges pense que «La diversité commence à être pleinement assumée comme un véritable choix éditorial, et non plus comme une contrainte politique», le Club Averroès reste sceptique et estime qu’il est nécessaire de «doter le Conseil supérieur de l’audiovisuel d’une véritable capacité de sanctions, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui». Ces sanctions ne seraient appliquées en principe qu’au niveau des médias, alors que le problème doit être traité à la source : les écoles de journalisme.

La source du problème

«Les concours des grandes écoles de journalisme ont soit une sélection très ardue: sur des milliers, ils en prendront sûrement 30, comme le Celsa, soit sont plus accessibles mais le concours puis l'inscription coûtent chers […]Les gens d'origine immigrée ou issus d'une classe sociale modeste se retrouvent avec moins de chances d'entrée que les autres» explique Faris Sanhaji, journaliste freelance d’origine marocaine. «Durant tout mon parcours, j'ai dû connaître un garçon d'origine marocaine qui sortait d'une grande école, un seul», termine-t-il.

Prise de conscience des grandes écoles de journalisme

En effet les écoles de journalisme reconnues en France privilégient certains profiles au détriment des fils d’immigrés. Ces derniers, issus de milieux sociaux défavorisés ou d’ethnies victimes de racisme, sont «bloqués à tous les niveaux du processus […] Ils pensent que ces études ne sont pas faites pour eux» se désole Bernard Spitz, président d’une commission sur la diversité dans les médias. Cependant, ces deux dernières années, de plus en plus conscientes de cette «injustice», les grandes écoles de journalisme tentent d’y remédier.

L’ESJ de Lille, en partenariat avec le Bondy Blog, a mis en place une formule prépa au concours de 520 heures «ouverte et gratuite» aux boursiers. L’Institut Pratique de Journalisme a adopté le système de formation par alternance. Les étudiants admis signent un contrat avec une entreprise de presse, touchent un salaire et peuvent ainsi poursuivre leur cursus à l’IPJ. Le Centre de Formation des Journalistes a opté pour le même procédé. Chaque année 15 étudiants sur 40 poursuivent leurs études en alternance. Le CFJ a même revu ses épreuves d’admission «Cela a eu un effet immédiat sur le profil des étudiants qui ont franchi la barre de l'admissibilité», souligne Christophe de Loire, directeur de l’école.

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