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Grand Angle

Surpopulation carcérale : La détention préventive dans le collimateur de l’Observatoire marocain des prisons

Les prisonniers en détention préventive se taillent presque la moitié de la population carcérale. Soit le principal facteur de la surpopulation des prisons au Maroc.

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La surpopulation carcérale pourrait être largement enrayée si les prisons marocaines ne renfermaient pas une large partie de personnes en détention préventive. / DR
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En août 2016, la contrôleuse générale et juge d’application des peines, Adeline Hazan, jetait un pavé dans la marre : les prisons françaises, qui accueillent plus de détenus qu’elles ne le peuvent (117% de taux d’occupation), sont des «cocottes-minutes», disait-elle dans un entretien au Monde. «Aujourd’hui, les droits fondamentaux des détenus ne sont pas respectés, comme le droit aux liens familiaux ou le droit à la santé, puisqu’il n’y a pas assez de médecins pour voir tout le monde», se justifiait cette ancienne élue socialiste.

Les prisons du Royaume pourraient-elles se voir affublées du même qualificatif ? Oui, juge l’Observatoire marocain des prisons (OMP). Dans un rapport publié jeudi, l’instance fait état de chiffres préoccupants : le taux d’occupation de la prison locale de Marrakech plafonne à 328,42%, contre 245,2% pour celle de Nador et 190,4% pour celle de Souk El Arbaa. Au niveau de la prison locale d’Aïn Sebaâ, ce taux atteint 157,16%, contre 140% pour celle d’Aït Melloul et 131,31% pour celle de Tétouan 2.

Seul deux établissements sont épargnés : la prison agricole de Zayou, dont le taux de surpopulation s’élève à 85,8% et le Centre de réforme et d’éducation de Salé, qui enregistre un taux de 82,75%.

Des espaces «punitifs» qui n’assument plus le volet social

Un fléau qui pourrait être largement enrayé si les prisons marocaines ne renfermaient pas une large partie de personnes en détention préventive (40,2%), c’est-à-dire la détention subie par un prévenu, conformément à la terminologie judiciaire, préalablement à sa comparution éventuelle devant la juridiction compétente. «Les procureurs ont tendance à recourir très souvent - trop souvent - aux prisons. C’est presque devenu systématique», déplore Abdellah Mesdad, secrétaire général de l’OMP joint par Yabiladi.

«Ce phénomène constitue le facteur principal amplifiant la dégradation de la surpopulation des prisons, et fait des prisons des établissements punitifs, au lieu d’être des établissements privatifs de liberté et jouant leur rôle en matière de qualification et de réinsertion sociale», relève l’Observatoire. L’architecture des prisons doit également être repensée pour mieux répartir les détenus. «Des espaces doivent être agrandis, quand d’autres doivent être créés», préconise Abdellah Mesdad.

D’autres recommandations sont émises dans le document de l’OMP, conformément à celles relatives au Pacte international des droits civils et politiques (PIDCP) : mettre en place une politique de recours aux peines de substitution à la privation de liberté, assurer l’harmonisation de la législation nationale avec les conventions internationales et mobiliser davantage les acteurs du système judiciaire (magistrats, avocats et procureurs) pour l’application des dispositions du PIDCP par les tribunaux nationaux.

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