Entre Dakar et Casablanca, un aller-retour coûte 7000 DH en basse saison et 8500DH durant les vacances d’été, des tarifs prohibitifs pour de nombreux Marocains au Sénégal, qui élèvent leurs voix, comme le rapporte la MAP. Les personnes les plus touchées sont les étudiants, mais aussi les marchands marocains qui ont élu domicile au Sénégal. Pour beaucoup, passer les vacances au Maroc devient trop cher, et ils sont contraints de rester sur place. D'autant plus que les marchands ont vu un ralentissement de leurs activités à cause de la crise et qu'ils sont en concurrence accrue avec les commerçants chinois dans le marché sénégalais.
Même chose pour les étudiants marocains. 600 seraient par exemple inscrits dans la faculté de médecine et de pharmacie de l’Universite Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), pour la plupart d'origines modestes. Pour eux, le prix du billet constitue l’obstacle majeur, et les alternatives ne sont pas nombreuses. Soit l'on prend d’autres compagnies aériennes avec des escales à Tunis ou même Istanbul. Soit l'on choisit le trajet terrestre. Selon la MAP, plusieurs emprunteraient les routes pour venir au Royaume en passant par la Mauritanie; un trajet de trois jours.
Même durée de vol, billets trois fois plus chers
Les prix ne sont pas seulement élevés en termes absolus, mais aussi en termes relatif. Le trajet entre le Sénégal et le Maroc dure environ 3 heures. Comparé aux trajets d'une durée similaire vers des destinations en Europe, le billet en provenance du Sénégal, même en basse saison, peut atteindre un prix 3,5 fois plus élevé. Vers l'Europe, un aller-retour (par exemple pour Berlin ou même Istanbul) se vend à partir de 1950 DH, alors que vers Dakar, le prix est de 7000 DH.
Une situation qui risque aussi, à long terme, de porter un coup sur les liens de fraternité entre les enfants d’immigrés et leur patrie. «L’intérêt porté au pays, l'attachement à son identité et le besoin vital de passer ses vacances au Maroc sont des valeurs portées par chaque Marocain, mais ceci ne peut pas se faire avec les tarifs actuels» précise Mohamed Farsi, président du Conseil national des Marocains du Sénégal.
Les relations économiques en pâtissent aussi. Selon Mohamed Lahlou, président du Club des investisseurs marocains au Sénégal, «les tarifs actuels entravent énormément les échanges économiques entre le Maroc et le Sénégal. Beaucoup d'investisseurs marocains qui veulent prospecter le marché sénégalais, annulent leurs voyages à cause de la cherté du billet d'avion.»
La RAM se défend
Malgré son monopole sur la ligne directe Dakar-Casablanca, Royal Air Maroc souligne que le prix actuel des tickets ne traduit nullement une volonté d’exploitation de leur position de force. Selon la compagnie, deux raisons justifient la cherté du trafic : les taxes pratiquées par les autorités aéroportuaires sénégalaises et la hausse des prix du kérosène.
De plus, la RAM fait savoir que 70% de son trafic entre les deux pays est constitué d’étrangers notamment de ressortissants sénégalais ou des autres pays de l’Afrique de l’ouest qui font souvent escale à Casablanca. Cependant, cette clientèle n'est pas en reste dans la critique de la compagnie aérienne. Elle va même plus loin : un appel à boycott a été lancée contre la compagnie marocaine en début d'année. Outre le prix, le service est mis en cause, et notamment la disparition fréquente de bagages, rapporte Air Journal.
La communauté marocaine résidant au Sénégal ne compte cependant pas rester indifférentes. Selon la MAP, Mohamed Farsi président du Conseil national des Marocains du Sénégal et par ailleurs membre du Conseil de la communauté marocaine à l'étranger (CCME), vient d'adresser des correspondances aux dirigeants de la RAM et à d'autres autorités marocaines pour leur demander de réviser à la baisse ses tarifs. Une pétition aurait par ailleurs été lancée.