Mercredi 23 mars, le cabinet de la chancelière allemande Angela Merkel a adopté un projet de loi portant sur la reconnaissance de qualifications professionnelles acquises à l'étranger. Une mesure nécessaire depuis longtemps, reconnaît Annette Schavan, ministre de l'Education. Selon des estimations officielles, environ 300 000 personnes ont actuellement un emploi qui ne correspond pas à leurs qualifications, à cause de la non-reconnaissance de leurs diplômes en Allemagne. Ce chiffre est d'autant plus significatif qu'en même temps, le pays manque d'ouvriers spécialisés. 117 000 emplois seraient vacants, parce-que les employeurs ne trouveraient pas de profils correspondants, surtout dans les domaines de l'informatique, des mathématiques, des sciences naturelles et techniques.
La mesure phare du projet de loi est d'instaurer l'obligation pour les autorités de traiter une demande de reconnaissance en l'espace de trois mois. Les autorités devront pas seulement statuer sur la reconnaissance de qualifications acquises à l'étranger, mais aussi indiquer quelles formations continues sont nécessaires, le cas échéant, pour compléter ces qualifications et les rendres compatibles avec le marché du travail allemand. Environ 350 métiers seront concernés, et un numéro gratuit est mis en place pour informer les concernés sur les démarches à faire.
Réactions mitigées : Des problèmes persistent
Le gouvernement tente par cette mesure de minimiser les désavantages surtout pour des candidats extra-européens sur le marché de travail. La reconnaissance des qualifications doit cependant aussi favoriser l'intégration des étrangers en Allemagne. C'est une «reconnaissance dans les deux sens», estime Maria Böhmer, la chargée de l'intégration du gouvernement fédéral.
Pour certains, ce projet de loi ne va cependant pas assez loin. Dieter Hundt, président de la fédération des organisations patronales allemande estime qu'il faudrait ouvrir davantage le marché de l'emploi en Allemagne et rendre possible à des entreprises d'employer des compétences directement à l'étranger.
Le parti d'opposition SPD (socio-démocrates) critique par ailleurs que le projet de loi omet de faciliter réellement les procédures. Dans une interview au magazine allemand Migazin, Swen Schulze (SPD) explique que le projet de loi n'instaure pas de bureau central qui traiterait les demandes de reconnaissance des diplômes et qualifications. Il reste difficile à savoir à quelle administration s'adresser. Dans le cas précis d'une aide soignante turque, son bureau n'aurait pas pu trouver l'administration compétente pour établir l'équivalence, et ce après de longues recherches.
De l'avance sur la France
Néanmoins, l'Allemagne prend les devants dans la comparaison internationale. Les instances de l'Union Européenne (UE) ont beaucoup œuvré pour faciliter la reconnaissance de diplômes et qualifications au sein des pays-membres de l'UE. Mais pour les pays extra-européens, ce processus n'en est qu'à ses débuts. En France notamment, un droit opposable n'existe pas pour les ressortissants étrangers pour voir leurs demandes traitées dans des délais fixés. Le ministère des Affaires étrangères a fait une liste d'organes compétents en matière d'équivalences. La seule lecture du nombre d'administrations compétentes suffit cependant pour témoigner de la lourdeur bureaucratique des procédures de reconnaissance.