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Grand Angle

Archéologie : Une nouvelle espèce de crocodile découverte au Maroc

Une nouvelle espèce de crocodile ayant vécu au Maroc il y a environ 100 millions d’années vient d’être découverte grâce à des fossiles retrouvés par des chercheurs français dans les Kem Kem. D'après une étude publiée en août dernier dans une revue scientifique et reprise cette semaine par plusieurs médias d’information scientifique, ce petit crocodile de 60 centimètres seulement a été baptisé «Lavocatchampsa sigogneaurussellae». Détails et conclusions.

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Photo d'illustration. / DR
Temps de lecture: 3'

Au Maroc, dans les riches fossiles de dinosaures vieux d’environ 100 millions d'années, des scientifiques français ont découvert une nouvelle espèce de crocodile. C’est grâce à un fossile de mâchoires, supérieure et inférieure, conservées ensemble avec des dents de forme irrégulière, que les spécialistes ont conclu qu’il s’agissait là d’une nouvelle espèce encore méconnue, indique le site d’informations dédié aux sciences Eurekalert. Ce dernier cite notamment un article publié dans la revue scientifique Journal Of Vertebrate Paleontology (JVP).

Dans un premier temps, les chercheurs ont pensé qu'il s’agissait du museau d'un petit mammifère. Au cours de leurs recherches, ils ont finalement réalisé qu’il appartenait à un crocodile en ligne d’évolution, dont la taille aurait été estimée à 2 pieds (60 cm). «Le fossile retrouvé au Maroc arborait des dents complexes et des cuspides pour permettre à l’animal de croquer les exosquelettes des insectes, un peu comme le ferait un petit mammifère. On note également l’absence de maxillaires et de dentitions propres aux crocodiles», explique Eurekalert. Les crocodiles modernes ont relativement des dents coniques simples et ne peuvent pas mâcher leur nourriture, tandis que celles relevées sur l’espèce étaient différentes.

«Le gisement des Kem Kem (au sud de la ville de Taouz, à la frontière maroco-algérienne, ndlr) regorge de fossiles d’espèces animales, généralement assez larges. Grâce à cette nouvelle découverte, nous réalisons que cette partie de l’écosystème, relative aux vertébrés terrestres de petite taille, reste encore méconnue», précise Jérémy Martin, l’un des auteurs de l’article, professeur au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et chercheur au Laboratoire de géologie de Lyon.

«Sa vie était plus sûre sur Terre, sous les pieds des dinosaures»

L’appellation choisie pour le petit reptile, Lavocatchampsa sigogneaurussellae, est composée des noms du paléontologue français René Lavocat, qui a beaucoup travaillé sur les fossiles africains, ainsi que ceux des professeurs Denise Sigogneau-Russell et son mari Donald Russell, qui ont découvert le fossile.

Afin d'étudier ce nouveau spécimen, l'équipe de recherche menée par Jérémy Martin et le docteur France de Lapparent de Broin, du Muséum national d'histoire naturelle de Paris, ont passé au peigne fin la structure interne des os à l’aide d’un scanner de haute résolution, en veillant à ne pas détruire le fossile. L'équipe a également examiné de très près la dentition sous un très fort grossissement pour déterminer le motif de l’usure et comprendre comment Lavocatchampsa sigogneaurussellae utilisait ses dents. «Au début des années 1990, les mammifères du Crétacé ont été intensivement recherchés en Afrique. Avant la découverte des dents monoradiculées (c’est-à-dire composées d’une seule racine, ndlr), il était difficile de concevoir que ce spécimen pourrait appartenir à un crocodile», renchérit le docteur France de Lapparent de Broin.

Triste nouvelle pour le crocodile : compte tenu de sa taille et du fait qu’il aurait vécu aux côtés de dinosaures carnivores géants, l’existence du Lavocatchampsa sigogneaurussellae n’a pas due être un long fleuve tranquille. «Les eaux étaient grouillantes d'autres espèces beaucoup plus grandes et des crocodile-parents très carnivores», poursuit l’étude, qui note qu’à l'époque, «sa vie était plus sûre sur Terre, sous les pieds des dinosaures, que dans l'eau avec ses grands cousins».

Les chercheurs comptent aujourd’hui se pencher sur cette espèce disparue. «La prochaine étape sera de comprendre la place de ce crocodile dans cet écosystème particulier et le fonctionnement et l’évolution de l’écosystème dans son ensemble. Cette découverte ouvre des perspectives fascinantes pour la recherche paléoécologique», salue Jérémy Martin.

Article modifié le 2016/10/13 à 20h04

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