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Grand Angle

Loi sur les travailleurs domestiques : Les regrets des associations de défense des droits de l'enfance

Il aura fallu deux longues années pour que le Parlement adopte mardi soir la très attendue loi n° 19.12 relative aux conditions de travail et d'emploi des travailleurs domestiques. Il semblerait toutefois que la montagne ait accouché d’une souris : censé répondre aux aspirations de la société civile, le texte déçoit les militants.

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Durant la période transitoire de cinq ans prévue par le gouvernement, des mineurs âgés de 16 et 17 ans continueront de subir l’exploitation. / DR
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La société civile s’est réveillée ce mercredi sur une nouvelle décevante : le projet de loi n° 19.12 relatif aux conditions de travail et d'emploi des travailleurs domestiques a été adopté à la majorité, mardi en plénière, dans le cadre d'une deuxième lecture par la Chambre des conseillers.

Cette loi vise à garantir un niveau satisfaisant de protection aux employés de maisons, et ce en interdisant l'emploi aux travailleurs âgés de moins de 16 ans. Le texte fixe en effet l’âge limite d’accès au travail domestique à 18 ans, mais n’éradique cette pratique auprès des mineurs âgés de 16 à 18 ans qu’après une période transitoire de cinq ans.

Les dispositions de ce texte de loi ambitionnent de mettre un terme à l'emploi des moins de 18 ans en interdisant le recours à leur service sans l'obtention de l'autorisation d'un tuteur, en imposant leur soumission à un examen médical tous les six mois et en établissant une liste exhaustive des tâches à risque prohibées.

Une discrimination à l’égard des mineurs

Adopté à 27 voix pour, 23 contre et aucune abstention, le texte, qui a dormi plus de deux ans au Parlement, reste très loin des aspirations de la société civile. L’âge limite d’accès au travail domestique fixé à 18 ans constitue un «progrès», estime Omar El Kindi, membre du Collectif pour l'éradication du travail des petites bonnes, déplorant néanmoins que le texte prévoie «la possibilité d’exploiter des mineurs entre 16 et 17 ans pendant une période dite transitoire de 5 ans».

Autre reproche : aucune ligne n’est consacrée aux dizaines de milliers de mineurs actuellement exploités. La société civile y voit une discrimination à l’égard des mineurs, rappelant que le royaume est signataire de plusieurs conventions internationales sur les droits de l’enfant. Le Maroc serait donc entre le marteau de ses engagements à l’international et à l’enclume de cette nouvelle loi qui contrevient à ces conventions.

Les associations ne manquent pas non plus de signaler que de telles dispositions risquent d’encourager les intermédiaires, qui plaçaient autrefois des petites bonnes de façon discrète et pourraient être aujourd’hui tentés de le faire au vu et au su de tous.

La liste des travaux dangereux attendue

Les ONG tirent surtout à boulets rouges sur le ministre de l’Emploi et des affaires sociales et le processus du vote de la loi. D’après elles, Abdeslam Seddiki aurait présenté des amendements annulant ceux de la veille, présentés au niveau de la commission Education et affaires culturelles et sociales de la Chambre haute. Ce processus lui aurait permis d’éditer directement le texte avant le vote - une «manœuvre contestable», jugent les militants pour l’éradication du travail des mineurs.

L’opinion publique et les associations n’ont finalement plus qu’à attendre la publication au Bulletin officiel (BO) de la loi. Elle sera suivie par la mise en place des décrets d’application et la liste des travaux dangereux, notamment. Nouvellement évoquée par la loi n°19.12, cette dernière voit le jour suite à une recommandation émise par l’Organisation internationale du travail (OIT). Les associations espèrent que certains travaux dangereux rendront définitivement illégal le travail des mineurs.

En attendant et durant la période transitoire de cinq ans prévue par le gouvernement, des mineurs âgés de 16 et 17 ans continueront de subir l’exploitation.

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