«On est tous Moutazakki !». C’est le message brandi en français et en arabe par les victimes de spoliation et des associations sympathisantes, depuis ce matin, devant le tribunal de première instance de Casablanca. Ils réclament ainsi la libération de Mohamed Moutazakki, président de l’association des victimes de spoliation, arrêté lundi 25 avril au quartier Mâarif. Il y avait rejoint les membres de son association devant une villa qui aurait été spoliée par Moustapha Him, lequel purge actuellement une peine de 7 ans de prison dans le cadre de l’affaire Brissot et mêlé à plusieurs autres cas de spoliation.
«Nous étions venus là parce que nous avons encore des effets personnels dans la maison que nous voulons récupérer», explique à Yabiladi Kawtar, l’une des membres de la famille mise à la rue. «Le fils de Him était sur place avec des délinquants. Ils ont créé un accrochage et c’est ainsi que la police est intervenue et a arrêté Moutazakki disant qu’il a frappé le fils de Him», raconte à Yabiladi la vice-présidente de l’AVS, Latifa Bouabid.
Rappelons que lors de l’expulsion de cette famille, Moutazakki avait dénoncé «la présence du fils de Mustapha Him» sur les lieux ainsi que «des travaux entrepris en pleine nuit au niveau de la clôture de la maison». Mais nous n’avons pas pu vérifier cette information auprès de l’intéressé.
Complot ?
Mais les militants associatifs vont plus loin, dénoncant «un complot de la mafia immobilière» contre M. Moutazakki. «Il est victime d’une machination, d’un piège», déclare Abou Sofiane, membre de l’association Soleil d’enfant, qui a fait le déplacement, car sensible à la spoliation pour avoir «vu dans [son] quartier de nombreuses familles se faire spolier et se retrouver à la rue du jour au lendemain». «Quand on l’a emmené au commissariat, on lui a demandé pourquoi il est revenu au Maroc et pourquoi il n’est pas resté en Italie», rétorque une autre manifestante.
Pour mémoire, Mohamed Moutazakki est un ancien MRE d’Italie revenu investir au Maroc via sa société Italian Line après avoir signé, avec la société italienne Lavazza, un contrat de distribution exclusive du café de la marque éponyme. Spolié en 2005, ce n’est qu’en octobre 2015 que la justice condamnera les coupables. Entre temps, son expérience personnelle l’avait poussé à devenir la voix des victimes de la spoliation à Casablanca. On se souvient notamment du cas de Shalom Abdelkak, cet octogénaire marocain de confession juive expulsé d’un appartement qu’il louait depuis près de 50 ans, après sa récupération par la «mafia de l’immobilier» selon M. Moutazakki. Cette affaire avait fait réagir jusqu’au sommet de l’Etat.
Pour l’heure, aucune poursuite n’a été engagée contre Mohamed Moutazakki, mais il est visé par une plainte déposée pour «coups et blessures», indique à Yabiladi un de ses trois avocats. Il ne peut cependant pas en dire davantage pour l’instant, car «la procédure est encore frappée par le secret».
De leur côté, les victimes de la spoliation et les associations sympathisantes poursuivent leur mobilisation. Au moment où nous publions cet article, ils sont déjà plus de 100 personnes en sit-in devant le tribunal.