«On n’a pas honte d’avoir la COP22 à Marrakech et d’avoir un espace où les animaux sont exposés dans le respect des normes internationales. Les deux peuvent ne pas être contradictoires», affirmait à Yabiladi en début d’année un responsable au Haut-commissariat aux Eaux et forêts (HCEF) en marge de la mobilisation nationale visant à mettre fin en 2016 au trafic des espèces protégées.
Mai, le mois de toutes les clarifications
Et depuis, chaque fois que la grande messe de l’environnement de novembre prochain est évoquée dans les cercles des militants de la cause animalière, une question revient : les participants de la COP22 auront-ils vraiment droit au traditionnel spectacle animalier sur la place Jemaâ el-Fna ? Il y a quelques années encore, l’activité des «charmeurs» faisait polémique au-delà même des frontières du royaume. La pratique était notamment qualifiée de «sauvage et répugnante» ou encore de «spectacle moyenâgeux».
Alors que les autorités marocaines ont toujours défendu un «savoir-faire marocain» et qu’en 2013 elles s’orientaient vers une légalisation de la pratique, il n’est pas encore certain que celle-ci soit mise en exergue pendant la COP22 qui aura lieu dans la ville ocre du 7 au 18 novembre prochain. Pour l’heure, le HCEF ne peut répondre avec exactitude. «Mais la décision sera prise très prochainement», assure à Yabiladi Zouhair Amhaouch chef division des Parcs et Réserves naturelles au HCEF.
Au mois de mai -d'après le responsable- après avoir bouclé les programmes régionaux de préparation au plan nationale de lutte contre le trafic d’espèces protégées, les Eaux et forêts vont retourner sur Marrakech. «Nous allons y faire un travail de proximité sur la place Jemaâ el Fna qui consistera à insister davantage sur la différence entre la détention d’animaux à des fins culturelles et la détention à des fins commerciales», explique M. Amhaouch. «Le but, c’est d’éviter que la place joue le rôle de commerce. Il ne faut pas que l’activité culturelle engendre le commerce d’animaux. C’est illégal», rappelle-t-il.
Plusieurs pistes à explorer
Cependant le responsable explique que la COP22 n’est «pas vraiment» à l’origine de cette mobilisation. «C’est un travail que nous faisons sur le long terme. La COP22 certes exerce une certaine pression sur l’agenda, mais ce n’est pas la raison principale», affirme M. Amhaouch. «D’autant plus que, poursuit-il, on sait comment ça se passe au Maroc. Il suffit d’une décision du wali pour que les " charmeurs" disparaissent de Jemaâ el Fna pendant la COP. Et après on les verra revenir».
Dans les prochaines semaines, plusieurs réunions interministérielles auront lieu en présence des autorités de la ville pour discuter de ces points. Selon le chef division des Parcs et Réserves naturelles au HCEF, les autorités étaient précédemment sur une piste-solution. «L’idée consistait en la création d’un centre de détention où les charmeurs récupéreraient les animaux le matin et les ramèneraient à la fin de la journée», se souvient le responsable, soulignant qu’il s’agit d’une «vieille proposition» qui pourrait être mise de côté.
L'activité des «charmeurs» pendant la COP, une «honte» selon les ONG
D’après lui, le HCEF veut davantage mettre un accent sur «la garantie du bien-être des animaux» détenus et tendrait plutôt à mieux réguler la détention, soit un seul animal par charmeur à la fois. «Il y en a qui viennent sur la place avec un singe, tandis qu’ils en ont deux ou trois autres à la maison. Le principe serait que chaque charmeur ait un seul animal détenu de manière légale avec tous les documents que cela implique et dans des conditions garantissant le bien-être des animaux. Il n’en acquerra un autre que si celui qu’il détient meurt», explique M. Amhaouch, ajoutant que plusieurs pistes seront explorées lors des travaux.
L’exposition d’espèces protégées sur la place Jemaâ el-Fna reste un sujet de discorde entre les autorités et les ONG. Celles-ci n’ont jamais cautionné la thèse du «savoir-faire marocain» et espèrent toutes que le Maroc en aura fini avec cette pratique avant la COP 22. «Avec ce grand congrès sur les changements climatiques, il serait dommage pour l’image du Maroc si tous les grands écolo du monde trouvaient à Jemaâ el-Fna des animaux sauvages exposés comme c’est le cas actuellement», affirmait en janvier à Yabiladi Ahmed El Harrad de Barbary Macaque, une association de lutte contre le trafic du macaque de Barbarie.