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Grand Angle

 Attentats de Bruxelles : Les Belgo-Marocains veulent croire en cette unité nationale affichée Place de la Bourse

Après les attentats de Paris, la communauté d’origine marocaine en Belgique était envahie par l’inquiétude. Depuis les attaques de Bruxelles il y a deux jours, c’est la mobilisation sociale qui a marqué les esprits. Malgré les différences, le sentiment d'unité nationale a rassuré.

Publié
©AFP
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«On peut constater qu’un travail est vraiment en train d’être fait pour unir les gens», confie à Yabiladi le président de l’association socio-culturelle Ligne de Mire, Lhaoussaine Ouachen, qui ne peut poursuivre sans exprimer la douleur qu’il a ressenti suite aux attentats perpétrés mardi 22 mars à Bruxelles. «Je l’ai vécu au plus profond de moi-même. Comme tout le monde, j’ai des connaissances qui ont failli mourir soit dans le métro, soit à l’aéroport», confie-t-il. Pour mémoire, ces tragiques incidents ont fait –selon le bilan provisoire- 31 morts (dont une Marocaine) et 270 blessés (dont six Marocains).

D’après M. Ouachen, la situation est devenue «très compliquée» pour la communauté musulmane en général et maghrébine en particulier avec une «amplification de l’amalgame». «Il y a des appels à éviter de se balader seul dans les rues, car plusieurs femmes voilées se sont fait crachées dessus après les attentats», affirme-t-il.

«Du jamais vu !» 

Mais de l’autre côté de la capitale belge, les gens semblent moins au courant de ce genre de faits. Ici, c’est plutôt l’unité des Belges, et rien que ça, qui saute aux yeux. «Nous assistons à quelque chose d’extraordinaire. Tous, nous nous retrouvons à la place de la Bourse. De nombreux Marocains y participent naturellement. Beaucoup d’observateurs sont surpris. C’est un élan nouveau», explique Khalil Zeguendi rédacteur en chef du Maroxellois, un site d’information dédié à la communauté marocaine à Bruxelles.

L’homme des médias souligne cependant «la peur» qui se repend au sein de la société. «C’est la peur de ce qui peut arriver demain, peur qu’un autre attentat se produise. Cela peut pousser certains à tenir des discours stigmatisants», reconnait-il, estimant toutefois que le racisme ou l’islamophobie n’en serait pas le motif. De plus, M. Zeguendi considère qu’il y a des «signaux positifs» de la part du gouvernement qui contribuent à apaiser la situation.

Pour sa part, le réalisateur et scénariste Belgo-marocain, Ismaël Saïdi, ne voit que cette unité «pour l’instant». «La communion à laquelle on assiste à la place de la Bourse, c’est du jamais vu !», déclare-t-il à Yabiladi. «On n’a jamais vu un pareil mélange. Hier, il y avait des drapeaux marocains, algériens, tunisiens, belges,…», ajoute le comédien qui jouait sa pièce de théâtre «Djihad»  à Bruxelles la veille des attaques. «Je suis très touché. Je suis né là [à Maelbeek], j’ai grandi là, je prends le métro tous les jours», confie l’artiste qui a émue la Toile hier, mercredi, en répondant –sur Facebook- à tous ceux qui demandent pourquoi les musulmans ne descendent pas dans rue. Selon M. Saïdi, ils sont tout simplement occupés à intervenir à chaque niveau dans la gestion post-attentat (Cf. encadré).

Un discours politique généralement positif

Dans la classe politique belge on est encore sous le choc, à l'image du député Khalid Mansouri. Ce qu'il retient c'est avant tout l’unité nationale actuelle. «C’est vraiment l’élément très positif», déclare-t-il à Yabiladi. Outre quelques rares figures d’extrême droite, assure le député, «le discours politique est généralement positif en Belgique après les attentats. Les gens comprennent que les terroristes sont des criminels, des délinquants, comme il y en a partout, dans toutes les communautés et dans toutes les sociétés».

Pour lui d’ailleurs, le fait que les attaques ont été perpétrées dans des espaces publiques illustre bien l’exposition de tous les Belges -indépendamment de leur origine ou leur religion- à la terreur des extrémistes. Son seul souhait à présent est de voir l'élan de solidarité se perpétuer. C'est l'avis de nombreux Belges qui préparent une marche «contre la peur» dimanche, une manière pour eux de prolonger cette communion nationale.

Pourquoi les musulmans... par Ismaël Saïdi

"Pourquoi les musulmans ne descendent pas en masse dans la rue pour condamner ?"

Parce que nous sommes en train de conduire les taxis qui ramènent gratuitement la population chez elle depuis hier...
Parce que nous sommes en train de soigner les blessés dans les hôpitaux...
Parce que nous conduisons les ambulances qui filent comme des étoiles sur nos routes pour essayer de sauver ce qu'il reste de vie en nous...
Parce que nous sommes à la réception des hôtels qui accueillent les badauds gratuitement depuis hier...

Parce que nous conduisons les bus, les trams et les métros afin que la vie continue, même blessée...
Parce que nous sommes toujours à la recherche des criminels sous notre habit de policier, d'enquêteur, de magistrat...
Parce que nous pleurons nos disparus, aussi...
Parce que nous ne sommes pas plus épargnés...

Parce que nous sommes doublement, triplement meurtris...
Parce qu'une même croyance a engendré le bourreau et la victime...
Parce que nous sommes groggy, perdus et que nous essayons de comprendre...

Parce que nous avons passé la nuit sur le pas de notre porte à attendre un être qui ne reviendra plus...
Parce que nous comptons nos morts...
Parce que nous sommes en deuil...
Le reste n'est que silence...

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