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Grand Angle

Violences domestiques : HRW interpelle le gouvernement marocain

Après Amnesty internationale en janvier dernier, c’est au tour de Human Rights Watch de tirer la sonnette d’alarme concernant les violences faites aux femmes au Maroc. L’ONG a écrit au gouvernement, particulièrement au sujet des violences domestiques. Reconnaissant l’engagement du Maroc, HRW appelle Rabat à faire de la réforme de la loi, une réforme qui éradique véritablement ce fléau dont souffrent des milliers de femmes à travers le royaume. 

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La lettre est personnellement adressée à la ministre de la Solidarité, des Femmes, de la Famille et du Développement social, Bassima Hakkaoui et au ministre de la Justice et des Libertés, Mustapha Ramid. Human Rights Watch commence par saluer l’engagement du gouvernement pour l’égalité et la liberté des femmes et la lutte contre la violence, avec notamment les différents projets de loi proposés pour réformer le code pénal.

Cependant, l’ONG déplore que les réformes législatives proposées au Maroc restent partiellement en déphasage avec les différents traités internationaux signés par le royaume sur la question des violences domestiques, notamment la Convention des Nations Unies sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. HRW fait remarquer notamment que le code pénal en vigueur au Maroc ne définit pas spécifiquement la violence domestique, restant sur une définition «générale» de la «violence contre les femmes». De plus, le viol conjugal n’est pas expressément criminalisé et les références à la violence domestique dans le cadre du code pénal sont loin des exigences du droit international des droits humains.

Quels sont les rôles de la police et la justice ?

L’ONG regrette qu’alors que la police et la justice sont «sont au cœur de la réponse à la violence conjugale», les lois existantes ne fournissent pas une orientation adéquate aux policiers, procureurs ou juges d'instruction au sujet de leurs droits en cas de violence conjugale. Selon les témoignages recueillis par HRW, certaines femmes ont pu obtenir des ouvertures d’enquêtes suite à leur plainte. Mais dans de nombreux cas, les victimes se retrouvent soit renvoyées vers leurs maris, soit soumises à des pots de vins exigés par les policiers avant toute action de leur part. Et bien des fois, les procureurs disent ne pas pouvoir agir sans l’enquête de la police. Du coup certaines femmes se retrouvent abandonnées à elles-mêmes.

HRW soulève également la question des preuves dans des affaires de violences conjugales portées devant les tribunaux. Selon les témoignages des avocats, les juges serraient parfois «incohérents ou déraisonnables» sur ce qu'ils considèrent comme preuve suffisante pour une condamnation. Certains d’entre eux iraient, en effet, jusqu’à exiger des témoins oculaires, même quand ils ont un rapport médical et le témoignage de la victime.

HRW demande un vrai changement

Pour toutes ces réalités et bien d’autres détaillées dans la lettre, HRW appelle le gouvernement à un effort supplémentaire. L’ONG a émis une batterie de recommandations, appelant notamment à une définition propre de la violence conjugale dans le projet de loi proposé par le gouvernement. HRW demande également que le projet de loi évoque clairement les tâches de police dans les cas de violence domestique et lui octroie les pouvoirs suffisants pour des perquisitions et des arrestations, entre autres. Estimant en outre que le témoignage d’une plaignante peut être une preuve suffisante pour une condamnation, HRW invite l’Exécutif à en tenir compte dans son projet de loi.

Soulignant qu’elle a déjà écrit cinq lettres aux autorités marocaines en 2015, demandant des réunions et des informations sur la violence domestique, sans recevoir de réponse, HRW exhorte le gouvernement «à prendre au sérieux les points de vue et l'expérience des survivants de violence familiale» pour en finir avec les violences conjugales au Maroc.

C’est la deuxième interpellation adressée à Rabat par une ONG internationale depuis le début de l’année au sujet des violences faites aux femmes, après les recommandations émises en janvier dernier par Amnesty. Jusqu’ici ni Hakkkoui, ni Ramid n’ont pour l’instant réagi à ces sorties.

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