La presse parle à nouveau d’une visite du premier ministre tunisien au Maroc du 9 au 11 février. C’est d’abord la chaîne locale Nesma qui en a fait écho, relayée ensuite par l’hebdomadaire Jeune Afrique. Mais les deux médias s'accordent à dire que le déplacement de Habib Essid reste conditionné par l’amélioration de son état de santé. Le chef du gouvernement est en effet alité depuis le 1er février, à l’hôpital militaire de Tunis. Il devrait reprendre ses activités le lundi prochain.
A la tête de l’exécutif depuis janvier 2015, Essid n’a jamais effectué de visite de travail à Rabat. En revanche, il s’est déplacé deux fois à Alger, respectivement les 16 et 17 mai et le 25 octobre 2015. De son côté, Abdelilah Benkirane s’était réuni, en juin dernier, avec Essid à l’occasion de la tenue dans la capitale tunisienne de la 18ème session de la haute commission entre les deux pays.
Relations dans le doute après le départ de Marzouki
Avec la départ de Moncef Marzouki du palais de Carthage, à l’issue des élections présidentielles de décembre 2014, les relations maroco-tunisiennes ont entamé une phase d’incertitudes. Les nouveaux dirigeants ont parié sur l’Algérie, notamment ses aides financières et son appui à l’armée tunisienne dans la guerre contre les groupes terroristes.
En témoigne les fréquentes visites effectuées par plusieurs ministres, du chef du gouvernement et du président de la république (les 4 et 5 février 2015, même pas deux mois après son élection) dans la capitale du voisin algérien en seulement une année au pouvoir. En revanche, Béji Caïd Essebsi prend encore tout son temps pour répondre aux invitations du roi de Mohammed VI.
Le 19 juillet, trois semaines après l’attaque terroriste contre Sousse, Salaheddine Mezouar était à Tunis «porteur d’un message de solidarité et d’amitié» du monarque au nouveau locataire du palais de Carthage. Les entretiens avaient porté justement sur «les préparatifs de la visite qu'effectuera prochainement au Maroc le président tunisien et les dossiers en cours d'élaboration», écrivait la MAP. Fin août, la presse tunisienne avait prédit une visite d’Essebsi au Maroc, mais rien de nouveau depuis.
Deux alliés majeurs de Washington dans la région
Pourtant, tous les éléments convergent pour des relations fortes entre Rabat et Tunis. Au-delà de la prose officielle sur l’ «unité arabe et maghrébine» et le «destin commun», les deux pays partagent, depuis juillet dernier, l’appartenance à un même club : celui des Etats ayant le statut d’allié majeur non membres de l’OTAN de Washington. Le royaume a eu sa carte d’adhésion en 2004. Un privilège accordé à 16 pays dans le monde dont six de la région arabe : la Jordanie, le Bahreïn, l’Egypte, le Koweït, la Tunisie et le Maroc.
L'aspect sécuritaire a servi de ciment dans les relations algéro-tunisiennes. Mais dans une déclaration du ministre de la Défense, Farhat Horchani, on pourrait voir les prémices d’une prise de distance avec le voisin algérien. En octobre, ce membre du gouvernement Essid révélait au quotidien saoudien Asharq Al Awsat que «le terrorisme, qui représente l’un des plus grands défis de mon pays, provient des frontières avec la Libye et l’Algérie». Le Mont Chaambi, le repaire par excellence des groupes djihadistes, est en effet situé aux frontières avec l’Algérie.